Le timbre reste pourtant une valeur sûre ou, en tout cas, considérée comme telle. Un sondage réalisé aux États-Unis a précisé qu'il existe, actuellement aux USA, 25 millions de collectionneurs dont 1 million à peine de vrais philatélistes. Les autres ? En majorité des amateurs de bons timbres qui entendent opérer un excellent investissement. On estime, outre-Atlantique, que ce type d'investissement se situe au deuxième rang. Et, comme la collection américaine ne présente guère de figurines vraiment intéressantes, on achète du timbre étranger. Sur ce plan, au moins, la France est très prisée.

La petite guerre entre charniérophiles et charniérophobes se poursuit, mais elle semble vouloir pencher du côté des premiers. Les philatélistes, de plus en plus nombreux, protestent contre la baisse vertigineuse, et tout à fait artificielle, de la cote des timbres ayant trace de charnière. Les négociants, poussés par la majorité de leurs clients, commencent à faire chorus. Mieux encore, un mouvement se dessine en faveur d'une collection de timbres neufs débarrassés de leur gomme. On s'est aperçu, en effet, qu'à partir d'un certain âge la colle se craquelle, se resserre et, ainsi, abîme le timbre lui-même. En tout état de cause, on devrait, dans un avenir proche, revenir à une notion plus juste de la valeur réelle des pièces de collection.

Politique

On sait que les collectionneurs ne mêlent pas philatélie et politique, mais il arrive que parfois celle-ci ait une incidence sur celle-là. Le changement de régime en France a provoqué la suppression rapide de la série courante dite des Sabine qu'on a remplacée par celle des Liberté. Dans des émissions de ce genre, il se peut qu'un ou deux timbres parviennent à une bonne cote, alors que tous les autres se traînent lamentablement. Cette fois, c'est la série tout entière qui a fait un bond. Oh ! il ne s'agit pas d'un boom spectaculaire, mais le fait qu'on n'ait pas attendu la sortie des catalogues annuels pour le signaler prouve que l'enlèvement des Sabines a été répercuté (même si cette Sabine est de David et non de Poussin).

Et, puisqu'on parle d'incidence politique, il n'est pas besoin d'être grand clerc pour annoncer que beaucoup de philatélistes éclairés se penchent sur les timbres des îles Falkland !

L'année philatélique a été marquée par deux événements internationaux : le Mundial et Philexfrance.

Le championnat du monde de football a provoqué, comme on pouvait s'y attendre, la sortie d'une multitude d'émissions, pas toujours officielles, avec, bien entendu, premiers jours souvenirs, maximaphilie, etc.

D'innombrables commerçants, dont certains plus ou moins honnêtes, proposaient des séries naturellement appelées à prendre de la valeur au cours des ans. Mais comment leur jeter la pierre quand on sait que les postes espagnoles ont donné l'exemple en ajoutant à trois séries — ce qui était déjà trop — des blocs-feuillets en sept exemplaires correspondant aux sept villes où se déroulent les rencontres. Elles espéraient ainsi éponger un déficit se montant à 4 644 millions de pesetas. Il faudra des mois pour additionner les rentrées d'argent, mais, d'ores et déjà, on chuchote dans les milieux dits bien informés qu'on serait plutôt loin du compte.

Philexfrance a, pour sa part, connu un succès populaire certain. Beaucoup de visiteurs venus du monde entier se sont rendus au CNIT entre le 11 et le 21 juin à la fois pour admirer nombre de pièces rares et pour effectuer des achats. On y a vu des collectionneurs de tous âges, passionnés pour la plupart. Et, si on avait quelques doutes sur l'avenir de la philatélie, on les aurait perdus à compter les jeunes qui ne voulaient rien perdre du spectacle et se pressaient d'un stand à l'autre.

On était loin, très loin du four d'Arphila (Journal de l'année 1974-75) de triste mémoire. Les panneaux disposés sur trois étages clairs et aérés étaient assez espacés pour permettre une circulation aisée, même lorsqu'un groupe stationnait devant chacun d'eux. Les collections de prestige, comprenant notamment des albums appartenant à la reine d'Angleterre, au prince Rainier de Monaco, étaient mises en valeur.