La contribution arabe à l'effort de guerre syro-égyptien a été bien plus importante dans le domaine financier. Les États pétroliers (l'Arabie Saoudite, le Koweït, les principautés du golfe Persique et la Libye en particulier) ont versé aux deux pays belligérants des sommes considérables pour alimenter leur budget militaire ou ont acheté directement en Europe occidentale ou en URSS de l'armement qu'ils ont livré aux gouvernements du Caire et de Damas. Une aide multiforme a été fournie à la Syrie pour lui permettre de compenser les pertes qu'elle a subies à la suite des bombardements israéliens, de résoudre des problèmes de ravitaillement après la destruction de raffineries, de dépôts d'essence, de réseaux de communication. Les contributions financières du monde arabe aux deux pays belligérants n'ont pas été chiffrées officiellement, mais elles ont été évaluées à plusieurs milliards de dollars, somme globale supérieure à ce qu'Israël a obtenu des États-Unis et de la diaspora juive réunis.

La générosité du monde arabe, il est vrai, est à la mesure de la croissance des revenus pétroliers obtenus grâce à l'augmentation des prix du brut.

Pressions

Le pétrole et la puissance financière qu'il engendre se révèlent être une arme politique redoutable, un instrument diplomatique efficace. Sur l'intervention directe de divers chefs d'États arabes, notamment du colonel Boumediene d'Algérie, du colonel Kadhafi de Libye, du roi Fayçal d'Arabie, plusieurs États africains rompent leurs relations avec Israël, parachevant ainsi l'isolement de ce dernier sur le continent noir. Au total, 37 des 41 pays d'Afrique mettent l'État juif en quarantaine. Le président Bakr et le colonel Boumediene se succèdent à Moscou ; le premier le 13 octobre, le second le 14 octobre, pour obtenir une aide accrue de l'URSS à l'Égypte et à la Syrie. Le colonel Kadhafi, pour sa part, avait adressé dès le 7 octobre un message au président Pompidou, pour protester contre l'attitude de la France à l'égard de « l'agression sioniste », attitude qu'il juge insuffisamment militante. Bahreïn abroge l'accord de 1969, aux termes duquel la marine de guerre américaine bénéficiait de facilités dans l'ancienne base britannique de Jafri.

C'est dans le domaine purement pétrolier que les pressions les plus fortes s'exercent. L'Irak nationalise, le 6 octobre, les parts détenues dans la Basrah Petroleum Company par deux sociétés américaines, la Standard Oil et la Mobil Oil, ainsi que la participation hollandaise dans la Shell. Le 17 octobre, les dix États membres de l'OPAEP (Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole) décident d'avoir recours à l'« arme du pétrole » : ils s'engagent à réduire chaque mois 5 % de leur production jusqu'au retrait des Israéliens des territoires occupés.

Cependant, la plupart d'entre eux devaient la réduire de 10 % tout en interrompant leurs livraisons aux pays jugés amis d'Israël, à savoir les États-Unis, les Pays-Bas, le Portugal et l'Afrique du Sud.

Ambiguïté

La crise de l'énergie ainsi suscitée contribue à infléchir l'attitude de divers gouvernements en faveur du monde arabe. À l'exception du Portugal et des Pays-Bas, l'Europe occidentale manifeste sa neutralité, voire son inimitié, à l'égard d'Israël. La quasi-totalité des pays du Vieux Continent s'abstiennent de condamner l'initiative belliqueuse de l'Égypte et de la Syrie ou interrompent leurs livraisons d'armement à l'État juif, ou bien refusent d'accorder des facilités logistiques aux avions de transport américains qui livrent du matériel de guerre à Tsahal. Les neuf membres du Marché commun se prononcent, le 6 novembre, avant le Japon, en faveur de l'évacuation de tous les territoires conquis par Israël lors de la guerre de 1967. Lourdement dépendants des pays arabes pour leur ravitaillement en brut, l'Europe occidentale, le Japon et d'autres pays occidentaux prennent leurs distances des États-Unis et mélangent souvent leurs votes, aux Nations unies, avec ceux des pays communistes alliés aux États du tiers monde.