Consommation

Peu d'actions d'envergure, un travail en profondeur

Sans démonstration tapageuse, les organisations de défense des consommateurs progressent lentement, au cours des douze derniers mois. Cependant, faute de moyens en hommes et en argent, elles ne peuvent organiser un second Salon international.

Le tirage des revues spécialisées (50 millions de consommateurs et Que choisir ?) ne cesse d'augmenter, de nombreux colloques, réunions, salons se succèdent à bonne cadence dans les villes de province ; les textes de loi concernant les consommateurs sont publiés et diffusés dans le public.

Loi

Le plus important est la loi Royer, consacrée aux commerçants et aux artisans, mais qui concerne les consommateurs au moins par trois de ses aspects :
– les organisations de consommateurs seront présentes (deux sièges) dans les commissions départementales d'urbanisme commercial qui décideront de l'ouverture des futurs magasins de grande surface ;
– la réforme de la loi de 1963 sur la publicité mensongère ;
– les associations de consommateurs agréées peuvent se porter partie civile.

Les magistrats commencent à ne plus considérer le consommateur comme un perpétuel prévenu, mais comme une victime à qui le droit ne rend pas justice, car il n'est pas adapté à la société actuelle. Un certain nombre de juges (à Grenoble, par exemple) ont refusé à des magasins de grande surface les dommages et intérêts demandés à la suite de vols, arguant que les objets avaient été restitués sans être endommagés et que les magasins intègrent dans leurs prix de vente ce que leur coûtent ces vols.

Le tribunal de Lyon avait, avant le vote de la loi Royer, accepté la constitution de partie civile de deux organisations de consommateurs dans une affaire de produits alimentaires corrompus.

Cependant, l'application de la loi est bien souvent décevante pour les consommateurs. Un décret sur l'étiquetage des produits alimentaires (Journal de l'année 1972-73), paru le 14 octobre 1972, n'était toujours pas entré en vigueur un an après, les arrêtés d'application n'ayant pas paru. Il a fallu une conférence de presse des organisations de consommateurs pour que, dès le lendemain, les arrêtés soient publiés au Journal officiel.

Les plaintes déposées à ce sujet, après constat d'huissier, par des militants des associations populaires familiales sont donc restées inefficaces ; les délits économiques pouvant faire l'objet d'arrangements avec l'Administration, procédure tout à fait légale.

Force

On observe une double attitude des producteurs, commerçants, publicitaires, qui s'intéressent de très près au consommateur ; certains professionnels tentent de détourner à leur profit cette force naissante (éclosion de campagnes publicitaires très dirigées, où apparaît sans vergogne le mot si peu attrayant jusqu'ici de consommateurs) et même création d'un centre d'information du consommateur, qui est en fait l'organisme d'une agence de publicité chargée de diffuser à qui en fait la demande les dépliants publicitaires des marques diverses d'un type de produit.

D'autres partent en guerre contre les organisations de consommateurs, nient leur représentativité et demandent la mise au point d'une législation contraignante pour réglementer leurs activités. Ainsi A. Ersham, président-directeur général de Singer-France et vice-président de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris, demande une loi sur les essais comparatifs.

Les syndicats ouvriers découvrent, eux aussi, l'importance de la consommation : la CFDT publie régulièrement une page spéciale dans son magazine mensuel ; la CGT a publié des relevés de prix pratiqués dans les grands magasins et a révélé les méthodes de fabrication de certaines charcuteries industrielles. Force ouvrière va plus loin, en annonçant la création d'une association commune avec les organisations paysannes (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles et Centre national de jeunes agriculteurs), ce qui est pour le moins contestable puisque les agriculteurs sont des producteurs, au même titre que les industriels ; dans un second temps, elle crée FO consommateurs ; ses adhérents y sont automatiquement inscrits, moyennant une cotisation supplémentaire annuelle de 4 à 5 francs. Forte de ses 900 000 adhérents, la nouvelle organisation entre au conseil d'administration de l'Institut national de la consommation, sans qu'on puisse dire encore quelles formes prendra son action.

Communauté

Sur le plan européen, les choses évoluent, elles aussi. Le traité de Rome, signé en 1957, ne se souciait guère du consommateur et il a fallu des soins de chartistes aux fonctionnaires européens pour découvrir, au fil des 285 articles du texte, quelques minces allusions à la qualité de la vie et à l'intérêt des consommateurs.