Le septième congrès du parti démocratique de Côte-d'Ivoire (PDCI) — qu'avaient précédé de longs débats entre militants et des élections entraînant le remplacement de 165 secrétaires généraux — décide en octobre 1980 la mise à l'écart de certains des éléments responsables les plus anciens et les moins compétents. Le nombre des membres du bureau politique est ramené de 70 à 32, celui des membres du comité directeur de 201 à 100. Le poste de secrétaire national est supprimé, et la disgrâce de celui qui l'occupait, Philippe Yacé, ancien président de l'Assemblée nationale, est consommée. Un comité exécutif de 9 membres est nommé, avec mission d'aider le chef de l'État dans sa tâche.

Il est clair que, contrairement aux présidents Bourguiba ou Senghor, Houphouët-Boigny renonce à choisir parmi les candidats potentiels à sa succession. Henri Konan Bedié, qui occupa durant onze ans, de 1966 à 1977, le poste important de ministre de l'Économie et des Finances, se détache pourtant nettement des autres candidats. Brillant économiste, diplomate écouté et très connu dans les enceintes internationales, Konan Bedié est élu en décembre 1980 président de l'Assemblée nationale par 134 voix sur 146 votants.

Scrutins

Au cours de cette période, les scrutins se succèdent : élection présidentielle le 12 octobre 1980, élections législatives les 9 et 23 novembre, municipales le 30 novembre. Seul candidat, Houphouët-Boigny est réélu, avec 99,99 % des suffrages exprimés, pour un cinquième mandat. Au premier tour des élections législatives, on enregistre 70 % d'abstentions. Après le deuxième tour, les quatre cinquièmes de l'Assemblée sont composés de nouveaux venus, et 27 sortants seulement réussissent à se faire réélire.

La Constitution est modifiée le 25 novembre 1980 et un poste de vice-président de la République est créé. Comme les législatives, les municipales ont pour conséquence un important renouvellement des élus. Enfin, le gouvernement est remanié en février 1981. Tandis que 8 personnes quittent le cabinet, 15 y font leur entrée, dont Jean Konnan Banny qui, accusé de complot en 1963, vient d'effectuer une traversée du désert de dix-huit ans. La mort accidentelle, le 29 janvier 1981, de Jean-Baptiste Mockey, ministre de la Santé publique et compagnon d'armes du chef de l'État, contribue encore à modifier la physionomie de l'échiquier politique.

Violences

Pays longtemps réputé calme, la Côte-d'Ivoire fait l'apprentissage de la violence. À Adjamé, faubourg populeux d'Abidjan, une élection contestée à la sous-section du PDCI entraîne en juillet 1980, un violent affrontement entre contestataires et policiers, qui fait une vingtaine de blessés. À l'occasion des cérémonies du 20e anniversaire de l'indépendance, un engin explosif est lancé, le 7 décembre 1980, sur le cortège présidentiel à Marcory, banlieue résidentielle de la capitale. Ce geste est officiellement attribué à un « déséquilibré ».

Dans la nuit du 6 au 7 mars 1981, 46 détenus, entassés dans une cellule prévue pour 5 prisonniers du commissariat d'Agban, cité du Grand Abidjan, meurent asphyxiés. La majorité des victimes de cette sanglante bavure policière sont des Ghanéens raflés au cours de contrôles d'identité provoqués par la recrudescence du banditisme dans la capitale. Les autorités d'Accra protestent. Les deux pays rappellent temporairement leurs diplomates.

Après une rencontre entre les présidents Houphouët-Boigny et Limann, les rapports ivoiro-ghanéens sont normalisés. Un sentiment de crainte n'en continue pas moins de prévaloir parmi les nombreux travailleurs immigrés installés en Côte-d'Ivoire (1 travailleur sur 4 est un étranger), et une vive amertume persiste au sein de la colonie ghanéenne, dont de nombreux éléments regagnent leur pays.

Pétrole

Les premiers barils de pétrole ivoirien sont extraits, en septembre 1980, du gisement Bélier, situé en mer, à 70 km à l'est d'Abidjan. Prudentes, les compagnies pétrolières estiment qu'en 1981 la production ivoirienne pourrait être de l'ordre de 1 million et demi de t de brut. Si discrète soit-elle, l'entrée du pays dans le club des producteurs africains de pétrole est d'autant plus favorablement accueillie que le miracle économique marque le pas, si l'on en croit les experts.