Par contre, les prix ont atteint, eux aussi, de nouveaux sommets : on estime qu'un réacteur commandé en 1975 pour livraison en 1984 coûtera en moyenne 868 dollars par kWé, combustible non compris ; un réacteur équivalent, commandé en 1969, coûtait 226 dollars par kWé (soit près de 4 fois moins) et ne nécessitait que cinq à six ans de construction.

Plutonium

Deux décisions importantes pour le programme nucléaire américain sont toujours en attente. Les deux, dans des domaines différents, sont d'ailleurs liées au plutonium : la construction du Demo-Plant, surgénérateur rapide, dans le Tennessee, et le recyclage du plutonium produit dans les réacteurs à eau légère pour être réutilisé dans ces mêmes réacteurs à eau légère. Ces deux décisions sont d'ailleurs liées : plus on retardera le programme rapide du Demo-Plant et des futures centrales commerciales, plus il paraîtra souhaitable de recycler le plutonium dans les réacteurs à eau.

Aux dernières nouvelles, mi-1976, tant pour des raisons de réglementation que pour des raisons purement techniques et industrielles (absence d'usines de retraitement des combustibles irradiés, déjà mentionnées, et d'ateliers de refabrication des assemblages combustibles mixtes à l'uranium et au plutonium), on considérait que le recyclage ne pourrait guère commencer avant les premières années de la décennie 1980, peut-être pas avant 1985.

Abandon

L'événement nucléaire le plus important aux États-Unis, et peut-être dans le monde, au cours de l'année écoulée, a été l'abandon par ses promoteurs (l'association Gulf-Shell) de la filière de réacteurs à gaz à haute température dite HTGR, conséquence des difficultés de démarrage du prototype de 330 MWé de Fort Saint Vrain (Colorado), qui a plus de trois ans de retard.

Cet abandon n'est peut-être pas définitif, et des formules de rechange sont étudiées, mais la filière en sera de toute façon probablement retardée d'une bonne dizaine d'années : commercialisation (au mieux) pour la dernière décennie de ce siècle. Avec le choix britannique en faveur des réacteurs à eau lourde au détriment des mêmes réacteurs à gaz à haute température, il n'y a plus guère que les Allemands de l'Ouest dans la course ainsi que les Japonais (avec un projet très spécialisé pour la sidérurgie). L'Allemagne ne prendra sans doute pas de décision définitive en ce domaine avant le démarrage du réacteur prototype de 300 MWé à boulets combustibles (alors que le type américain est à éléments dits prismatiques), prévu pour 1977 à Schmehausen.

Ralentissement

En France, le programme d'équipement électronucléaire a été quelque peu ralenti, en accord avec la révision des objectifs de production d'électricité pour les horizons 1985 et 2000. Une étape importante, sur le plan technique, a été franchie avec le bon fonctionnement, pendant sa première année, de la première des centrales de la série 900 MWé, à Tihange : la divergence nucléaire a eu lieu le 21 février 1975, le couplage au réseau quinze jours après, le 7 mars 1975, et la pleine puissance a été atteinte le 30 juillet 1975. L'énergie produite par la centrale de Tihange a dépassé 3 milliards de kWh en 1975.

Fin 1976, deux nouvelles centrales nucléaires devraient être couplées au réseau EDF : Fessenheim 1, de 890 MWé (commandée en 1970), et Bugey 2, de 925 MWé (commandée en 1971).

Ampleur

On aura une idée de l'ampleur de cette entreprise industrielle en rappelant quelques données techniques des réacteurs de 900 MWé. La cuve, en acier faiblement allié, a 4 m de diamètre, 12 m de hauteur et pèse 332 tonnes. Le cœur du réacteur est constitué de 157 assemblages de combustible à uranium faiblement enrichi (3 % environ d'uranium 235) sous forme de pastilles d'oxyde frittées ; la masse totale de combustible représente 70 tonnes.

Le circuit de refroidissement comprend trois boucles qui alimentent chacune un générateur de vapeur auquel est associé un turbo-alternateur à une seule ligne d'arbres tournant à 1 500 tours-minute ; l'alternateur, de 1 120 MVA (mégavolt-ampère), est refroidi à l'hydrogène. Le refroidissement des condenseurs, pour la centrale de Gravelines, par exemple, près de Dunkerque, s'effectuera avec de l'eau de mer à raison de 180 m3/s.