Le refus des États-Unis de signer le projet de convention est assez dans la logique de l'administration Reagan : la composition du Conseil, l'organe exécutif de l'Autorité, ne plaisait pas du tout aux Américains, pas plus que le transfert obligatoire de technologies au profit des pays en voie de développement.

L'abstention de l'URSS et du bloc socialiste était prévisible depuis plusieurs jours. Il était de plus en plus évident que les Soviétiques ne voulaient à aucun prix d'une convention régissant l'ensemble des problèmes liés à la mer, notamment pas d'une Autorité internationale « régnant » sur une grande partie des mers. Mais le prétexte invoqué est ridicule : l'URSS qui, soulignons-le, n'a pas du tout, ou presque pas, travaillé sur les nodules polymétalliques et qui est terriblement en retard pour tout ce qui touche aux technologies offshore, a prétendu que le statut de pionnier prévu dans les textes était discriminatoire à son égard.

Pionnier

Le statut de pionnier doit être accordé aux quatre consortiums internationaux (dont les chefs de file sont des sociétés américaines), à la France, au Japon, à l'Inde et à l'URSS et à des pays en voie de développement. Il permet d'attribuer par priorité, dès 1983, à ces pionniers des sites d'exploration puis d'exploitation et de leur accorder des garanties raisonnables de ne pas avoir déjà dépensé pour rien des sommes considérables dans la recherche et la technologie des nodules.

Pour chaque consortium, il suffit d'être patronné par un seul État qui aura adhéré à la convention et dont une société participe à ce consortium, même si la société est privée et si sa participation financière est très minime. Ce qui permet aux quatre consortiums d'avoir le statut de pionniers sans que les États-Unis signent la convention. Et c'est cette disposition qui a semblé discriminatoire à l'URSS.

Détail cocasse : le Venezuela a voté contre le projet de convention. Or, en principe, la session de signature devrait avoir lieu en décembre prochain à Caracas, comme les textes le précisent...

130 pays ont voté pour le projet. Combien signeront la convention, à Caracas ou ailleurs ? Et combien ratifieront celle-ci ? Nul ne peut le dire et nul ne peut dire non plus quand la convention entrera en vigueur. Cependant, cette conférence marathon, avant même d'avoir produit de texte officiel, a bouleversé le droit maritime traditionnel en remplaçant celui-ci par un droit coutumier, qui a déjà servi de base juridique pour de nombreuses législations nationales. Un seul exemple : l'appropriation exclusive, par les États côtiers, des ressources vivantes et minérales situées dans les eaux, sur le sol et dans le sous-sol de la zone de 200 milles nautiques (370,4 km) mesurée à partir de la côte.

Matière

Chimie

Les promesses des cryptates

La chimie classique fabrique des molécules en combinant des atomes ou des groupements d'atomes pris dans des molécules déjà existantes. Depuis quelques années, on voit se développer un nouveau type de chimie, dite « supramoléculaire », qui associe non des atomes, mais des molécules en un complexe dans lequel interviennent des interactions en partie autres que celles de la chimie moléculaire. Parmi les supermolécules ainsi formées, les cryptates soulèvent un intérêt particulier en raison de leurs propriétés surprenantes, qui commencent à être exploitées.

De même racine que crypte, le mot cryptate évoque le creux, l'enfermement. Et, en effet, il sert à désigner un complexe formé de deux parties :
– une molécule creuse structurée en forme de cage, le récepteur ou cryptant ;
– au-dedans, un prisonnier, le substrat, qui peut être un corps simple ou une molécule composite.

La stabilité d'un tel système dépend, en premier lieu, de l'exact emboîtage de la cavité et de son contenu, en second lieu des interactions qui peuvent jouer entre les sites chimiquement actifs du substrat et de la face interne du cryptant. Il en découle que ce dernier est hautement sélectif : il ne reçoit et ne garde que le substrat dont la géométrie et les sites de liaison sont effectivement complémentaires des siens.