À New York, le Metropolitan Opera enregistre un déficit de deux millions et demi de dollars pour la saison 1974-1975. Son directeur administratif décide une réduction des salaires de 10 %, ramène les contrats de douze à onze mois et effectue quelques coupures dans le programme général. La situation du New York City Opera n'est pas meilleure. Il a dû collecter 1 300 000 dollars pour le 30 juin 1975 et il lui reste à rassembler 4 600 000 dollars pour le 30 juin 1977, afin d'assainir ses finances et pouvoir engager les artistes des prochaines saisons.

Étranger

Un certain nombre de productions lyriques de première importance ont pu être réalisées cependant. À la Scala de Milan, une ouverture prestigieuse avec Fidelio par Karl Böhm et Günther Rennert. Puis, en avril, la création de Al gran sole carico d'amore, de Luigi Nono, dans la mise en scène du Soviétique Youri Lioubimov (qui se manifestait pour la première fois en Occident), et, sous la direction de Claudio Abbado, une grande cantate scénique sur la révolution, d'un langage sans concession et qui a bien montré que jamais le fond idéologique n'avait trouvé une expression plus juste, plus forte, plus riche et offerte à tant de niveaux différents d'intelligibilité.

Au Metropolitan Opera de New York, la résurrection du Siège de Corinthe, de Rossini, avec Shirley Verrett et Beverly Sills, dans la mise en scène de Sandro Sequi ; la reprise de Jenufa, réglée par Günther Rennert, et la création de Mort à Venise, de Britten. Au Covent Garden de Londres, L'or du Rhin et La valkyrie, dans la vision dépouillée de Götz Friedrich et Josef Svoboda. À Londres également, mais en concert, la première reprise moderne des Boréades, de Rameau, et des Orazi e Curiazi, de Mercadante. À Genève, Les Troyens, pour la première fois donnés intégralement sur une scène de langue française. Au festival d'Orange, une Salomé insurpassable, grâce à la performance géniale de Léonie Rysanek et Jon Vickers.

À Berlin-Est, enfin, un renouvellement complet des Noces de Figaro selon Walter Felsenstein, tandis que l'Opéra de Berlin-Ouest surprenait tout le monde en choisissant comme nouveau directeur général Siegfried Palm, plus connu jusqu'ici comme violoncelliste d'avant-garde. Les metteurs en scène de théâtre dramatique se penchent de plus en plus sur les problèmes du répertoire lyrique.

La tendance générale est moins d'actualiser les ouvrages que de les replacer dans l'époque de leur composition et de leur appliquer une analyse psychologique quelque peu postfreudienne. Mais, après un Siegfried socialisant à la Scala et un Faust triomphant à Bologne, Luca Ronconi a été âprement discuté pour la manière dont il a mis sens dessus dessous Le barbier de Séville, produit par le théâtre d'Angers à l'Odéon. Patrice Chéreau a été plus heureux avec ses superbes Contes d'Hoffmann à l'Opéra de Paris. Et, dans ce même théâtre, Jorge Lavelli a fait un très salutaire scandale en montant Faust dans les halles de Baltard et sous la coupole du Grand Palais.

Centenaires

À l'actif de l'Opéra de Paris et aussi de son directeur Rolf Liebermann, un Don Giovanni et une Forza del destino éclatants pour leur distribution, sinon révolutionnaires pour leur présentation. Mais le centenaire de l'auguste maison n'a guère été fêté que par une exposition dédiée à Charles Garnier et à ses collaborateurs. C'est peu pour un théâtre qui a repris maintenant une place honorable au tout premier rang des grandes scènes mondiales.

Les anniversaires ont été particulièrement nombreux et prestigieux au cours de la saison. Le centenaire de Schönberg (13 septembre) a donné lieu à colloques et concerts à Los Angeles et à une grande exposition itinérante à travers toute l'Europe, ainsi qu'à plusieurs reprises de l'opéra Moïse et Aaron. Celui de Ravel (7 mars) à des concerts assez inégaux en France, au baptême du nouvel et somptueux auditorium Maurice-Ravel de Lyon, mais, surtout, à un immense festival de ballets organisé par Balanchine à New York (16 créations mondiales sur des musiques de Ravel). Le centenaire de la mort de Georges Bizet et celui de la création de Carmen ont été célébrés avec plus d'enthousiasme et d'efficacité à l'étranger qu'en France.