Journal de l'année Édition 1981 1981Éd. 1981

Conjoncture

Une nouvelle donne

L'année 1980-1981 a été profondément marquée par les conséquences du deuxième choc pétrolier et la politique de lutte contre l'inflation : hausse des prix, ralentissement économique et augmentation du chômage entrent pour une bonne part dans le changement politique intervenu en mai sur le thème de la relance et de l'emploi.

La contrainte extérieure, qui s'est traduite par un alourdissement de notre facture énergétique de 63 milliards de F, représentant 4,5 % de notre production nationale, a eu pour résultat le gonflement de notre déficit commercial à 60 milliards de F contre 13,5 en 1979 et un excédent de 2 milliards en 1978.

Malgré l'amélioration constante de la balance des services et le redressement du commerce extérieur au second trimestre de 1981, cette situation a conduit le gouvernement de Raymond Barre à renforcer le dispositif de lutte contre la hausse des prix sur trois fronts : la politique budgétaire, la politique monétaire et la politique salariale.
– Politique budgétaire. En 1980, le déficit a été maintenu dans les limites prévues de 30 milliards de F (moins de 1 % du PIB) et entièrement financé par l'emprunt. Le dynamisme retrouvé du marché financier et le maintien rigoureux de la hiérarchie des taux d'intérêt en fonction de leur durée et du niveau de hausse des prix ont permis de trouver sans problème les fonds dont on avait besoin à des niveaux compris entre 12,50 et 13,80 % pour le dernier emprunt. Cette politique et le ralentissement économique qui en est résulté ont permis aux pouvoirs publics de maintenir dans les limites qu'ils s'étaient données la croissance monétaire.
– Politique monétaire. La progression de la masse monétaire en 1980 est restée inférieure à 11 %, donc à l'objectif que s'étaient fixé les pouvoirs publics, et s'est encore réduite au début de 1980. Parallèlement à la régression des besoins du Trésor, les pouvoirs publics ont mis en œuvre une politique d'encadrement du crédit, limitant considérablement les possibilités des banques Celles-ci ont ainsi adapté leur politique de distribution aux exigences du gouvernement, favorisant les entreprises au détriment des particuliers, déjà pénalisés par des taux d'intérêt qui sont passés de 20 à 28 % pour les crédits de consommation et de 13 à 18 ou 19 % pour les prêts immobiliers ordinaires. Le ralentissement de la production et des investissements, et les entrées de capitaux qui se sont produites durant l'année 1980, et jusqu'en février 1981, ont, par ailleurs, permis de satisfaire sans trop de problèmes les besoins de financement des industriels.
– Politique salariale. Avec la contrainte du crédit exercée sur le patronat et ses exhortations à la modération des salaires, le gouvernement Raymond Barre a pu contenir en 1980 la progression du taux de salaire horaire dans la limite de 15,2 %. C'est plus qu'en 1979 (12,9 %) en raison de l'acquis relativement élevé de la fin 1979 et de l'incidence de l'accélération des prix à la consommation au premier semestre, mais cela traduit néanmoins un ralentissement de la croissance du pouvoir d'achat, qu'on le mesure en moyenne annuelle ou en progression en cours d'année. Cette tendance s'est poursuivie au cours du premier semestre, en dépit de la politique sociale qui a précédé l'élection présidentielle.

Décélération

La politique mise en œuvre en 1976 par le Premier ministre et appliquée dans toute sa rigueur après les élections législatives de 1978 s'est, en effet, développée à la faveur du deuxième choc pétrolier. Contrairement à ce qui avait été fait en 1974, fidèle à sa politique de relance par l'investissement, le Premier ministre a favorisé au mieux les entreprises, faisant porter le poids de l'impôt pétrolier, pour l'essentiel, sur les particuliers.

Ainsi, pour la première fois, le niveau de vie des Français a stagné en 1980 et le revenu net des ouvriers et cadres, augmenté des prestations sociales et diminué des impôts indirects, s'est effrité de 1 à 3 % selon les catégories socioprofessionnelles.