Législation

La saisine

Sur convocation du président de la République, le congrès du Parlement, présidé par Edgar Faure, a adopté, le 21 octobre 1974, à la majorité constitutionnelle requise (par 488 voix contre 273), le texte du projet de révision constitutionnelle. Le deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution est remplacé par la disposition suivante : « Aux mêmes fins, les lois peuvent être déférées au Conseil constitutionnel, avant leur promulgation, par le président de la République, le Premier ministre, le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat, ou soixante députés ou soixante sénateurs. »

Les vétérinaires ont fait grève pour la première fois le 4 novembre 1974, pour protester contre la création d'un corps d'auxiliaires vétérinaires. Un texte réglementant la fabrication et la distribution des médicaments pour animaux (attendu depuis plus d'une trentaine d'années) a été complètement détourné de sa destination à la suite d'une série d'amendements adoptés par l'Assemblée nationale le 13 juin 1974. Il aboutissait pratiquement à déposséder les vétérinaires des prérogatives prévues par la loi de 1938. Devant la protestation unanime des professionnels, le Sénat rétablit le texte initial, supprimant ainsi la menace des auxiliaires vétérinaires ce texte est finalement adopté le 21 novembre 1974. Il est voté définitivement par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, le 17 avril 1975.

L'interruption volontaire de grossesse

Une loi, promulguée le 18 janvier 1975, autorise désormais les femmes à interrompre volontairement leur grossesse. Le débat (entièrement télévisé) se déroule durant quatre jours ; le vote final intervient le 29 novembre 1974, à 4 heures du matin (284 voix pour, 189 contre et 6 abstentions). Dans ce scrutin, l'opposition (186 députés) mêle ses voix à une partie de la majorité, assurant ainsi le succès du texte gouvernemental.

Le vote à peine acquis, 79 députés de la majorité, à l'instigation de Jean Foyer, saisissent le Conseil constitutionnel ; ils déclarent que la nouvelle loi n'est pas conforme aux principes affirmés dans la Constitution et dans la Convention européenne des droits de l'homme. Le 15 janvier 1975, le Conseil constitutionnel déclare qu'il n'y a aucune incompatibilité. La loi est applicable immédiatement, aucun des décrets en préparation n'étant indispensable à sa mise en œuvre.

Voici les principales dispositions de la loi sur l'avortement :
– l'article 317 du Code pénal, qui prévoit des poursuites judiciaires en cas d'avortement, est suspendu pour cinq ans ;
– l'avortement est autorisé jusqu'à la dixième semaine de grossesse, lorsque la femme enceinte le demande en raison d'une situation de détresse ;
– il ne peut être pratiqué que par un médecin, dans un centre hospitalier public ou privé agréé ;
– la femme doit être avertie par le médecin des risques médicaux qu'elle encourt et recevoir un dossier-guide sur les droits, aides et avantages consentis aux familles ainsi que sur les possibilités d'adoption ;
– elle doit consulter un centre d'information et de conseil familial et, si l'avortement est décidé, confirmer son intention au médecin par écrit ;
– si elle est mineure célibataire, le consentement d'un des parents est nécessaire ;
– un médecin n'est jamais tenu de donner suite à une demande d'avortement, mais il doit faire part de son refus dès la première visite.

Nouvelle loi sur le divorce

Le projet de loi réformant le divorce est définitivement adopté par l'Assemblée nationale le 18 juin 1975 et le Sénat le 20 juin. Le nouveau texte (remplaçant la loi Naquet du 27 juillet 1884) entend dédramatiser le divorce en minimisant la notion de faute pour en faire le constat d'un échec. Il comprend trois points :
– le divorce par consentement mutuel : les époux n'ont plus à faire état de griefs. Il leur suffit de présenter ensemble leur demande de divorce et un projet de convention portant sur ses conséquences (pension, garde des enfants). Un seul des époux peut faire état des raisons qui lui semblent rendre intolérable le maintien de la vie commune. Si l'autre conjoint reconnaît ces faits, le divorce est prononcé ;
– le divorce pour rupture de la vie commune : il est prononcé soit à la suite d'une séparation de fait de plus de six ans, soit à cause d'une altération grave des facultés mentales d'un conjoint, telle qu'aucune communauté de vie ne subsiste plus. Dans ce cas, le juge ne prononce le divorce qu'après s'être assuré que l'autre époux ne subira aucun préjudice matériel ou moral grave ;
– le divorce pour faute : ce point était le seul reconnu par la loi ; il demeure sans changement. La notion de faute remplace l'ancienne formule des « excès, sévices ou injures ».

La procédure est très simplifiée. Un juge spécialisé est nommé auprès de chaque tribunal. Pour la garde d'un enfant mineur, le juge doit considérer en priorité l'intérêt de l'enfant. Le droit de visite n'est refusé que pour un motif grave. L'un des époux peut être tenu de verser une prestation (l'ancienne pension) fixée selon ses ressources et les besoins de l'autre. Il est possible d'allouer une indemnité à un conjoint même s'il est jugé responsable. La nouvelle législation doit entrer en vigueur le 1er janvier 1976.