Le texte est en général bien accueilli, encore qu'il comporte une lacune de taille : il n'y est pas fait mention des liens religieux et historiques qui unissent le judaïsme à la terre d'Israël et à l'État d'Israël.

Cette lacune, qui soulève plusieurs polémiques, notamment dans les milieux religieux d'Israël, illustre bien l'ambiguïté de la position du Vatican à l'égard d'Israël, selon qu'il s'agit de l'Israël politique ou de l'Israël théologique.

La déclaration pontificale n'en constitue pas moins une démarche religieuse de très haute importance, la première qui ait été faite par le Vatican depuis le concile Vatican II.

Le dialogue judéo-chrétien est fortement stimulé en France par l'élection à l'Académie française de Robert Aron. Il est le premier académicien juif passionné par la spiritualité juive, à laquelle il a consacré une grande partie de son œuvre. Sur son épée d'académicien figure en hébreu le mot Emeth (vérité).

Il disparaît quelques jours avant sa réception sous la coupole, et au moment même où paraît une Lettre ouverte à l'Église de France ; Robert Aron y propose de nouvelles et suggestives vues sur Jésus d'une part, et, de l'autre, sur les places respectives du judaïsme et du christianisme dans l'économie du salut.

Institutions

Les grandes institutions juives, très diversifiées (organisation du culte, des collectes, de la vie culturelle, du combat politique, etc.), manifestent un réel désir de renouvellement. Le Congrès juif mondial tient en Israël des assises très animées, et, en France, a lieu une conférence nationale où Nahum Goldman et Raymond Aron analysent la situation nouvelle du peuple juif au sein de la crise mondiale.

Un Conseil d'intellectuels juifs pour Israël s'est créé, mais son action a été en partie freinée par des clivages politiques. Le cercle Bernard Lazare (Juifs progressistes) a fêté son 20e anniversaire. Surtout, le Fonds social juif unifié a lancé une vaste campagne pour le renouvellement de ses instances dirigeantes.

Pour la première fois en France, on assiste à une véritable campagne électorale (plusieurs listes étaient en présence), à l'issue de laquelle de nombreux jeunes sont élus aux divers organes de direction de cette institution qui oriente l'essentiel de la vie sociale et culturelle du judaïsme français. Une des plus importantes créations du FSJU (Union sefardite juive de France), le Centre universitaire d'études juives, a célébré avec éclat son 10e anniversaire. Le CUEJ a complètement renouvelé l'enseignement supérieur juif en France. Créé par Léon Ashkenazi il comporte de très nombreux départements (pensée juive, sociologie religieuse, histoire, littérature. Bible, Talmud, mystique) qui drainent chaque semaine des centaines d'étudiants au centre Rashi, à Paris.

Lettres et arts

Rashi (1040-1104), le plus célèbre des exégètes juifs, s'est vu précisément consacrer un ouvrage collectif. L'historiographie juive s'est enrichie d'une Bibliographie des juifs de France publiée sous la direction de l'érudit Bernhard Blumenkranz. Parmi les essais les plus remarqués, on retiendra : D'Œdipe à Moïse, de Marthe Robert ; L'humanisme de l'autre homme, d'Emmanuel Levinas, et la traduction française de la monumentale Encyclopedia judaïca.

Après le succès de Dreyfus, de J. C. Grumberg, la représentation à Paris de la pièce d'Elie Wiesel Zalmen ou la folie de Dieu a démontré la renaissance de cette forme d'expression qui avait connu dans les communautés de l'Est de très riches heures entre 1850 et 1939. Au cinéma, parmi les nombreux films consacrés à la guerre, et où le thème juif apparaît souvent au premier plan, Les violons du bal et Lacombe Lucien font une carrière remarquée.

Le peintre Benn, qui a voué sa vie à l'illustration de la Bible et publié deux œuvres déjà classiques sur Les Psaumes et Le Cantique des cantiques, a célébré son jubilé. Le peintre Tobiasse a les honneurs d'une grande exposition.