L'année est marquée par des problèmes déontologiques, des questions en suspens et de nouvelles tendances qui s'affirment.

Problèmes déontologiques : convient-il de donner la parole à un criminel en rupture de ban ? La journaliste Isabelle Pelletier (ex-de Wangen) est poursuivie, ainsi que Daniel Filipacchi, pour la publication par Paris-Match d'une interview de Jacques Mesrine. Mais on peut s'interroger sur le bien-fondé de l'accusation : « apologie du crime de vol et du crime de meurtre ». Libération est également poursuivi. Ce qui déclenche une protestation de l'UNSJ : on ne « saurait accepter que police et justice fassent ainsi de la presse un bouc émissaire et tentent de faire payer aux journalistes et aux journaux les échecs enregistrés sur d'autres terrains ».

En recueillant une interview d'Amir Abbas Hoveyda et en la diffusant quelques heures avant son exécution sur FR3, Christine Okcrent déclenche les passions : dans quelles conditions cette interview a-t-elle été réalisée ? Devant la violence des attaques dont elle fait l'objet, la journaliste décide de porter plainte en diffamation.

La Commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à l'enfance et à l'adolescence propose une interdiction de vente aux mineurs et d'exposition au public pour le magazine Détective, en raison du lien direct qui est établi entre ses affichettes et ses pages de couverture. Le ministère de l'Intérieur suivant cet avis, le journal ne peut plus être distribué par les NMPP, et son taux de TVA passe de 4 à 33 %. Bien que la réprobation soit unanime sur l'aspect racoleur et bassement sexuel des affiches de Détective, on peut s'interroger sur la procédure adoptée — en l'absence de toute législation claire —, et plusieurs voix s'élèvent contre ce qui apparaît, en définitive, comme une atteinte à la liberté de la presse.

On voit bien l'ambiguïté qu'il y a à se servir du paravent de la protection morale des jeunes alors même qu'il s'agit de publications de toute évidence réservée aux adultes. C'est le cas avec Pilote, menacé de se voir retirer son numéro d'inscription à la commission paritaire parce que — raison officielle — les bandes dessinées constituent plus de la moitié de la surface du journal (11 septembre 1978). Le tollé soulevé par cet « assassinat par le fric » oblige à accorder un délai de six mois à la publication. Le 15 janvier, la commission paritaire des publications et agences de presse définit sa position sur les journaux de bandes dessinées, enfin considérées comme un moyen d'expression au même titre que le texte ou la photographie. Pour sortir du ghetto de la presse enfantine, les revues devront présenter, par l'ensemble de leur contenu, un lien suffisant avec l'actualité.

Monopole

Relaxées ici (Radio Fil Bleu), condamnées là (Radio 93, Radio-Rockett), mais de plus en plus présentes dans l'actualité (Lorraine Cœur d'acier), les radios locales ne sont toujours pas sur la même longueur d'onde que les pouvoirs publics. Elles parlent de liberté, alors que l'on s'enfonce dans la répression au nom du monopole. Mais peut-on confondre le monopole des télécommunications avec le monopole de la radiodiffusion ? Le parti socialiste introduit un recours au Conseil constitutionnel. Cette formation politique est favorable à la création de radios libres qui seraient propriétaires de leurs équipements, placées sous la responsabilité d'associations et financées en partie par la publicité. Une centaine de personnalités signent un manifeste en faveur des radios locales. Le député UDF d'Ille-et-Vilaine, Alain Madelin, dépose, le 2 novembre 1978, une proposition de loi accordant aux radios locales des « licences temporaires d'émission » en modulation de fréquence, d'une puissance maximale de 1 kW et d'une portée limitée à 25 km. Les associations régies par la loi de 1901 et les sociétés de presse pourraient bénéficier de ces licences d'émission.

Le ministre de l'Éducation nationale, Christian Beullac, rappelle, en novembre 1978 que « la presse est un moyen d'ouverture de l'école sur la réalité du monde moderne ». Il insiste sur « l'impartialité due aux élèves et le pluralisme ». Le ministre des Universités, Alice Saunier-Seïté, confirme ces propos au colloque organisé en mai 1979 par l'Association presse-enseignement (qui regroupe cinq quotidiens, l'Aurore, les Échos, le Figaro, France-Soir, le Nouveau Journal). « La presse doit trouver sa place à tous les niveaux du système éducatif » déclare-t-elle. L'ARPEJ organise une quinzaine Connaissance de la presse régionale et le CIPE annonce que le premier forum national de la presse à l'école aura lieu en septembre 1979.