En effet, à côté de 15 000 artisans de la réparation automobile, on trouve 25 000 concessionnaires et 7 000 à 8 000 gérants libres de stations-service. Chacune de ces catégories professionnelles trouve dans la vente de l'essence des revenus et une rentabilité différents selon les quantités vendues ou les conditions qu'elles obtiennent des compagnies pétrolières (le prix de l'essence restant fixé au détail par les pouvoirs publics). La limitation à 6 centimes du discount des pompes en libre service des magasins de grande surface a, pour l'instant, calmé les pompistes.

Initiative

Dernier événement du monde commercial : l'initiative prise par Carrefour de lancer, le 1er avril 1976, une cinquantaine de produits libres. Ils sont vendus sous leur nom générique simple (huile, café, lessive, etc.) dans un emballage sobre, dépouillé, assorti d'un étiquetage d'information très sérieux, dans des conditionnements normalisés, à des prix de 7 à 35 % inférieurs à ceux des produits de marque comparables.

L'expérience est intéressante à plus d'un titre. C'est la première fois que des distributeurs intègrent aussi fidèlement les revendications des consommateurs. C'est, de plus, un changement d'orientation notable dans la politique commerciale de Carrefour : les produits libres sont commercialisés au môme prix dans les 38 magasins à son enseigne, alors que, jusqu'ici, les responsables de rayons ou de magasin étaient totalement indépendants pour leurs approvisionnements et la fixation de leurs prix.

Enfin, cette opération a suscité de vives réactions non du petit commerce, non des concurrents directs de Carrefour (qui imiteront vraisemblablement son exemple), mais des industriels, qui jugent dangereux pour leur avenir cette initiative. En lançant cette opération, les responsables de Carrefour semblent, comme naguère Édouard Leclerc lorsqu'il fit sauter le verrou des prix imposés, avoir trahi la règle du jeu, ce qu'on pardonne difficilement.

Transports

Résultats médiocres, perspectives incertaines

Le fond du décor est gris, mais on a eu quand même l'occasion d'y accrocher quelques lampions de fête : le 21 janvier 1976, Concorde s'est envolé pour son premier vol commercial vers Rio ; la SNCF aura son train de l'an 2000 en 1982 (les travaux ont commencé entre Paris et Lyon) ; dix-sept inaugurations auront célébré cette année l'allongement de notre réseau routier de 488 kilomètres — un record... Mais, au bout du compte, remorqué par la poussive locomotive de l'économie générale, le secteur des transports aura passé une mauvaise année 1975 et n'attendait de 1976 guère mieux qu'un exercice moyen. Un point positif, pourtant : la reprise de la fréquentation des transports en commun se confirme partout dans les transports terrestres. D'une manière générale, les personnes ont d'ailleurs voyagé davantage que les marchandises.

Marchandises

Le duel rail-route n'a pas tourné comme on pouvait le penser. On savait certes que les temps de crise pénalisaient davantage le chemin de fer ; cette fois, pourtant, le renchérissement de l'énergie semblait devoir toucher surtout le transport routier et peut-être stopper la progression de sa part relative dans le marché des transports terrestres. Il n'en a rien été. Les transporteurs routiers ont enregistré une chute de 8 % de leur trafic, mais le rail a reculé, pour sa part, de 17 % : 87 millions de tonnes-kilomètres contre 64, l'avantage reste plus que jamais aux routiers. La baisse de son activité, jointe à un retard de majorations tarifaires, n'a évidemment pas arrangé la situation financière de la SNCF, dont l'équilibre, initialement prévu en 1973, est reporté d'année en année. Il a peu de chances d'être atteint en 1976, puisque les experts de la société nationale n'espéraient pas retrouver au cours de cet exercice le niveau d'activité de 1974.

Les routiers comptent, quant à eux, sur une progression de plus de 10 % en tonnes-kilomètres, mais redoutent les effets d'une concurrence aiguë sur les prix : elle aggraverait encore la situation financière de leurs entreprises.