Partisan de la manière forte, le Premier ministre Jonathan avait déjà fait annuler les élections législatives de 1970, dès que les premiers résultats du scrutin avaient indiqué une victoire de l'opposition. Cette fois, il multiplie les menaces contre les dirigeants de Pretoria accusés d'avoir partie liée avec les opposants sotho pour susciter des difficultés au gouvernement.

En réalité, c'est à dessein que les dirigeants de Maseru entretiennent la confusion dans les esprits. Faisant mine d'ignorer que le Parti du congrès est farouchement hostile à toute forme de ségrégation raciale, que certains de ses militants sont entraînés en Tanzanie, qu'en 1974 c'est précisément avec l'aide militaire des Sud-Africains qu'ils matèrent une tentative d'insurrection des militants du Parti du congrès, ils font désormais tout pour discréditer ces derniers.

Il est vrai que, de part et d'autre, on s'engage dans l'escalade de la violence. Tandis que les opposants multiplient les attaques contre les postes de police, les installations électriques, les bâtiments officiels, la police brûle en représailles des cases et tue certains de leurs occupants. Au début de l'année, on parle de plusieurs dizaines d'opposants tués et de plusieurs centaines d'autres réfugiés dans l'État libre d'Orange, en Afrique du Sud. Les corps mutilés de 8 opposants sont exposés, le 4 juin, à Maseru.

Libéria

Monrovia. 1 800 000. 17. *2,9 %.
Économie. PIB (77) : 389. Productions (76) : A 23 + I 29 + S 48. Énerg. (76) : 418. CE (77) : 64 %.
Transports. (74) : 12 100 + 10 000.  : 80 191 000 tjb.
Information. (75) : 3 quotidiens ; tirage global : 13 000. (76) : *265 000. (76) : *8 900. (71) : 14 900 fauteuils ; fréquentation : 1 M. (74) : 7 000.
Santé. (74) : 142. Mté inf. (71) : 159,2.
Éducation. (75). Prim. : 157 821. Sec. et techn. : 34 151. Sup. : 2 404.
Armée.  : 5 250.
Institutions. République présidentielle, indépendante depuis le 26 juillet 1847. Constitution de 1847. Une junte militaire dirigée par le sergent-chef Samuel K. Doe est mise en place après le coup d'État du 12 avril 1980 qui renverse le président William Richard Tolbert, assassiné.

L'irrésistible ascension des « aborigènes »

L'irruption brutale, dans la nuit du 11 au 12 avril 1980, sur le premier plan de la scène politique du sergent-chef Samuel K. Doe, jusqu'alors totalement inconnu, illustre de façon spectaculaire la revanche des aborigènes sur la minorité afro-américaine. Ceux qu'à Monrovia on appelait avec mépris depuis plus d'un siècle et demi les natives et que les anciens esclaves venus des États-Unis avaient progressivement rejetés dans l'intérieur du pays, après leur avoir confisqué pouvoir et richesse, redressent enfin la tête.

Assassinat

Après avoir froidement assassiné le dix-neuvième président libérien, le pasteur William Tolbert, une poignée de mutins règlent ses comptes de façon tout à fait arbitraire. Comme au Ghana le commandant Rawlings, comme en Ethiopie, les officiers libériens sortis du rang convoquent des cours martiales et dressent des poteaux d'exécution. Ministres et généraux tombent sous les salves, tandis qu'une foule avide de vengeance applaudit devant les corps des suppliciés.

Pour la première fois de son histoire, la plus ancienne république noire d'Afrique a pour magistrat suprême un autochtone, né dans cet hinterland qui constituait jusqu'alors une réserve de main-d'œuvre bon marché pour les gentlemen de Monrovia. L'irrésistible ascension des tribus africaines commence, tandis que sonne le glas de ceux qui, paradoxalement, se dénommaient eux-mêmes hommes libres (freemen), eux qui avaient connu le joug de la servitude aux Amériques.

Revanche

L'éviction de Tolbert est aussi une revanche de l'armée sur les civils. Tenus en suspicion, maintenus systématiquement à l'écart de la vie publique, cantonnés dans un strict rôle de gardes prétoriens, stipendiés par les présidents successifs, les militaires n'étaient pas considérés comme des citoyens à part entière. Le pouvoir entretenait à dessein entre militaires proprement dits, gardes nationaux, miliciens, membres de la garde présidentielle, marins et aviateurs une concurrence destinée à renforcer sa puissance.