Quotidiennement, aux quatre coins de la Oumma (monde musulman), le Réveil islamique crève l'actualité, de mille façons. Et l'Occident inquiet ne comprend pas ce retour aux sources qui entraîne, à des degrés divers, des centaines de millions d'hommes.

L'Occident saisit avec difficulté les motivations de ces « fous de Dieu », qui semblent échapper à toute logique et qui s'agitent en tous sens pour restaurer une société moyenâgeuse.

Quel que soit le jugement de valeur qu'on peut porter sur l'intégrisme islamique et ses excès, il faut reconnaître qu'il présente — contrairement à une opinion largement répandue — une cohérence idéologique et des structures organisationnelles remarquables, qui lui permettront sans doute de développer son champ d'action.

Recrutant essentiellement au sein des classes moyennes et de la petite bourgeoisie fraîchement urbanisée, de plus en plus à l'université (dans les facultés de sciences et de médecine surtout) et parmi les professions libérales (ingénieurs, avocats...), les mouvements intégristes — à la différence de la plupart des partis — présentent une « vision de l'Univers » qui prétend s'incarner dans tous les domaines.

Les plus islamisés

Quatre États ont tenu à mentionner leur caractère musulman dans leur appellation officielle : la République fédérale islamique des Comores, la République islamique iranienne, la République islamique de Mauritanie et la République islamique du Pakistan. Outre ceux-ci, l'Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis et la Libye sont les pays qui s'inspirent le plus largement du Coran et de la Chari'a (Tradition) dans leur législation, notamment pénale.

Le Coran

« L'islam est doctrine, culte, patrie, nationalité, religion, État, spiritualité, action, Coran et épée », écrivait Hassan el-Banna, fondateur et premier guide suprême de l'AFM (Association des Frères musulmans).

À quelque groupe qu'ils appartiennent, les intégristes entendent faire du Coran et de la Chari'a (Tradition) le fondement de la législation et de la société. Dans cette optique, le droit civil et le Code pénal sont appelés à être entièrement refondus, pour se conformer aux préceptes coraniques. Lapidation pour adultère, amputation de la main pour vol avec récidive, flagellation et décapitation pour certains crimes doivent être rétablies.

Le prêt à intérêt, assimilé à l'usure, sera supprimé. L'aumône légale (zakat), que tout croyant doit acquitter, sera un des pilliers essentiels du droit fiscal. Un collège d'ulémas (docteurs de la loi), doté de larges prérogatives, sera institué pour veiller à la pureté du système législatif.

Jihad

Tous les intégristes rejettent dos à dos les deux grandes idéologies « étrangères et ennemies de l'islam » : le communisme matérialiste et athée, et le capitalisme exploiteur qui véhicule une morale « permissive décadente ».

Conformément à la loi coranique, juifs et chrétiens vivant en pays islamique seront soumis au statut des dhimmis, citoyens de seconde zone « protégés » ne pouvant accéder aux fonctions officielles ni à certains métiers.

En politique étrangère, deux axes sont à suivre :

– Nettoyer le Dar el-Islam (mot-à-mot : la maison de l'islam), c'est-à-dire le monde musulman, en renversant les « gouvernements corrompus qui y sévissent ». Puis unir toute la Oumma en un État unique.

– Engager l'épreuve de force avec le Dar el-Harb (mot-à-mot : la maison de la guerre), c'est-à-dire le monde non musulman. Il s'agira notamment de libérer, par le Jihad (guerre sainte), la Palestine, l'Érythrée, Chypre, les musulmans d'Asie centrale « soumis au joug soviétique », les musulmans d'Extrême-Orient (Philippines, Thaïlande) « opprimés par les infidèles », et même — pour certains extrémistes — de « récupérer l'Andalousie » !

Les États-Unis et l'Union soviétique sont les ennemis principaux à abattre, « les deux Satans », pour utiliser une formule chère à l'imam Khomeiny.

Franc-maçonneries

Fous de Dieu sans doute. Mais aussi redoutables hommes d'action, obéissant à une hiérarchie très stricte : les subordonnés ne discutent jamais les ordres donnés par leurs supérieurs, qui sont souvent affublés du titre d'émirs.