En réalité, l'unité et la stabilité de l'archipel paraissent moins menacées par une éventuelle sécession mahoraise que par le climat politique médiocre qui prévaut à Moroni, et laisse supposer que l'archipel accédera à l'indépendance dans les pires conditions.

Les partis d'opposition à A. Abdallah, notamment le Mouvement de libération nationale des Comores (MOLINACO), exigent l'organisation de nouvelles élections avant que l'archipel n'accède à la souveraineté internationale. Au sein même de la majorité, tout ne va pas pour le mieux et, le 19 avril, Mouzaoir Abdallah, président de l'Assemblée, démissionne. Des affrontements se dessinent entre modérés et extrémistes. La population noire, sur laquelle une minorité d'origine arabe exerce une hégémonie politique et économique, se fait de plus en plus turbulente.

À signaler qu'une grave épidémie de choléra sévit au cours du premier trimestre 1975. De retour d'un pèlerinage à La Mecque, des Comoriens ont ramené le vibrion. Bilan : mort de plusieurs centaines de personnes.

Saint-Pierre-et-Miquelon

Oubliés par la métropole, « les derniers Français d'Amérique du Nord » lèvent, le 6 janvier 1975, l'étendard de la révolte : 300 fonctionnaires cessent le travail parce que, disent-ils, ils n'ont pas été augmentés depuis quatre ans.

En fait, ce mouvement de grève, qui marque le début d'une crise qui se prolongera plusieurs semaines, ne constitue qu'un prétexte. Éloignés de l'Hexagone, isolés par de dures conditions climatiques, les habitants de l'archipel estiment que la mère patrie, à laquelle ils ne cessent de proclamer leur attachement, ne songe à eux qu'à la veille des scrutins, parce qu'ils constituent un indiscutable et précieux appoint électoral.

Les grévistes, soutenus par la majorité de la population, exigent non seulement un rajustement de leurs traitements, mais un accroissement de l'aide financière métropolitaine au territoire et une amélioration des liaisons entre Paris et Saint-Pierre.

Le 25 janvier 1975, le conseil général de l'archipel démissionne pour protester contre l'immobilisme du gouvernement. Le Francis-Garnier ayant débarqué 75 gendarmes mobiles en rade de Saint-Pierre le 2 février, l'épreuve de force s'engage entre Paris et la population de l'archipel, regroupée derrière ses élus, Albert Pen, sénateur socialiste, et Frédéric Gabriel, député républicain indépendant. Les syndicats appellent à la grève générale, et les rues de Saint-Pierre sont le cadre de manifestations hostiles au chef de territoire, Jean-Aimé Cluchard, dont les contestataires exigent vainement le rappel.

Des entretiens ont néanmoins lieu à Paris entre élus locaux et Olivier Stirn, secrétaire d'État aux DOM-TOM, et avec Jacques Chirac également. Les appels à la grève générale sont renouvelés, puis suspendus après le rappel des gendarmes mobiles en métropole ; l'effervescence retombe. Le gouverneur reste en place. Le conseil général revient sur sa démission. La promesse de construction d'un port en eau profonde à Saint-Pierre a désamorcé les passions, même si le malaise persiste.