Mais surtout une très belle coproduction franco-italienne de Jean-Louis Comolli, La Cecilia, sur la vie d'une communauté d'anarchistes à la fin du siècle dernier.

Le monde animal, enfin, a inspiré deux œuvres intéressantes, la superbe Fête sauvage, de Frédéric Rossif, et La griffe et la dent, de Gérard Vienne et François Bel, film présenté au Festival de Cannes.

Abondante et diverse, la production française, finalement, pêche surtout par son manque d'invention et son manque de souffle. Cette évidence est plus frappante encore lorsqu'on se tourne vers l'étranger.

États-Unis

C'est d'outre-Atlantique qu'est venu le film qui domine incontestablement toute la production de l'année : Vol au-dessus d'un nid de coucou. Pour sa deuxième réalisation aux États-Unis (après Taking off), le Tchèque Milos Forman, en adaptant le roman de Ken Kesey, mérite largement la pluie d'oscars qui s'est déversée sur son œuvre.

Contestataire

Tout entier situé dans le huis-clos angoissant d'une clinique psychiatrique américaine, Vol au-dessus d'un nid de coucou dénonce non seulement les méthodes répressives de la médecine mentale (heureusement souvent moins brutale aujourd'hui), mais aussi, en filigrane, l'impitoyable normalisation de tous les systèmes (ou régimes) qui ne souffrent pas que des êtres en marge les mettent en péril.

Le film doit également beaucoup à l'extraordinaire performance des interprètes, surtout Louise Fletcher et Jack Nicholson dont on n'oubliera pas de sitôt le personnage de joyeux drille chaleureux et goguenard irrémédiablement transformé en loque humaine par une lobotomie. Quant au succès mérité de cette œuvre au climat très pénible, il prouve, si besoin est, qu'un public adulte est capable de faire bon accueil à autre chose qu'à du simple divertissement.

Ce public, c'est tout de même à une superproduction à grand spectacle, dernier (mais non ultime) avatar des films-catastrophes, qu'il a donné la préférence : Les dents de la mer, et son requin-robot géant, a fait frissonner les Français d'autant plus délicieusement qu'ils n'ont pas, eux, de squales au large de leurs côtes.

Remarquablement adapté du best-seller de Peter Benchley par Steven Spielberg, à qui Hollywood offre maintenant des ponts d'or malgré sa jeunesse, ce film spectaculaire ne se contente pas de faire peur, il critique aussi une société trop encline à sacrifier au dieu dollar n'importe quoi, et même des vies humaines.

Cet aspect critique, on le retrouve dans la plupart des autres grands films venus d'outre-Atlantique. Ainsi Les trois jours du condor, du vieux routier Sydney Pollak, enfin retrouvé après quelques déceptions (dont Yakuza, une japonaiserie, avec le grand Mitchum. C'est d'abord une histoire policière, mais à l'intérieur de la CIA qui sécrète d'effarants complots.

Et c'est à la presse, comme pour Watergate, que le beau Robert Redford confie, in fine, son seul espoir de survie, Nashville, de Robert Altman, porte, à travers le prisme déformant de la cité du « musical », un regard sans pitié sur une société où l'argent et la politique font la loi.

Taxi driver, palme d'or à Cannes, et Mean Streets, tous deux de Martin Scorsese, tous deux avec Robert de Niro (la révélation de l'année) peignent sans complaisance la vie new-yorkaise vue par un chauffeur de taxi retour du Viêt-nam, ou par un apprenti mafioso de la Petite Italie. Un après-midi de chien de Sydney Lumet, plonge, derrière le suspense policier et psychologique d'une prise d'otages, dans l'Amérique des pauvres, des paumés. C'est, ici, Al Pacino, un autre Italo-Américain, qui confirme, dans une éblouissante composition, son talent. Moins classique, Une femme sous influence, de John Cassavetes, gigantesque psychodrame d'un couple, donne surtout à Gena Rowlands, épouse du réalisateur, et à Peter Falk, ex-Colombo, l'occasion d'un remarquable numéro d'acteurs.

Violence

Plus équivoque enfin, Rollerball, de Norman Jewison, propose une terrifiante vision de l'avenir, sur une planète où, faute de guerres, on libère la violence de la population en organisant de gigantesques et meurtrières joutes sur patins à roulettes. Exorcisme, ou fascination d'une violence décidément toujours au premier plan ?