L'affaire du Palmier en zinc est d'autant plus durement ressentie qu'elle intervient après deux tentatives de prises d'otages. La première a pour cadre l'aéroport de la petite ville de Tadjoura, où, le 16 octobre, un commando afar, venu d'Éthiopie, a vainement tenté de s'emparer de passagers et fait deux morts. La deuxième a lieu, dans la nuit du 28 au 29 novembre, à Yoboki, agglomération située près de la frontière éthiopienne : un instituteur français est tué et sa femme blessée.

À Randam, à 50 km de la frontière éthiopienne, un groupe de dissidents afars enlève, le 7 mai 1978, un fonctionnaire français détaché auprès du gouvernement djiboutien. Il sera remis en liberté une dizaine de jours plus tard.

Simultanément, les tensions entre les deux communautés Afars et Somalies Issas connaissent un brutal regain. Les prises d'otages et attentats ne constituent d'ailleurs qu'un des aspects de ces tensions, qui menacent constamment de dégénérer en affrontement armé. D'ores et déjà, la république est coupée en trois morceaux : la capitale, le pays somali issa sur la rive orientale du golfe de Tadjoura et le pays afar sur la rive occidentale.

Irrédentisme

En revanche, les frontières internationales sont totalement perméables entre le pays afar et l'Éthiopie d'une part, le pays somali issa et la République démocratique de Somalie, d'autre part. Tandis que la junte d'Addis-Abeba encourage discrètement l'irrédentisme afar, les dirigeants de Mogadiscio, toujours attachés à la défense des idées pansomalies et au projet de création d'une Grande Somalie, ne renoncent pas à aider les Somalis Issas.

Les difficultés économiques du pays connaissent une acuité exceptionnelle. Dépourvu de toute ressource minière et agricole, Djibouti ne peut plus compter sur les revenus de ses activités tertiaires. La voie ferrée reliant le port de la mer Rouge à Addis-Abeba a été coupée en plusieurs tronçons par les raids de dissidents somalis qui, sur l'arrière des lignes éthiopiennes, multiplient les actions des commandos. De ce fait, le trafic portuaire de Djibouti est tombé à son niveau le plus faible. À la fin de l'année, le déficit du budget national est déjà de l'ordre de 2 milliards de F Djibouti et, excepté l'aide de l'ancienne métropole, aucun concours financier extérieur n'est attendu par Hassan Gouled. Tous ses appels en direction des pays arabes restent à peu près sans écho.

Équilibre fragile

La première crise gouvernementale de l'histoire du nouvel État éclate le 17 décembre 1977. Ahmed Dini démissionne de son poste de Premier ministre, parce que, dit-il, le gouvernement de Djibouti « pratique une politique tribale ». La plupart des ministres d'origine afar — ethnie de Ahmed Dini — démissionnent à leur tour. Hassan Gouled attend un mois avant d'accepter leurs démissions et, le 5 février 1978, Abdallah Mohamed Kamil est chargé de constituer un nouveau cabinet. Bien que le nouveau Premier ministre soit, lui aussi, d'origine afar, jamais l'équilibre ethnique du pays n'a paru plus fragile.

Égypte (Rép. Ar. d')

Le Caire. 38 070 000. 40. 2,2 %.
Économie. PIB (73) : 260. Production : G (71) 104 + A (75) 132 + I (74) 122. Énerg. (*75) : 405. C. E. (73) : 17 %.
Transports. (74) : 8 671 M pass./km, 2 767 Mt/km. (*75) : 215 500 + 46 300.  : 376 000 tjb. (75) : 1 300 M pass./km.
Information. (72) : 14 quotidiens ; tirage global : 773 000. (74) : 5 115 000. (74) : 610 000. (71) : 140 900 fauteuils ; fréquentation : 65 M. (74) : 503 000.
Santé. (74) : 7 495. Mté inf. (74) : 100.
Éducation. (74) Prim : *4 145 000. Sec. et techn. : 1 982 752. Sup. : 408 235.
Institutions. République proclamée le 18 juin 1953, après le coup d'État du 26 juillet 1952 qui renverse le roi Farouk. Nouvelle Constitution proclamée, après référendum, le 11 septembre 1971. Président de la République : Anouar el-Sadate, élu pour un second mandat le 16 septembre 1976 ; succède au colonel Gamal Abdel Nasser, décédé. Vice-président : général Hosni Moubarak. Premier ministre : Mamdouh Salem.

Le grand pari

Le président Sadate se lance, en novembre 1977, dans une partie de poker diplomatique qui étonnera le monde et qui, quoi qu'il arrive, aura eu le mérite de changer les données politiques et psychologiques du problème du Proche-Orient. Le 9 novembre, dans un discours au Caire, il déclare incidemment : « Je suis prêt à me rendre à la Knesset pour discuter de la paix avec les Israéliens. » Ceux-ci sont d'abord incrédules. Menahem Begin pourtant attrape la balle au vol : si le président Sadate veut venir, dit-il, je l'attends à Jérusalem... En six jours, l'affaire est conclue : Sadate, officiellement invité à Jérusalem, accepte officiellement de s'y rendre.

Un geste

La nouvelle fait l'effet d'une bombe. Les Arabes, médusés, restent sans réaction et s'interrogent : qu'est-ce qui a bien pu décider le président égyptien à franchir le pas, décisif, de la reconnaissance d'Israël, et cela sans aucune contrepartie ? Le chef de l'État égyptien s'en explique. Les négociations, dit-il, sont complètement bloquées. Les efforts américains de relance ont échoué en septembre 1977, aux Nations unies, et aucune nouvelle perspective ne se dessine. Pour faire bouger les choses, il faut un geste spectaculaire. Il faut abattre le « mur de méfiance » qui entoure Israël et qui est le seul obstacle réel au rétablissement de la paix. Il ne s'agit dans son esprit ni d'abandonner la cause palestinienne — qui reste la clé de toute solution pacifique — ni de conclure avec Israël une paix séparée. Mais de démontrer la bonne foi égyptienne et le désir de paix des Arabes, en jetant sur le tapis vert un des atouts maîtres de la négociation, geste susceptible, pense-t-il, de dissiper la méfiance des Israéliens et de répondre à leur besoin légitime de sécurité. Cette démarche audacieuse, menée avec brio, suppose pour réussir que trois conditions soient remplies :
– il faut que le peuple égyptien suive son leader dans cet étonnant retournement ;
– il faut que le monde arabe comprenne et accepte cette nouvelle approche ;
– il faut qu'Israël, enfin, joue le jeu et réponde à une concession importante par d'autres concessions.