Des délégations de l'Académie pontificale des sciences sont reçues début décembre par les chefs d'État à Washington, Moscou, Paris, où elles présentent un dossier sur les conséquences de l'emploi éventuel des armes nucléaires. On y relève notamment cette phrase : « Les récentes déclarations selon lesquelles on pourrait gagner une guerre nucléaire et y survivre laissent apparaître un manque d'appréciation de la réalité médicale ».

Enfin, une certaine reprise en main de l'Église se poursuit Elle s'opère discrètement, par exhortations et aussi par nominations : chaque fois qu'il le peut, Jean-Paul II place aux postes stratégiques des hommes fidèles à sa ligne, qui respectent les orientations du concile Vatican II, sans vouloir aller plus loin.

Cette reprise en main est facilitée par un certain essoufflement des mouvements contestataires et intégristes. Après les remous de l'ère postconciliaire, l'Église est entrée dans une période d'apaisement. Il est trop tôt pour dire si cela correspond aussi à une perte de vitalité.

Jésuites : vers la soumission

Dans une grande villa d'une colline de Frascati, près de Rome, les 86 supérieurs provinciaux de la Compagnie de Jésus, venus du monde entier et réunis du 23 février au 3 mars 1982, ont dit « oui » à Jean-Paul II. Venant des jésuites — des religieux qui ont prêté un vœu particulier d'obéissance au pape —, un tel acte ne devrait rien avoir de remarquable. En réalité, il mettait un terme — peut-être provisoire — à une période de tension assez vive entre la Compagnie et Jean-Paul II. Une partie des 27 000 jésuites du monde (ils étaient 36 000 en 1965) ont en effet, depuis plusieurs années, pris des engagements qui ont déplu au Vatican. En Amérique du Nord, certains se sont écartés de la doctrine pontificale en matière de contraception ; en Amérique latine, d'autres sont allés très loin dans leurs engagements sociaux et politiques ; en Europe, c'est dans le domaine théologique que d'aucuns ont pris leurs distances avec Rome. Leur supérieur général, élu depuis 1965, le père Pedro Arrupe, qui souhaitait l'évolution de la Compagnie, s'efforçait d'en limiter les excès. Il est frappé en août 1981 de thrombose cérébrale et d'hémiplégie et désigne aussitôt pour le suppléer, en attendant l'élection de son successeur, un Américain libéral, Vincent O'Keefe. Mais Jean-Paul II nomme, en octobre, à la tête de la Compagnie, un « délégué personnel », le père Paolo Dezza, 80 ans, ancien confesseur de Pie XII et de Paul VI, pour permettre « une plus profonde préparation de la Congrégation générale » chargée d'élire le nouveau pape noir, ainsi qu'on appelle le supérieur général des jésuites. Cette action de Jean-Paul II, sans précédent, est considérée par une partie des jésuites comme un coup de force. Aucun doute : Jean-Paul II, qui n'a jamais caché son désaccord avec certains de leurs engagements, veut les reprendre en main. Au terme de la réunion des provinciaux, le 3 mars 1982, à Frascati, il semble y avoir réussi, avec l'aide du père Arrupe. On admet alors, au Vatican, que certaines accusations lancées contre les jésuites étaient peu fondées. De leur côté, les provinciaux acceptent de se soumettre aux impulsions pontificales. Mais il faudra attendre, pour y voir tout à fait clair, l'élection du nouveau supérieur général, prévue pour les premiers mois de 1983.

France

Pour l'Église de France, l'événement de 1980 avait été le voyage de Jean-Paul Il à Paris et Lisieux, celui de 1981 est le Congrès eucharistique de Lourdes. Il rassemble, du 17 au 23 juillet, près de 30 000 personnes (dont 1 500 prêtres et environ 300 évêques ou archevêques). On se réjouit officiellement de la ferveur et de la qualité des participants (parmi lesquels plus de 7 000 jeunes).

Mais une polémique se développe à propos de leur nombre. Il était prévu en effet que le pape Jean-Paul II en personne assisterait à ce congrès ; son état de santé l'en a empêché et, de ce fait, certains groupes de pèlerins se sont décommandés. Si bien que surgissent les questions : Ces pèlerins-là cédaient-ils au star-system ? N'avaient-ils prévu de venir à Lourdes que pour acclamer une vedette mondiale ? Qu'eût été, dès lors, la qualité de leur participation ?