Les sirènes de Légitime défense, en dépit des déclarations de plusieurs ministres, parlent de nettoyer le pays de la pègre et d'empêcher par tous les moyens les malfaiteurs de nuire et trouvent des auditeurs attentifs. Alors on tire. Dix cambrioleurs ont payé de leur vie ; sept autres resteront estropiés pour avoir voulu s'emparer d'une poule dans une basse-cour isolée ou d'une perceuse dans une cave transformée en atelier de bricolage.

Drame

Parfois, l'autodéfense tourne au drame absurde. Plusieurs innocents sont tombés sous les balles de leurs proches qui les avaient pris pour des voleurs.

« J'ai vu une ombre. J'ai eu peur. J'ai tiré » racontera Jacques Colisset, un garagiste de Courtenay dans le Loiret. Son fusil restait près de lui toutes les nuits. Quand il a entendu des pas sur le palier de son pavillon, il n'a pas hésité. D'ailleurs, il aperçut par la porte entrebaillée de sa chambre une ombre furtive qui descendait l'escalier. Sans sommation, sûr de son droit, il a tiré. Quand il a allumé la lumière, il a découvert, sur les marches d'escalier, Stéphane, son fils âgé de 9 ans. Assoiffé, il descendait à la cuisine chercher un verre d'eau. À l'inverse de son père, il n'avait pas peur la nuit.

Nouvelles flambées de racisme

Racisme, xénophobie, des mots qui ne devraient plus avoir cours à l'heure où des hommes de bonne volonté tentent les uns de réconcilier entre eux les peuples du Moyen-Orient, les autres de construire l'Europe, tous dans une perspective de paix et de fraternité.

Et pourtant, il y a toujours des bavures...

Affaire Darquier

Elle éclate en septembre 1978, lorsque l'hebdomadaire l'Express publie une interview de l'ancien commissaire général aux questions juives sous le gouvernement Laval, Louis Darquier de Pellepoix. Responsable de la disparition de 75 000 Juifs français, il a été condamné à mort par contumace en 1947, et vit en Espagne.

Dans cette interview, Darquier conteste, avec un rare cynisme, non seulement le rôle qu'il joua pendant l'Occupation, mais le massacre de six millions de Juifs par les nazis. « Ce chiffre, écrit-il, est une invention pure et simple de la propagande juive. » Parlant d'Auschwitz, il ose affirmer : « On a gazé, oui, c'est vrai, mais on a gazé des poux... pour désinfecter les vêtements. »

Les photos montrant des amoncellements de cadavres ?... « Des photos truquées ». Et, plus loin, reprenant ses phrases d'autrefois, sans sourciller, il affirme : « Il fallait se débarrasser de ces métèques. »

L'interview de Darquier de Pellepoix soulève une grande émotion dans le public, émotion dont la presse se fait l'écho, indignation dans tous les milieux et volonté de lutter contre ce que Simone Veil appellera la « banalisation du racisme ». Diverses personnalités de toutes tendances politiques réclament l'extradition de Darquier. À la demande du ministre de la Justice, Alain Peyrefitte, une information judiciaire est ouverte le 3 novembre contre Louis Darquier de Pellepoix pour apologie de la discrimination raciale, diffamation et injures raciales. Il est toutefois prévisible que les chances de voir aboutir cette action en Espagne sont pratiquement nulles.

Leguay, Faurisson...

Me Serge Klarsfeld dépose, le 15 novembre 1978, une plainte avec constitution de partie civile, au tribunal de grande instance de Paris, contre Jean Leguay. Âgé de 77 ans, Jean Leguay était, lors de la trop fameuse rafle du Vél'd'hiv., en juillet 1942, délégué en zone occupée du secrétaire général de la police, René Bousquet. Me Klarsfeld, au nom des parents de victimes juives, accuse J. Leguay de crime contre l'humanité. Une information judiciaire est ouverte.

Mis en cause en même temps que Jean Leguay pour son action sous l'occupation, René Bousquet, qui fut de 1941 à 1943 secrétaire général du ministère de l'Intérieur chargé de la police, démissionne de son poste de censeur à la Banque d'Indochine et de Suez.

Pierre Sudreau, ancien ministre, député apparenté UDF, demande, le 18 novembre 1978, l'ouverture d'une enquête sur « les propos scandaleux » de Robert Faurisson, maître de conférence à l'université de Lyon-II, qui a toujours affirmé que « les chambres à gaz n'avaient jamais existé ».