Mince consolation, la production de véhicules utilitaires a augmenté de 15,4 % par rapport à 1973 et les exportations de 6,6 %.

Bien sûr, tous les constructeurs français ont été inégalement touchés. La Régie Renault, grâce à des gammes diversifiées et à de nouveaux modèles (comme la populaire R5), faisait front et augmentait même sa production de 2,7 % en mars ; en revanche, Chrysler-France, Citroën (confrontée à de sérieux problèmes financiers depuis sa rupture avec Fiat) et même Peugeot accusent assez sérieusement le coup.

Citroën et Peugeot ont annoncé officiellement, le 24 juin, leur intention de se regrouper suivant une formule juridique qui reste à définir. Peugeot en assurera la direction et Michelin (principal actionnaire de Citroën) « restera présent » dans l'association. Si cette intention se confirme, le groupe se placerait en deuxième position des constructeurs français (derrière Renault) et en quatrième place parmi les européens, derrière Volkswagen, Fiat et Renault.

Sidérurgie

Acier : la haute conjoncture arrange tout

L'industrie sidérurgique française a traversé à pied sec une année pourtant très perturbée en général.

La persistance de la très forte demande d'acier dans le monde, en 1973-74, lui a permis d'assurer le plein-emploi de ses installations, de participer sans retard dommageable à l'augmentation générale des prix, de dégager d'importants résultats d'exploitation pour poursuivre ses investissements et fortifier ses bilans.

Évidemment, il faut nuancer ce tableau optimiste.

Équilibre

La crise énergétique, survenant en période d'inflation contagieuse, n'a pas affecté la consommation globale de produits sidérurgiques. Mais elle en a modifié la répartition.

La stagnation de l'industrie automobile risque de gagner d'autres biens de consommation utilisant les tôles minces sur lesquelles reposait jusqu'alors l'expansion de la production d'acier.

Au contraire, le monde entier est devenu avide de plates-formes pétrolières, de tubes pour gazoducs, de réacteurs nucléaires, c'est-à-dire de tôles fortes.

Un tel déplacement de fabrications pose aux industries sidérurgiques des problèmes de capacité de fourniture (qui exigent des délais de deux ou trois ans) ainsi que des problèmes d'équilibre des exploitations des entreprises, en fonction du degré d'amortissement des installations utilisant les tôles fines.

En France, la décision d'accélérer l'implantation d'un nouveau train à tôles fortes a été facilitée par le fait que les deux postulants, Usinor et Sacilor (ex-Wendel-Sidelor), sont à parité associés dans Solmer, qui exploite la nouvelle aciérie de Fos. Finalement, le nouveau train sera construit à Dunkerque.

Réserves

Le déplacement du marché n'est pas le seul point sur lequel l'évolution globalement satisfaisante de l'année 73-74 appelle quelques réserves.

Passant de 24 à 25,3 millions de tonnes entre 1972 et 1973, la production d'acier brut a progressé en France de 5 %. Celle de la Communauté européenne (150 millions de tonnes) a augmenté de 8 % dans le même temps. Quant à la production mondiale (700 millions de tonnes) elle s'est accrue de 11 %.

L'écart des taux de croissance est imputable pour partie au fait que certains producteurs importants avaient réduit plus que la France leur production en période de dépression. Il s'agit donc, pour certains, de rattrapage plus que de progression.

Mais cet écart traduit aussi combien, si elle était intervenue un an plus tôt, l'entrée en service de l'usine de Fos eût bénéficié de la haute conjoncture et contribué à l'expansion française.

Démarrage

Vivant dans un régime économique où le contrôle des prix diffère la possibilité de profiter de la forte demande dès qu'elle se manifeste et où les garanties de l'emploi empêchent d'ajuster les charges aux ressources quand le marché faiblit, l'industrie française de l'acier souffre constamment d'une insuffisance de moyens d'investissement : elle opère à la limite de ses possibilités et souvent dans des montages complexes auxquels l'État doit s'associer.