Dans ce pays où l'économie s'occidentalise, où les citoyens ont la possibilité de circuler comme ils veulent à l'extérieur (plus d'un million de vacanciers ont séjourné en Occident en 1979) comme de regarder chaque jour les programmes de la télévision autrichienne, le libéralisme ne va tout de même pas jusqu'à tolérer la contestation.

On en a pour preuve la suite donnée à la campagne de pétitions lancée fin octobre 1979 pour demander aux plus hautes autorités du pays d'intervenir pour obtenir la libération des six membres de la Charte 77 condamnés à Prague. Après plusieurs semaines d'expectative, les autorités réagissent. Les pétitionnaires (environ 250, dont quelques membres du parti) sont soumis à des pressions, du type menace de licenciement de la part de leur employeur, s'ils ne renient pas leur signature.

Irlande

Dublin. 3 240 000. 46. 1,1 %
Économie. PIB (77) : 2 943. Productions (74) : A 14 + I 30 + S 56. Énerg. (76) : 3 170. CE (77) : 48 %.
Transports. (*77) : 873 M pass./km, 596 Mt/km. (*77) : 577 600 + 58 300.  : 212 000 tjb. (77) : 1 521 M pass./km.
Information. (75) : 7 quotidiens ; tirage global : 693 000. (76) : 949 000. (76) : 655 000. (77) : 519 000.
Santé. (76) : 3 805. Mté inf. (77) : 15,7.
Éducation. (76). Prim. : 406 432. Sec. et techn. (77) : *290 000. Sup. : 34 615.
Armée.  : 13 876.
Institutions. État indépendant depuis 1921. Constitution de 1937 amendée le 7 décembre 1972. République proclamée le 18 avril 1949. Président de la République : Patrick Hillery ; succède le 9 novembre 1976 à Cearbhall O Dalaigh, démissionnaire. Premier ministre : Charles Haughey.

Un nouveau Premier ministre dynamique

Sanctionné par les électeurs au cours de trois élections (municipales et européennes en juin 1979 et partielles à Cork en novembre), le Premier ministre Jack Lynch, leader du parti du Fianna Fail depuis treize ans, remet sa démission le 5 décembre.

Cinq candidats

Deux explications à ce geste : les critiques de plus en plus vives contre sa politique économique ; les polémiques suscitées par ses prises de position personnelles — très en retrait sur la ligne officielle du parti — sur l'avenir de l'Irlande du Nord. À la suite de l'assassinat de lord Mountbatten en août, le Premier ministre a, en outre, fait des concessions à Londres, acceptant d'harmoniser avec la Grande-Bretagne la lutte contre le terrorisme de l'IRA.

Cinq candidats sont sur les rangs pour succéder à Jack Lynch à la tête du gouvernement et du parti : George Colley, vice-Premier ministre et ministre des Finances ; Michael O'Kennedy, ministre des Affaires étrangères ; Desmond O'Malley, ministre du Commerce ; Brian Lenihan, ministre des Pêcheries, et Charles Haughey, ministre de la Santé. C'est ce dernier que, contre toute attente, le groupe parlementaire désigne par 44 voix contre 38, le 7 décembre.

Self made man

Ce nouveau Premier ministre apparaît comme l'antithèse de son prédécesseur. Énergique, ambitieux, c'est un self made man. Il est riche et ne s'en cache pas. Venu d'une famille paysanne, il a édifié une fortune, que l'on dit considérable, avant d'entrer dans l'arène politique. Son mariage avec la fille de l'ancien Premier ministre Sean Lemass a favorisé son ascension, interrompue en 1970 par un scandale : il est accusé d'avoir importé des armes en Irlande pour l'IRA, alors qu'il était ministre des Finances, et doit démissionner. L'affaire va en Haute Cour.

Acquitté, Charles Haughey retrouve sa place dans le Fianna Fail, puis dans le gouvernement, non sans susciter des remous. Son nationalisme, sa conviction que la seule solution au conflit de l'Ulster se trouve dans la réunification des deux Irlandes, lui assurent pourtant une certaine popularité. Et ses qualités d'homme de combat et d'homme d'affaires font de lui un recours au moment où l'Irlande plonge à son tour dans la crise économique.

Un endettement public égal à 14 % du PNB (1 009 millions de livres en 1979), un déficit commercial représentant 8 % du PNB, un taux de croissance de moins de 3 %, une inflation de 16 % : la situation dont hérite le nouveau Premier ministre parait catastrophique. D'autant que l'agitation en faveur d'une réforme fiscale reprend de plus belle : le 22 janvier 1980, 700 000 manifestants descendent dans la rue pour exiger une plus grande égalité devant l'impôt (les paysans ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu).