En fait, on assiste à une polarisation des votes entre francophones et anglophones, laquelle n'est pas sans rappeler le scrutin de 1972 qui soulignait clairement le ressac des Anglo-Canadiens contre le French Power (Journal de l'année 1972-73). Cette fois, les résultats électoraux démontrent hors de doute que la division entre le Québec et le reste du Canada est plus profonde qu'on ne le croyait, les maquillages politiques de Pierre-Elliott Trudeau n'ayant pu masquer cette réalité.

La dimension ethnique de l'élection n'échappe pas au nouveau Premier ministre, J. Clark, qui s'inquiète, le lendemain de la victoire, de la représentativité du Québec dans son gouvernement en formation, représentativité qu'il tentera en vain d'élargir. Le 4 juin, Joe Clark présente un cabinet qui ne comprend que 4 Québécois, la plus faible représentation que connaisse un gouvernement, encore que 3 seulement d'entre eux sont véritablement francophones.

En attendant de donner une véritable dimension nationale à son gouvernement, un défi de taille, le Premier ministre fait preuve de bon sens politique en bâtissant un cabinet à deux niveaux, un système qui a fait ses preuves en Grande-Bretagne et au Québec depuis 1976. Avec 29 membres, un de moins que sous le régime Trudeau, le gouvernement repose sur un comité principal de 10 ministres, duquel relèvent 5 sous-comités présidés par des membres du comité principal.

Tragédies routières

Le 4 août 1978, les Canadiens et les Québécois sont émus par la plus sombre tragédie des annales canadiennes. Un autobus transportant 48 passagers s'abîme dans les eaux froides et vaseuses d'un lac situé à une centaine de kilomètres de Montréal. Quarante et une personnes meurent, dont 26 handicapés. Le 17 août, un autobus scolaire fait une embardée sur une route des Laurentides, entraînant la mort de trois enfants âgés de 7, 9 et 10 ans. Ces deux tragédies suscitent, le 18 août, la création par le ministre québécois des Transports, Lucien Lessard, d'une commission d'enquête sur la sécurité du transport par autobus au Québec. Presque un an plus tard, soit le 29 mars 1979, quelques heures après la remise de son rapport, dans lequel il affirme qu'un autobus sur cinq est dangereux au Québec, le commissaire-enquêteur Robert Jodoin est tué avec 16 autres passagers dans un accident d'avion à l'aéroport de l'Ancienne Lorette. Enfin, comme s'il fallait un autre accident pour ajouter plus de crédibilité à ce rapport, un autobus dérape le 11 juin 1979 sur une route des Cantons de l'Est, près de Montréal. Onze personnes, des membres d'un groupe de l'âge d'or revenant d'un champ de courses, sont tuées sur le coup.

L'argent des JO

Une commission d'enquête sur l'escalade des coûts des jeux Olympiques de Montréal de 1976, présidée par le juge Albert Malouf, révèle, le 24 mai 1979, huit mois après sa création, un étrange réseau d'amitiés et de relations d'affaires contrôlé par des personnalités de l'ancien régime libéral de Robert Bourassa. Il ressort de ces mois d'audiences que le conseiller spécial de Robert Bourassa, au moment où celui-ci était Premier ministre, Paul Desrochers, et un sous-ministre de l'époque, Claude Rouleau, ont reçu des sommes d'argent importantes de la part de plusieurs entrepreneurs. L'argent perçu servait, entre autres, à défrayer les dépenses du Premier ministre lors d'occasions spéciales. Selon la commission, le Parti libéral du Québec aurait amassé, de cette façon, la rondelette somme de 700 000 dollars, que le nouveau chef Claude Ryan hésite à remettre au Trésor public, malgré ses promesses de veiller à la transparence des fonds de son parti.

Défaite

En annonçant le 26 mars 1979 des élections générales, le Premier ministre libéral, P.-E. Trudeau, avait déjà à plusieurs reprises remis l'échéance de la consultation populaire. À la dissolution du 30e Parlement, le gouvernement avait atteint la limite de cinq ans permise par la Constitution. Ne pouvant plus se dérober, malgré des sondages qui prédisent sa défaite, P.-E. Trudeau lance la campagne électorale sous des thèmes qui lui ont valu d'éclatantes victoires en 1968 et 1974 : l'unité nationale, la sécurité et la qualité de la vie, l'économie et l'énergie.