Social

Des résultats sensibles mais sans épreuves de force

1975-1976, années de recul syndical ? Assurément, le chômage (640 000 chômeurs secourus en moyenne pendant le premier trimestre 1976, 1 300 000 chômeurs selon la CGT, d'après les normes du BIT) n'a pas provoqué l'explosion sociale que certains pronostiquaient. Aucune des grandes journées d'action organisées par la CGT et la CFDT n'a provoqué de mouvements durables et de grande ampleur.

Dans les entreprises menacées de réductions d'effectifs, voire de disparition, les grèves, le plus souvent suivies d'occupation, n'ont pas suscité la même mobilisation que les affaires Lip, Rateau ou du Joint français avant la crise de 1974. Le secteur public, pourtant préservé de toute crainte sur l'emploi, n'a pas joué le rôle moteur qui était traditionnellement le sien pour les revendications de salaires. L'histoire ne se répète pas : la crise universitaire du printemps n'a pas été le détonateur d'un mouvement canalisant tous les mécontentements.

L'action syndicale est demeurée défensive. Mais les concessions qu'elle a obtenues sont loin d'être négligeables. Et jamais, malgré leur peu de succès apparent, les syndicats n'ont autant pesé dans la vie économique. Alors que naguère le chômage semblait exclure toute menace de grève (en 1965, année du plan de stabilisation, le nombre de journées de grève s'est abaissé à 976 000, chiffre le plus bas depuis 1945), les conflits sont demeurés nombreux ; le niveau de combativité ne s'est pas abaissé.

Le système de protection contre le chômage, mi-contractuel et mi-réglementaire, est sans doute un des plus complets qui existent. Dans la mesure où les entreprises ont préféré réduire la durée du travail plutôt que de licencier (financièrement c'est la solution la plus rentable), elles ont implicitement reconnu leur crainte de voir les syndicats provoquer une crise sociale grave. Finalement, patronat et gouvernement ont accepté de payer pour ne pas engager l'épreuve de force avec leurs salariés. Dans le secteur public, même si la politique contractuelle inaugurée en 1969 avec le gouvernement J. Chaban-Delmas paraît compromise, les concessions gouvernementales sont loin d'être négligeables. Dans le secteur privé, même si le CNPF freine, les négociations ne sont pas, pour autant, dérisoires. Au fond, tout le monde sait que l'accumulation des mécontentements risque de peser lourd lors des prochaines élections législatives.

L'action revendicative
Action interprofessionnelle

18 décembre : la CGT, la CFDT, la FEN et les partis de gauche manifestent pour la défense des libertés et contre la politique sociale du gouvernement.

1er mai : 40e anniversaire du Front populaire. Défilés importants.

6 mai : journée d'action sur la sécurité du travail.

13 mai : journée générale d'action (pouvoir d'achat, emploi, conditions de travail, libertés). Débrayages limités ; défilés importants.

Secteur public

– Fonction publique :

5 février : journée d'action CGT-CFDT.

9 mars : Grève générale des fonctionnaires.

Journées sectorielles :

16 octobre, 6 novembre : grèves aux PTT.

14 avril : grève aux Finances, à l'appel de tous les syndicats.

21-22 janvier : grève du personnel civil de la Défense nationale.

– Secteur nationalisé :

EDF/GDF : 5 mouvements de grève (6 novembre, 27 novembre, 17 décembre, 7 avril, 27-29 avril) à l'appel de la CGT et de la CFDT (sauf la dernière grève, lancée par la seule CGT).

SNCF : 3 mouvements de grève (2 décembre, 17-18 mars, 24-25 mars).

RATP : 5 novembre et 13 janvier, grèves lancées par une partie des syndicats.

Renault : grève des ouvriers des presses au moment du week-end de Noël. La CGT accepte un compromis le 30 décembre.

Télévision : grève le 13 novembre, les 19-20 novembre et le 6 mai.

Secteur privé

Métallurgie : journées d'action CGT-CFDT, le 5 novembre, le 17 mars et le 6 février.

Presse : autour du conflit du Parisien libéré, grève de la presse le 20 février (la huitième en un an) et le 21 mai à l'appel des journalistes. Grève à l'Équipe, au Figaro et à France-Soir les 3 et 4 juin.