En réalité, les variations affectent non l'individu mais les gènes des cellules germinales, et leur transmission est aléatoire À l'apport de la génétique se sont ajoutés ceux de la systématique (science de l'identification des espèces dans la nature) et de la paléontologie (recherche des traces de l'évolution dans le passé). De leur rencontre est né, entre les années 1930 et 1950, le néodarwinisme contemporain, ou théorie synthétique de l'évolution, qui envisage non l'individu isolé, mais les populations, et fait largement appel aux méthodes statistiques et au calcul des probabilités.

Questions ouvertes

La plus récente période voit apparaître, à l'intérieur même des trois disciplines ralliées à la théorie synthétique, des obscurités et des contradictions.

Avec le schéma néodarwinien, les individus porteurs, sur chacun des deux chromosomes d'une paire, du meilleur gène contrôlant un caractère déterminé (on les dit homozygotes) devraient progressivement éliminer ceux qui ne possèdent qu'un exemplaire de ce gène (hétérozygotes). Or, dans les populations naturelles, c'est une réalité fort différente — un extraordinaire polymorphisme génétique — que révèlent les analyses fines de la biologie moléculaire.

Autre problème : les mécanismes de la spéciation, c'est-à-dire de la différenciation d'une espèce nouvelle. Pour Darwin, elle se produisait à l'intérieur de l'aire de dispersion de l'espèce originelle. Certains estiment aujourd'hui qu'elle ne peut résulter que de la séparation accidentelle et définitive d'un petit groupe perdant tout contact avec la population mère.

Hasard

Dans toutes ces perspectives, la sélection naturelle cesse d'être le moteur principal de l'évolution : le premier rôle reviendrait au hasard. Enfin, de nombreux biologistes estiment nécessaire de séparer les problèmes de la micro-évolution (variations à l'intérieur d'une espèce, ou à la rigueur passage d'une espèce à l'autre) de ceux de la macro-évolution (passage à des niveaux plus élevés de classification : famille, ordre, classe). Ce point de vue a été fortement exprimé lors du colloque organisé par le CNRS à Dijon (10-14 mai 1982).

La vie extraterrestre, nouvelles théories

Tandis qu'aux États-Unis les coupes sombres imposées aux budgets scientifiques non militaires mettent fin au programme SETI (Recherche d'intelligences extraterrestres), divers travaux théoriques et même expérimentaux apportent des données nouvelles au problème de l'existence d'organismes vivants sur d'autres planètes.

Pour sir Francis Crick, prix Nobel de médecine et physiologie (1962) et l'un des découvreurs de la structure en double hélice de l'ADN du noyau chromosomique, de même que pour l'astrophysicien Fred Hoyle, le modèle couramment admis de l'apparition de la vie dans les conditions de l'atmosphère terrestre primitive soulève de nombreuses difficultés non encore résolues.

Ainsi, trois ou quatre milliards d'années leur semblent un temps trop court pour que les acides nucléiques et surtout les multiples protéines aient diversifié leurs structures telles que nous les connaissons. Ils réactivent donc, l'un et l'autre, l'hypothèse de la panspermie, avancée au siècle dernier par Svante Arrhenius : les germes de vie voyageraient d'une planète à l'autre à travers les espaces intersidéraux.

La théorie de la panspermie n'avait pas résisté à la découverte du rayonnement ultraviolet de l'espace interplanétaire, auquel aucun organisme vivant, pensait-on, ne pourrait survivre. Mais Crick, se fondant sur les données récentes de l'astronomie, souligne qu'il existe très probablement dans la Galaxie des millions de planètes beaucoup plus âgées que la nôtre. La vie a pu y évoluer bien plus longtemps que sur la Terre, et des espèces intelligentes y atteindre un niveau technologique très avancé. Plutôt que d'entreprendre d'interminables voyages vers d'autres planètes habitables, elles ont pu avoir l'idée de leur envoyer des vaisseaux spatiaux chargés de microorganismes. Arrivées sur la Terre et sur d'autres planètes, ces cellules y auraient amorcé de nouveaux cycles d'évolution biologique.

Comète

Crick lance son idée comme une hypothèse à étudier. Fred Hoyle est beaucoup plus affirmatif avec sa théorie de l'espace vivant, qu'il fonde sur certaines acquisitions récentes. Depuis quelques années les nouveaux moyens d'observation (radioastronomie, astronomie infrarouge) ne cessent de déceler, dans l'espace interplanétaire, des molécules de la chimie organique : formaldéhyde, cyanures, alcools et bien d'autres, qui ont été les matériaux sur la Terre de l'évolution chimique prébiotique, c'est-à-dire précédant celle des organismes vivants. Selon Hoyle, l'évolution prébiotique et les premières étapes de l'évolution biochimique elle-même trouvent des conditions favorables dans certaines régions de l'espace interstellaire.