Surgissent Yves Maupetit et sa complice armée d'un fusil de chasse. Y. Theureau et les deux garçons restent figés : Michèle Theureau, elle, esquisse un geste de fuite. Un coup de feu claque : Yves Theureau atteint en pleine tête s'effondre et Olivier est touché de trois plombs de chevrotine à la cuisse. Michèle Theureau, maîtrisée par les bandits, leur remet ses bijoux et 4 000 F. Les tueurs font monter les enfants au premier étage, les attachent et s'en vont, emmenant avec eux Michèle Theureau dont ils empruntent la voiture, une Austin. Quelques centaines de mètres plus loin, Yves Maupetit fait descendre sa passagère, l'abat froidement et traîne son corps jusqu'à la berge d'un petit ruisseau. Les tueurs s'enfuient dans la voiture de leur victime.

Dans la villa des Theureau, Olivier et Frédéric, terrorisés attendent plusieurs heures avant de se libérer de leurs liens. Puis ils descendent, constatent que leur père est mort et vont alors sonner chez des voisins à qui ils racontent le drame. Traumatisés, à bout de forces, les deux garçons devront être hospitalisés.

Traqués

Pendant ce temps, Yves Maupetit et Janine Terriel fuient, toujours en voiture. À Vincennes, ils refusent de se prêter à un contrôle de routine et renversent un gendarme qui est légèrement blessé. Peu après, à Charenton : nouveau barrage ; un agent qui veut intercepter la voiture est atteint à la jambe. Troisième barrage à Champigny : cette fois, les tueurs prennent peur et abandonnent l'Austin. La femme est rapidement rejointe, tandis que Maupetit tire sur ses poursuivants, en blesse deux grièvement et réussit à s'enfuir.

La police reconstitue le drame de Sucy-en-Brie grâce aux aveux de Janine Terriel, qui révèle aussi que son complice est bien l'assassin d'André Boulmier, cultivateur à Treigny, dans l'Yonne. Il l'a tué d'un coup de fusil, le 10 janvier, pour... 200 francs.

Dans la nuit du 20 au 21 janvier, Maupetit commet un nouveau forfait. À 21 h 30, il s'introduit dans la maison de retraite de Jouarre, en Seine-et-Marne. Il ligote et bâillonne le directeur, Yves Jacquemin, et enlève sa jeune femme, Ghislaine, dans le but, déclarera-t-il, de l'échanger contre Janine Terriel. Il est 23 heures, Maupetit part à bord d'une R 12 volée, avec son otage qui, terrorisée lui révèle bientôt la combinaison du coffre de la maison de retraite. Maupetit revient à Jouarre. Il rafle les 20 000 F du coffre, ligote la veilleuse de nuit, Julienne Grosille, que toutes ces allées et venues avaient alertée, et repart, toujours avec son otage.

Julienne Grosille prévient la gendarmerie. Maupetit passe au travers des barrages, arrive à Champigny et prend le RER, accompagné de Ghislaine Jacquemin, qu'il libère enfin sur un quai de la gare de Paris-Lyon. Elle vient de vivre un cauchemar de 15 heures.

Traqué par d'énormes forces de police, Yves Maupetit fuit toujours. Le 27 janvier, deux hôteliers reconnaissent formellement le gangster comme étant l'individu qui, armé d'un fusil, leur a volé deux jours plus tôt une somme de 30 000 francs.

Celui que la presse désigne maintenant comme le « tueur fou de Sucy-en-Brie » va être arrêté, à Valence, le 31 janvier au soir, dans un bar. Alors qu'il avait déjà payé son passage en Espagne, il a été donné par le milieu.

Son arrestation se déroule comme un scénario bien réglé : le bar a été cerné, deux policiers, dont une femme, l'inspecteur Geneviève Rostaing, sont entrés et consomment tout près de lui. Ils profitent de ce que Maupetit allume une cigarette pour le ceinturer.

L'attentat de la rue Rollin

Henri Curiel, réfugié politique en France depuis 1951, est assassiné le 4 mai 1978, en sortant de l'ascenseur de son immeuble, rue Rollin à Paris. Cet attentat est rapidement revendiqué par un mystérieux commando Delta. Pour la police, une seule certitude : l'arme du crime, un pistolet 11,43 est la même que celle qui a servi à exécuter, le 2 décembre 1977, à Paris, Laïd Sebaï, gardien de nuit à l'Amicale des Algériens en Europe.

Expulsé

Issu de la grande bourgeoisie égyptienne, Henri Curiel, né le 13 septembre 1914, au Caire, est le fils d'un riche banquier d'origine israélite. Très jeune, H. Curiel prend conscience de la misère et de l'exploitation dans lesquelles vivent ses compatriotes, sous le règne du roi Farouk. Il fonde le parti communiste égyptien, est emprisonné, rapidement libéré puis expulsé. Il se rend en Italie où il milite quelque temps au sein du PCI. En 1951, il s'installe définitivement à Paris. Il mène une vie apparemment tranquille jusqu'au déclenchement de la guerre d'Algérie. Henri Curiel sort alors de sa réserve et monte des réseaux de soutien au FLN ; arrêté le 21 octobre 1961, il est libéré en 1962 peu après les accords d'Évian.