En fait, la division de la gauche, qui constituait un handicap pour les législatives, devient un avantage pour François Mitterrand au moment de l'échéance présidentielle. Il s'ajoute un pessimisme sans précédent des Français, créé par les affaires (assassinat de Jean de Broglie, suicide de Robert Boulin, polémique sur les diamants de Bokassa et protocole taxé cette fois de pseudo-monarchique).

Un nouveau thème rencontre un écho dans l'opinion : le manque de fermeté supposé du chef de l'État en politique étrangère, sa complaisance à l'égard de l'Union soviétique à propos de l'Afghanistan, de la Pologne ou du célèbre voyage à Varsovie. Même la politique arabe du gouvernement lui est reprochée.

Le chef de l'État a beau — au fil des années — avoir largement repris en compte l'héritage gaullien, être devenu à la fois un pivot du pacte atlantique et un interlocuteur privilégié des Soviétiques, tout se retourne contre lui.

À gauche, la polémique ne cesse jusqu'au premier tour de l'élection présidentielle du 26 avril 1981. Mais chaque attaque de Georges Marchais conforte l'image d'indépendance de François Mitterrand qui, après avoir laissé Michel Rocard faire figure de candidat à la candidature et évité ainsi de s'user, lui a ravi la place dès qu'il l'a voulue.

Dans la majorité, la cacophonie et la controverse atteignent leur point culminant dès décembre 1978 avec le fameux appel de Cochin, dans lequel Jacques Chirac stigmatise le « parti de l'étranger » qui « prépare l'inféodation de la France... consent à l'idée de son abaissement ». Cela ne lui porte pas chance pour les élections européennes de juin 1979. Son parti n'obtient que 16 % des voix contre 27 % à la liste giscardienne menée par Simone Veil.

Présidentielle de 81

Mais la guérilla entre le RPR et le gouvernement, les procès contre le chef de l'État minent peu à peu l'image de Valéry Giscard d'Estaing et le discréditent chez des électeurs chiraquiens. C'est le contingent de voix qui lui fait irrémédiablement défaut au second tour de l'élection présidentielle du 10 mai, face à François Mitterrand, et assure le succès du leader socialiste.

Georges Marchais — qui a mené une campagne bruyante mais sans espoir — et Jacques Chirac — malgré son grand talent électoral — ont été largement distancés au premier tour avec, respectivement, 15,3 % et 18 % des voix contre 25,8 % à François Mitterrand, et 28,3 % à Valéry Giscard d'Estaing.

Si 9 électeurs communistes sur 10 se reportent sur le leader socialiste au second tour, 7 électeurs chiraquiens sur 10 seulement renforcent le camp giscardien. Les rivalités de personnes, qui sont le fond de la discorde majoritaire, ont pesé plus lourd que les divergences idéologiques et politiques qui séparent les deux familles de la gauche.

Ainsi Valéry Giscard d'Estaing est-il battu. Ainsi s'achève ce septennat, inauguré sous le signe du changement et de la modernisation, clos sous celui du pessimisme et des querelles. Les historiens diront si le verdict des urnes a été équitable ; il y avait un décalage entre les intentions de Valéry Giscard d'Estaing et de Raymond Barre et la perception qu'en avaient les Français.

Peut-être deux mandats de sept ans sont-ils insupportables aux yeux des électeurs. Peut-être la communication entre l'Élysée et la France est-elle impossible par temps de crise. Peut-être l'enlisement des réformes engagées a-t-il détérioré plus qu'on ne le croit l'image du président.

Reste qu'en 1974 le pompidolisme semblait une transition entre le gaullisme et le libéralisme, et qu'en 1981 c'est le giscardisme qui fait figure de parenthèse entre le gaullisme et le socialisme.

Les dix candidatures retenues

Plus d'une cinquantaine de candidatures — sans compter une quinzaine de candidats fantaisistes — ont été dénombrées début avril, quelques jours avant l'ouverture de la campagne officielle. Dix candidats, ayant obtenu les fameuses 500 signatures requises, ont été retenus par le Conseil constitutionnel. Le jeudi 9 avril, la liste officielle était rendue publique. On la trouvera ci-dessous :