Pour résoudre ce problème, précise J. Carter, il faut réduire la consommation, abandonner le pétrole et le gaz pour se tourner vers d'autres sources d'énergie et encourager la production aux États-Unis. Début novembre, le chef de la Maison-Blanche décide de différer son voyage autour du monde pour défendre ce qu'il considère comme l'œuvre législative la plus importante de son mandat.

Dollar

Mais le Président a d'autres soucis. Si le taux de chômage est en régression (de 7 %, en août 1977, il est tombé à 6,1 %, en février 1978, niveau le plus bas atteint depuis octobre 1974), la poussée inflationniste demeure forte. Pour l'ensemble de 1977, les prix de gros ont augmenté de 6,6 %, au lieu de 3,3 % en 1976. Pour les quatre premiers mois de 1978, la hausse est de 3,6 %, soit un rythme annuel de 11 %.

La balance commerciale du pays accuse un déficit record de 26,7 milliards de dollars en 1977, contre 5,87 milliards en 1976 et un excédent de 11 milliards en 1975. Pour le seul mois de février 1978, le déficit atteint 4,5 milliards de dollars, chiffre encore jamais enregistré. La longue grève des mineurs de charbon, qui a paralysé les puits des Appalaches du 6 décembre au 25 mars (date de la ratification d'un nouveau contrat de travail) et provoqué notamment une augmentation sensible des achats de pétrole, n'y est évidemment pas étrangère.

Le lourd déficit commercial a contribué à aggraver la chute du dollar. Celle-ci, amorcée depuis plusieurs mois, ne cesse de se poursuivre tout au long de l'hiver sur les places financières internationales.

Le 21 décembre, Jimmy Carter provoque une remontée de la devise américaine en assurant que son pays est prêt à « intervenir dans toute la mesure nécessaire pour s'opposer aux conditions désordonnées du marché des changes ». Mais le mouvement de baisse reprend huit jours plus tard, lors du remplacement, à la tête de la banque centrale des États-Unis, d'Arthur Burns par William Miller, un homme d'affaires qui présidait la société Textron. Arthur Burns avait, à plusieurs reprises, accusé Jimmy Carter de ne pas se préoccuper suffisamment des conséquences inflationnistes de sa politique.

Le dollar connaîtra au cours des mois suivants une activité en dents de scie : forte remontée le 5 janvier après l'annonce de mesures de soutien, lourde rechute le 10 à la suite de déclarations ambiguës du secrétaire au Trésor, Michael Blumenthal, brusque glissement le lendemain après l'annonce par Jimmy Carter que toute politique autoritaire des prix et des revenus était exclue, redressement fiévreux à partir du 14 avril alors que Wall Street est le théâtre d'une frénésie d'achats parfaitement inattendue.

Ce désordre monétaire, dans la mesure où il tend à aiguiser les conflits d'intérêts, pèse sur les relations entre les Américains et leurs alliés. Les rapports avec Bonn, notamment, se dégradent sensiblement. De même, ce dérèglement constitue un obstacle de taille dans les négociations dites du Tokyo Round sur les réductions tarifaires. En avril, à Genève, il semblait en tout cas difficile que les trois grands du commerce mondial (États-Unis, CEE, Japon) pussent parvenir à un accord avant l'expiration des pouvoirs accordés au président Carter par le Trade Act.

Popularité

Le 20 janvier, le chef de la Maison-Blanche présente son message sur l'état de l'Union comme un appel à la confiance, au travail et à l'optimisme. En présentant un bilan des douze mois écoulés, il reprend une phrase qu'il a déjà utilisée au cours de sa campagne électorale : « On dit que nos meilleures années sont derrière nous. Je vous dis que le meilleur est à venir. »

Pourtant, depuis l'automne, la cote de popularité de Jimmy Carter ne cesse de baisser. La fougue idéaliste des premiers mois de présidence a fait place, de plus en plus souvent, à l'indécision, à l'improvisation, à l'impuissance.

C'est l'affaire Bert Lance qui, la première, a rompu le charme. Ancien banquier en Géorgie, ami de Jimmy Carter, Bert Lance, directeur du Budget (Office of management and budget) est amené à démissionner de ses fonctions, le 21 septembre. Des irrégularités financières lui sont reprochées depuis de longues semaines : émission de chèques sans provision, utilisation de fonds et de l'avion de sa banque en cours de sa campagne électorale pour le poste de gouverneur de Géorgie en 1974, obtention de prêts particulièrement avantageux en raison de sa position. Autant de pratiques critiquables et contraires à l'éthique de la nouvelle équipe, même si elles n'étaient pas toutes sorties du cadre légal.