Du 9 au 16 septembre, le cardinal Pignedoli, président du secrétariat romain pour les non-chrétiens, est l'hôte du Conseil supérieur des affaires islamiques d'Égypte. Accompagné de membres du secrétariat et de représentants des communautés chrétiennes du Caire, il a une série d'entretiens avec les responsables de cet organisme.

Du 22 octobre au 8 novembre, ce sont les grands ulémas (en quelque sorte les savants religieux) d'Arabie Saoudite qui visitent l'Europe occidentale. Ils sont reçus par le pape à Rome et par le Conseil œcuménique des Églises à Genève. Puis ils se rendent à Strasbourg (où ils célèbrent la prière rituelle dans la cathédrale, avec l'accord de l'évêque, Mgr Elchinger) et à Paris. Dans chacune de ces villes, des colloques sont organisés entre les grands ulémas et des intellectuels européens. Un thème général : les droits de l'homme.

Enfin, du 11 au 17 novembre, un autre colloque islamo-chrétien se tient à Tunis et à Hammamet, à l'initiative d'instituts tunisiens. Il s'agit cette fois d'une confrontation des points de vue sur des problèmes contemporains, et notamment sur des questions brûlantes comme celle de la régulation des naissances ou celle de la violence. On peut constater à cette occasion, chez les participants musulmans comme chez les participants chrétiens, des divisions entre ceux qui craignent de porter atteinte à l'intégralité du message religieux de leur foi et ceux qui sont plus attentifs aux exigences nouvelles du monde et de la culture contemporains. Cela est apparu notamment, à Tunis, lorsque les congressistes ont voulu faire le point sur l'état actuel des études bibliques et coraniques : intégristes et modernistes des deux religions se sont affrontés.

Évolution

Ceux qui ont reçu les grands ulémas d'Arabie Saoudite ont été plus étonnés d'observer de semblables clivages parmi leurs hôtes, notamment à propos du statut de la femme ou de questions d'ordre pratique. On dit même que quelques-uns des grands ulémas ont failli rentrer dans leur pays avant la fin du périple, parce qu'ils reprochaient à certains de leurs confrères de ne pas respecter strictement les prescriptions et les exigences de l'Islam devant des infidèles. Ce fait montre qu'en Arabie Saoudite, berceau de l'Islam, la religion de Mahomet n'est plus une réalité immuable. On peut se demander si cette évolution ne va pas être accélérée par l'enrichissement et la modernisation du pays, dus aux revenus du pétrole.

Mais les bénéfices tirés de la vente de l'or noir sont aussi utilisés partiellement par plusieurs États (en particulier l'Arabie Saoudite, les émirats du golfe Persique et surtout la Libye du colonel Kadhafi) pour propager l'islam. Une véritable politique missionnaire a ainsi été mise en place, notamment en Afrique noire. Elle repose, entre autres, sur le financement de mosquées et d'écoles coraniques.

La Libye est à l'avant-garde de cette action. Un congrès missionnaire, réuni en décembre 1974 à Tripoli, décide la création d'un Institut pour la propagation de l'islam qui organise des missions d'assistance dans les pays africains du sud du Sahara. D'autre part, la Libye subventionne des groupes islamiques minoritaires à l'étranger, tels les Black Muslems aux États-Unis ou les communautés musulmanes des Philippines.

Dialogue

Cette expansion musulmane est la forme moderne de la guerre sainte. Elle prend facilement une coloration assez antichrétienne. D'autant que les promoteurs de cette action missionnaire ont souvent tendance à lier christianisme et colonialisme ou impérialisme. Ce mouvement ne doit-il pas nous faire relativiser l'effort de dialogue islamo-chrétien ? En fait, la réalité est complexe. L'Islam est un monde immense, divers et contrasté. Le dialogue est souvent le fait d'intellectuels, de sages musulmans, peut-être plus tolérants que les masses, mais aussi plus exigeants sur ce qui est, à leur yeux, l'essentiel. Il est aussi encouragé et conduit par des gouvernants dont les objectifs peuvent être, parfois aussi, politiques.

Quoi qu'il en soit, la généralisation de ce dialogue est un fait nouveau. Il y a plus de dix ans maintenant que les autorités religieuses chrétiennes (Saint-Siège et Conseil œcuménique des Églises) le recherchent. La Commission pour le dialogue avec l'Islam, créée au Vatican le 22 octobre 1974, ne fera que poursuivre ce qui est déjà entrepris.