Cette persécution généralisée pourrait bien avoir un côté bénéfique pour la trop lente union de la chrétienté. Ainsi, dans les pays les plus touchés par les persécutions (Amérique du Sud, pays de l'Est ou d'Afrique), les chrétiens sont contraints de faire face ensemble. Même en France, encore à l'abri, l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT) est un lieu vivant de pleine unité.

Autres exemples de marche inattendue vers l'unité : les déclarations conjointes des Églises suisses et belges contre le totalitarisme raciste de l'Afrique australe, de toutes les églises d'Irlande en faveur de la réconciliation en Ulster, des Églises françaises à propos du peuple Saharoui, etc. On comprend que se soit tenu en juillet, à Königstein (RFA), un congrès de l'Église en détresse sur le thème : le combat pour l'homme et sa liberté, à l'Est et à l'Ouest.

Dialogues

Bien que l'interminable Conférence de Belgrade se soit soldée par un échec, notamment sur la question des libertés, malgré les efforts conjugués du Vatican et du COE, quelques lumières auront brillé, comme les multiples dialogues entre confessions chrétiennes ou entre chrétiens, juifs ou musulmans. Deux seuls dialogues semblent un peu bloqués : ceux entre catholicisme ou orthodoxie avec l'anglicanisme ou l'Église luthérienne de Suède, en raison de la reconnaissance par ces deux derniers de l'ordination des femmes au sacerdoce.

Amnesty international, où militent des chrétiens de tout bord, s'est vu attribuer le prix Nobel de la paix (10 décembre à Oslo) ; Mairead Corrigan et Betty Williams, cofondatrices du Mouvement pour la paix en Irlande du Nord, le Peace people, recevaient le même prix, non attribué en 1976. Plus réjouissant encore est l'acte politique et religieux du musulman Anouar el-Sadate (20 novembre 1977) allant à Jérusalem à contre-courant, mêlant Dieu à la politique — style ignoré des chefs d'État « chrétiens » — pour se recueillir enfin sur les lieux saints des trois grandes religions monothéistes. Dans le même esprit, une Lettre à toutes les générations, rédigée par des jeunes et le prieur de Taizé aux abords de la Chine a été rendue publique à Breda (Pays-Bas) le 10 décembre. Elle exprime à la fois l'angoisse de ce temps et l'Espérance qui ne trompe pas, et invite chacun à partager son avoir, son savoir et son pouvoir avec les plus déshérités de la terre.

Au comité central du COE (juillet-août), il a été largement question du 50e anniversaire de la fondation de Foi et Constitution, aujourd'hui grande Commission théologique, avec l'Église romaine, du COE. Le secrétaire général, Philip Potter a insisté sur le défi de la souffrance auquel aucune Église confessant sa foi aujourd'hui ne saurait échapper. Le docteur suisse Lukas Vischer, co-président du groupe mixte COE-Église romaine, a présenté un important rapport : Sur la voie du consensus doctrinal, montrant que les Églises sont parvenues à des résultats très positifs sur le baptême, l'eucharistie, le mariage et, même, sur les ministères de la papauté. Il annonce, en outre, qu'un calendrier annuel de prières solidaires est prêt, avec le concours de toutes les Églises du monde.

Autres faits

La Conférence chrétienne pour la paix à Prague (juin 1978) sous la présidence de Richard Andriamadjato, maire d'Antananarivo et membre du Conseil révolutionnaire de Madagascar ; la réunion au sommet européen pour la première fois, du 10 au 13 avril 1978 à Chantilly (France), des responsables (Est et Ouest) de la Conférence des Églises européennes (KEK), présidée par le pasteur André Appel, de Strasbourg, et du Conseil des conférences épiscopales d'Europe (CCEE), présidé par Mgr Etchegaray, président de la Conférence française. Les 120 délégués, rassemblés sous le mot d'ordre du Christ : Qu'ils soient UN afin que le monde croie !, ont travaillé les deux thèmes « pour être fidèle au Christ, travailler à l'unité » et « accueillir la paix du Christ, travailler à la paix du monde ».

Le dernier fait notable a été le 2e Colloque œcuménique de théologiens du tiers monde, tenu à Accra (Ghana), du 17 au 23 décembre 1977. Le 1er Colloque avait eu lieu en 1976 à Dar es-Salaam, en Tanzanie, et avait surtout analysé la situation politique et économique des pays du tiers monde. Celui-ci, rassemblant 90 théologiens, Africains, Noirs des États-Unis et des Caraïbes, de toutes confessions chrétiennes, s'est attaché, non sans succès, à poser les bases d'une théologie authentiquement africaine noire.