Journal de l'année Édition 1980 1980Éd. 1980

Les étudiants auront 15 % des sièges. Cela correspond à la place qu'ils tenaient dans les conseils depuis l'application de la règle du quorum : le nombre de sièges qui leur était accordé était réduit lorsque moins de la moitié d'entre eux votaient, ce qui arrivait fréquemment. Ce quorum sera ramené à 25 %. C'est surtout le nombre des personnalités extérieures qui est réduit : désormais, elles occuperont seulement 10 % des sièges. Ces dispositions seront appliquées pour le renouvellement des conseils à la rentrée 1980. On se rapproche ainsi de la situation d'avant 1968, quand la direction des facultés était entre les mains des professeurs.

Circulaire Bonnet

Dans les universités, la contestation étudiante semblait avoir disparu depuis les grèves du printemps 1976 contre la réforme du deuxième cycle universitaire (Journal de l'année 1975-76). La défense des étudiants étrangers provoque, sur plusieurs campus, des manifestations, des occupations de locaux, des grèves de cours et le report des examens. Les étudiants étrangers représentent environ en 1978-1979 un huitième des effectifs universitaires, et leur nombre a doublé en six ans. Ils sont particulièrement nombreux à Paris, à Grenoble, à Lyon et dans le Midi.

Dans l'ouest de la France d'abord, les étudiants se mobilisent pour protester contre une circulaire du ministre de l'Intérieur datée du 12 décembre 1977, qui entendait « aboutir à une diminution du nombre d'étudiants étrangers s'inscrivant en premier cycle d'enseignement supérieur ». Cette circulaire, signée par Christian Bonnet, soumet l'obtention d'une carte de séjour comme étudiant à 3 conditions :
– attestation d'une « préinscription » dans une université ;
– attestation bancaire de ressources égales à 13 500 F par an (le montant d'une bourse accordée par le gouvernement français) ;
– consultation du « fichier d'opposition ».

Le séjour peut être refusé aux étudiants qui après trois années d'études, n'ont pas obtenu le DEUG ou qui désirent changer d'orientation.

C'est à Angers, au mois de janvier 1980, qu'ont lieu les premières manifestations : le préfet du Maine-et-Loire refuse de renouveler le titre de séjour de deux étudiants marocains. Le mouvement fait référence à la justice et aux droits de l'homme ; il se développera tout seul, en marge des organisations traditionnelles étudiantes et sans aide des syndicats d'enseignants. Après deux semaines de grève — votée à bulletin secret — et de nombreuses manifestations, parfois réprimées par la police, les étudiants angevins obtiennent satisfaction, le préfet acceptant d'accorder des cartes de séjour aux jeunes Marocains.

Boycottage

Quelques semaines plus tard, les étudiants de Nantes boycottent les cours et descendent dans la rue en criant : « étrangers expulsés, libertés bafouées » et « À bas le racisme qui tue et divise ». Au mois de mars, de nouvelles manifestations ont lieu à Paris, Grenoble, Rouen, Marseille et Lille pour s'opposer aux décrets parus au début du mois de janvier 1980, qui détaillent les mesures de préinscription pour les étudiants étrangers. Ces décrets contraignent les étrangers qui souhaitent changer d'orientation en cours de cycle à solliciter une nouvelle préinscription. Ils instaurent des examens de connaissance de la langue française pour les étudiants venant de pays non francophones (50 % des étudiants étrangers).

« Véritable sélection à l'entrée de l'université » selon les syndicats d'enseignants, ces examens suscitent de nouvelles manifestations. Ils sont perturbés dans de nombreuses villes universitaires. Les étudiants de Grenoble obtiennent ainsi, au mois d'avril, le report de cette épreuve, à laquelle étaient convoqués 218 de leurs camarades étrangers. À Grenoble, comme à Paris, les étudiants critiquent aussi la trop grande centralisation instituée par les décrets de janvier. Ceux-ci ont en effet créé une commission nationale pour l'inscription des étudiants étrangers, présidée par Jean Imbert, président du Centre national des œuvres universitaires et scolaires : cette commission est chargée d'étudier les dossiers de candidature et de les répartir entre les établissements d'enseignement supérieur.

Durcissement

Cette agitation sans prendre dans beaucoup d'universités, et sans même mobiliser tous les étudiants dans les établissements touchés, ne cesse pas après les vacances de Pâques.