Guidés par Finochietti, les enquêteurs découvrent, trois jours plus tard, le corps de Jacques Massié, inhumé sommairement au bord d'un chemin, à une quinzaine de kilomètres d'Auriol. Les corps des autres victimes vont, pendant plusieurs semaines, demeurer introuvables.

L'instruction est énergiquement conduite par une jeune femme d'une trentaine d'années, Françoise Llaurens-Guérin. Bientôt quatorze personnes sont inculpées. Toutes appartiennent ou ont appartenu au SAC. Ce sont les cinq membres présumés du commando : Jean-Bruno Finochietti, Lionel Collard, Jean-François Massoni, Didier Campana et Ange Poletti, et neuf autres personnes, dont Pierre Debizet, 59 ans, secrétaire général du SAC et conseiller technique, au titre du ministère de la Coopération, auprès du président gabonais, Omar Bongo. P. Debizet sera libéré le 7 septembre.

Les réactions politiques ne tardent pas ; le RPR crie au procès d'intention, tandis que le PC et le député radical de gauche François Loncle réclament une fois de plus la dissolution du SAC.

G. Defferre, faisant état de procédure en cours, temporise et P. Mauroy affirme que « le gouvernement est décidé à ne rien laisser dans l'ombre ».

Les corps des cinq autres victimes sont découverts, le 30 juillet, dans une mine désaffectée. Il s'agit maintenant pour les enquêteurs d'abord de cerner la personnalité de celui qui est au centre du drame : Jacques Massié, puis de faire la lumière sur les mobiles de ses assassins.

Activités

Jacques Massié, entré dans la police en 1963, a d'abord fait carrière dans les compagnies républicaines de sécurité. Il semble que son adhésion au SAC n'ait pas été étrangère à son avancement rapide. L'ancien brigadier, promu inspecteur-stagiaire à Marseille, était un homme dont l'apparente jovialité cachait mal l'ambition. On peut supposer que, parallèlement à sa profession de policier, il ait mené au sein du SAC, dont il animait la section des Bouches-du-Rhône, des activités discutables. Et, comme il avait l'habitude fâcheuse d'établir des fiches et rapports sur tous ses partenaires (la police retrouvera des centaines de feuillets écrits de sa main), il est probable que ses compagnons ont voulu récupérer des témoignages gênants.

À l'origine, Jacques Massié avait souhaité faire carrière au sein du RPR, mais un échec aux municipales de 1977 avait freiné son élan. Il avait alors créé un Centre d'étude et de réflexion politiques et sociales. Cette initiative avait également tourné court. Pourtant, jusqu'au début de 1980, il semble que l'honorabilité de Jacques Massié au sein du SAC ait été incontestable. Par la suite, les activités extra-professionnelles du futur inspecteur-stagiaire auraient dérapé. À cette époque, il est entré en contact avec des sociétés de gardiennage. Certains responsables de ces sociétés diront qu'il a tenté de les racketter. Il aurait aussi envisagé de créer sa propre société de surveillance.

Rivalités

Et puis, au sein du SAC se sont développés des rivalités, des clans.

Jean-Joseph Maria aspire à remplacer Massié comme responsable départemental. Le 26 avril 1981, Jacques Massié se plaint d'avoir été victime d'un attentat. Selon lui, un motard a tiré sur sa voiture. En bon policier, il a relevé le numéro de la moto, et celui-ci conduit à un membre du SAC. En mai, Pierre Debizet, secrétaire général du mouvement, reçoit les doléances de Massié et de Maria, mais il évite de trancher le contentieux qui sépare les deux hommes. Le 14 juin, une cinquantaine de membres du SAC se réunissent dans une auberge du Var. Massié n'est pas des leurs. Son exécution a-t-elle été décidée ce jour-là ? Un garagiste signale avoir entendu des coups de feu à l'issue de la réunion et, fait troublant, on notera peu après la disparition d'un membre du SAC favorable à Massié : Jacques Courtois. Depuis, plus personne ne l'a revu.

Ainsi, un mois avant le drame d'Auriol, les éléments qui pourraient avoir été à son origine sont rassemblés : deux hommes rivalisent pour le poste de responsable du SAC des Bouches-du-Rhône, Jacques Massié et Jean-Joseph Maria. Le premier détient des documents compromettants pour le mouvement, le second soutenu — entraîné peut-être par une majorité activiste — a sans doute bien envie de faire place nette. A-t-il cédé à la tentation ?