Le 5 février, Prima Linea blesse aux jambes une surveillante de la prison de Turin, où s'est déroulé en 1978 le procès des Brigades rouges. Le commando est composé uniquement de femmes : c'est une variante supplémentaire de l'action terroriste. Le 9 mars, à Palerme, le secrétaire provincial de la démocratie chrétienne est abattu par Prima Linea. Prima Linea qui, le même jour, à Turin, tend une embuscade à la police : un étudiant qui rentrait chez lui est tué au cours de la fusillade.

Sans gouvernement, rongée par cette nouvelle vague de violence, l'Italie se dirige déjà vers des élections générales. Même si officiellement tous les partis y sont opposés.

Le 3 février, Giulio Andreotti est chargé par le chef de l'État de former un cabinet. Vingt jours plus tard, il renonce. Le président Pertini désigne alors Ugo La Malfa, responsable du petit parti républicain — 14 députés, 3,1 % des voix aux élections de 1976. Pour la première fois, ce n'est donc pas un chrétien mais un laïc qui se voit appelé à cette mission. Tâche finalement au-dessus de ses forces. U. La Malfa ne réussit pas là où Giulio Andreotti a échoué, aucune formule ne pouvant mettre d'accord la démocratie chrétienne et le parti communiste. Le 7 mars, Ugo La Malfa renonce à son tour. Et, à nouveau, Giulio Andreotti se rend au Quirinal. Les jeux sont faits. Le gouvernement qu'il met sur pied est condamné à la défaite. Le 31 mars 1979, lorsqu'il demande au Sénat l'investiture, communistes, socialistes, indépendants de gauche et extrême droite votent contre et rassemblent 150 voix contre 149. Sans enthousiasme, le président de la République annonce la dissolution du Parlement. Il le fait avec d'autant plus d'amertume que, le 25 mars, Ugo La Malfa est mort. « Il est parti au moment où j'avais le plus besoin de lui », déclare Sandro Pertini.

L'affaire Megri

Un an après l'assassinat d'Aldo Moro, la police italienne n'a pas encore réussi à démanteler le réseau qui a organisé l'enlèvement et décidé l'exécution du président de la démocratie chrétienne. Le 7 avril 1979, les enquêteurs, à l'initiative de la justice, lancent une vaste opération à l'université de Padoue. 22 militants d'extrême gauche sont arrêtés ; parmi eux, Toni Negri, professeur de sciences politiques. Le juge Pietro Calogero lui reproche une participation directe dans l'affaire Moro. En qualité de responsable de la direction stratégique des Brigades rouges, Toni Negri aurait lui-même téléphoné à l'épouse d'Aldo Moro quelques jours avant la mort de celui-ci. Toni Negri nie formellement les faits qu'on lui reproche. « Présentez votre dossier, réclament les avocats de Toni Negri au tribunal, vous ne vous fondez sur rien de sérieux. » Toni proteste, lui, en déclarant qu'en tant que théoricien de l'autonomie ouvrière il est opposé à l'idée d'insurrection défendue par les Brigades rouges. « Si je me suis rendu plusieurs fois en France, ajoute-t-il, c'est pour assurer mes cours à Jussieu notamment et non pas pour téléguider l'interrogatoire de Moro, d'une brasserie italienne, comme une partie de la presse italienne l'affirme. » Au fil des semaines, l'affaire Negri divise les Italiens. Coupable ou innocent. C'est toujours le point d'interrogation.

Élections législatives

Dans une indifférence quasi générale, l'Italie prépare cette troisième consultation nationale. La troisième en sept ans. Elle est fixée finalement au dimanche 3 juin et au lundi 4, une semaine donc avant les européennes.

La campagne électorale s'ouvre dans le sang, avec l'assaut, le 3 mai, du siège provincial de la démocratie chrétienne. À Rome, 2 policiers sont tués au cours de cette action spectaculaire, menée par un commando de 15 personnes, en plein centre-ville, à 9 heures et demie du matin. Événement sans lendemain. Cette campagne, contre toute attente, sera la plus tranquille que l'Italie ait connue.

Sans passion, le pays participe à ce scrutin dont l'enjeu est pourtant le compromis historique et la place des communistes dans l'opposition ou au gouvernement. La participation ne dépasse pas 89,6 %. Ce qui est très médiocre par rapport aux 93 % de 1976. Seconde déception : l'Italie ne départage pas nettement les concurrents au pouvoir. Le PCI perd un million et demi de voix et 27 députés, et de justesse se hisse au-dessus de la barre des 30 % (30,4 %). La démocratie chrétienne ne fait pas le bond en avant qu'elle espérait : elle connaît même un léger tassement. Elle perd 200 000 voix. Elle se maintient à 262 députés (moins 1) et 38,3 % des suffrages. Les socialistes ne parviennent pas à franchir la barre des 10 % ; avec 9,9 %, ils obtiennent 62 députés.