Aussitôt porté par référendum, le 13 octobre 1981, à la magistrature suprême de la République, Hosni Moubarak tient à rassurer à la fois les Israéliens — « la normalisation n'est pas remise en cause » —, les Américains — « le processus de Camp David sera poursuivi » — et même les Saoudiens — « il n'y a pas de différends fondamentaux entre l'Égypte et l'Arabie saoudite ».

Hosni Moubarak paraît cependant décidé à marquer de son cachet personnel la politique égyptienne. Né en 1928, héros de la guerre d'octobre 1973, vice-président depuis le 15 avril 1975, le raïs, caution de l'armée, a été intimement, quoique discrètement, mêlé à la politique d'Anouar el-Sadate.

Tranquille et simple, utilisant un langage direct, connu pour avoir su garder intacts ses contacts avec le monde arabe, passant pour bien disposé à l'égard des États-Unis, Hosni Moubarak confirme en quelques semaines ses qualités d'homme d'État. Du même coup, on suppute avec moins d'appréhension l'après-Sadate.

Les émeutes d'Assiout — un haut lieu de l'intégrisme musulman —, qui surviennent après le 6 octobre 1981 et font 73 morts, nourrissent tout d'abord des doutes sur la stabilité du régime et sur son avenir. Mais ces événements restent sans conséquence. L'enquête sur la mort du raïs et la répression qui s'ensuit touchent peu l'armée et désignent les coupables : les Frères musulmans et les diverses organisations intégristes qui s'y rattachent.

Libérations

Le président Moubarak, tout en frappant le courant intégriste, cherche habilement à se réconcilier avec les opposants laïcs : il fait libérer une trentaine de ceux-ci, parmi les plus connus, qu'Anouar el-Sadate avait fait emprisonner en septembre 1981. Ces personnalités, dont plusieurs appartiennent au Rassemblement progressiste (marxiste-nassérien), ne manquent pas de rendre hommage le 25 novembre au « courage » du nouveau raïs.

Puis, évitant de remettre brutalement en question la politique controversée d'ouverture (infitah) pratiquée jusque-là, Hosni Moubarak entend mettre désormais l'accent sur le redressement économique du pays.

Enfin, mieux assuré du bon vouloir des opposants de gauche, dont la libération se poursuit, le raïs commence aussi à procéder à l'élargissement de quelques responsables intégristes. Omar Telemsani et Saleh Achmaoui, ancien animateur de la revue (interdite) Al-Daoua, recouvrent leur liberté, le 26 décembre 1981.

Apaisement

La formation d'un nouveau cabinet présidé par Fouad Mohieddine consacre, le 3 janvier 1982, cet apaisement recherché à l'intérieur, qui est encore confirmé par l'élargissement le 26 janvier de l'iman Kichk. Mais la vigilance à l'égard de l'intégrisme islamique ne se relâche pas pour autant. Début mai, la peine de mort est requise contre 229 militants islamiques tenus pour responsables des troubles d'Assiout.

Hosni Moubarak manifeste son désir de poursuivre une délicate normalisation égypto-israélienne et de préparer le retour de l'Égypte au sein de la communauté arabe. Venu, début février 1982, chercher en Europe (en France en particulier) et aux États-Unis une reconnaissance internationale destinée à affermir sa stature de chef d'État, le raïs veut mobiliser tous ses efforts pour faire aboutir la paix égypto-israélienne, dont l'évacuation totale du Sinaï (26 avril) est la consécration.

Le président tente aussi de remettre en ordre l'économie, en moralisant ses circuits (quelques condamnations exemplaires pour corruption sont prononcées) et grâce à une aide accrue de l'Occident. Le Caire se montre enfin désireux d'apurer le contentieux avec Moscou.

Hosni Moubarak s'écarte à la fois du pharaonisme de Sadate et du panarabisme de Nasser. Il veut choisir, dans la paix, une voie moyenne et une synthèse propres à s'accommoder de la mouvante conjoncture du Proche-Orient.

Les mouvements intégristes islamiques

En Égypte, des fanatiques assassinent, le 6 octobre 1981, le président Sadate, « traître à l'islam ». En Iran, la répression frappe des milliers d'« ennemis de Dieu » et de « corrompus sur terre ». Syrie et Iraq sont le théâtre d'attentats meurtriers perpétrés par des mouvements intégristes contre les « infidèles » du parti Baas, de l'armée et du gouvernement : l'explosion d'une bombe fait des centaines de victimes à Damas, le 29 novembre 1981. Au nom du Coran, la Mauritanie mutile ses voleurs. Le Pakistan flagelle publiquement ses « mécréants ».