Mais divers phénomènes les inquiètent : la vétusté des infrastructures, la lourdeur d'une bureaucratie traditionnellement inefficace, et dans laquelle se répand le fléau de la corruption, l'état déplorable de l'économie, la non-solvabilité de l'État, tout concourt à décourager les milieux d'affaires internationaux d'engager leurs capitaux en Égypte.

Maigres résultats

Le président Sadate mise dès lors davantage sur les puissances amies, intéressées au maintien de son régime, pour assainir les finances et l'économie de son pays. Comme il se doit, il se tourne au premier chef vers les États-Unis, où il entreprend une visite officielle du 26 octobre au 6 novembre. Sur le plan personnel, son voyage peut être considéré comme un succès. Les autorités lui réservent un accueil fastueux ; les mass media, à quelques exceptions près, le présentent à l'opinion avec une sympathie marquée.

Cependant, les résultats sont maigres sur le plan pratique. Washington lui accorde, pour l'année 1976, 900 millions de dollars dont 250 millions en produits alimentaires. En outre, il obtient le concours des Américains pour la construction, à une date indéterminée, de deux centrales nucléaires. On lui promet, enfin, de faire bénéficier l'Égypte d'une sorte de Plan Marshall dont le seul objectif serait d'étendre et de renforcer le secteur privé dans la vallée du Nil.

Il est vrai qu'en juillet l'Agence pour le développement international (AID) avait accordé à l'Égypte, pour financer l'achat de machines agricoles aux États, deux prêts totalisant 111 275 000 dollars, remboursables en quarante ans.

Déceptions

La tournée qu'entreprend le président Sadate du 21 au 29 février dans les pays du golfe Persique est encore plus décevante. Il avait lancé un cri d'alarme à la veille de son départ : l'Égypte ne pourrait être sauvée de la banqueroute que si elle obtenait 4 milliards de dollars au cours des deux prochaines années. Il obtient des richissimes États pétroliers du golfe à peine 700 millions de dollars. Et cela malgré l'engagement qu'il prend, confidentiellement, de dénoncer à brève échéance le traité d'amitié et de coopération qui lie l'Égypte à l'Union soviétique depuis le 27 mai 1971.

Deux semaines après son retour au Caire, le 14 mars, le président Sadate annonce qu'il mettait un terme à son alliance avec Moscou. Pour justifier une mesure unilatérale apparemment incompatible avec les stipulations du traité, le chef de l'État égyptien fait valoir que le Kremlin avait cessé de lui livrer de l'armement depuis la guerre d'octobre 1973, tout en refusant d'ajourner le règlement des dettes contractées auprès de l'URSS. La rupture (prévue depuis la rencontre Sadate-Ford à Salzbourg en juin 1975, Journal de l'année 1974-1975) est rentable dans la mesure où elle dispense Le Caire de rembourser plus de 10 milliards de dollars, dus pour la fourniture de biens d'équipement et de matériel militaire. Politiquement, le président Sadate accroît son crédit à Washington, où le président Ford s'engage publiquement à convaincre le Congrès d'entériner la vente d'armement à l'Égypte, en commençant par 6 avions de transport C-130.

L'une des principales préoccupations des responsables égyptiens est précisément de trouver des substituts au fournisseur soviétique dans le domaine militaire.

Les déplacements du général Adbal Ghani Gamassi, le ministre de la Guerre, à Bucarest, Belgrade et Paris (en mars), celui du général Husni Moubarak à Pékin (en avril), ceux encore du président Sadate à Londres (en novembre), à Bonn, Paris, Rome, Belgrade et Vienne (en mars-avril) se soldent par des résultats relativement positifs. La France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne fédérale fourniront à l'Égypte des armements en quantités appréciables, tandis que la Roumanie, la Yougoslavie et la Chine populaire livreront du matériel militaire et des pièces de rechange conformes à l'équipement soviétique.

En prime, la RFA octroie au Caire 230 millions de DM et la France lui accorde un prêt de plus de 200 millions de dollars, qui viennent s'ajouter aux 250 millions de dollars que la CEE met à la disposition du gouvernement égyptien pour acheter des produits alimentaires.