L'évêque de Bilbao, Mgr Antonio Anoveros, fait lire, le 24 février, dans toutes les églises de son diocèse, une homélie sur le problème basque, évoquant la répression subie par la population. Quatre jours plus tard, il est invité par les autorités à ne pas quitter son domicile par mesure de sécurité. Le 3 mars, le chef de la police de Bilbao lui demande par deux fois de quitter l'Espagne pour Rome, en compagnie de l'un de ses collaborateurs. Le prélat refuse. Une note officielle précise, le lendemain, que son homélie constitue « une très grave atteinte à l'unité nationale de l'Espagne ».

Contacts

Les proportions prises par cette affaire suscitent évidemment des contacts au plus haut niveau. Le nonce apostolique, Mgr Luigi Dagalio, se rend à Rome et évoque, à son retour, le 5 mars, la possibilité d'une rupture, tout en exprimant l'espoir qu'elle ne se produira jamais.

Finalement, le 8 mars, tandis que se tient le Conseil des ministres, le conseil permanent de l'épiscopat espagnol se réunit également, en présence du nonce et de Mgr Anoveros, qui a enfin pu quitter son domicile.

L'évêque de Bilbao, à l'issue de cette réunion, indique dans une note qu'il n'a jamais voulu attenter à l'unité de son pays et juge inacceptables les interprétations données de son homélie. La Commission permanente de l'épiscopat souligne de son côté qu'elle est en « communion fraternelle et cordiale » avec lui et qu'il appartient au Saint-Siège de « juger avec autorité les actions pastorales des évêques », ce qui est une manière d'inviter le gouvernement, lui, à s'en abstenir. Une note adressée de Rome, le même jour, au gouvernement espagnol, par Mgr Casaroli, exprime le même souhait.

Le gouvernement gardant le silence, et Mgr Anoveros rentrant librement chez lui, l'affaire paraît se conclure par un succès des évêques conciliaires (ainsi nomme-t-on en Espagne les libéraux), qui, une fois encore, ont reçu le plein appui du Vatican.

Quelques jours plus tôt, d'ailleurs, le 28 janvier, Paul VI, recevant une délégation d'évêques espagnols conduite par le cardinal Enrique Y Tarancon, leur avait dit : « Le pape est avec vous et vous suit de très près avec une affection et un intérêt très spéciaux dans le travail d'animation et de renouveau chrétien que vous avez entrepris. »

Propos d'autant plus remarqués que, le 22 décembre 1973, lors des obsèques de l'amiral Luis Carrero Blanco, les évêques, et notamment le cardinal Tarancon, avaient été conspués par les franquistes aux cris de « À Zamora ! » (Zamora est une prison réservée aux prêtres, en application du concordat : sept ecclésiastiques y ont entrepris en novembre 1973 une grève de la faim).

Brésil

Dom Helder Camara, le célèbre archevêque d'Olinda et Recife, reçoit à Oslo, le 13 février 1974, un prix Nobel de la paix parallèle. L'attribution du véritable prix Nobel à Henry Kissinger et au Vietnamien Le Duc Tho a, en effet, suscité des controverses qui ont abouti, après la démission de deux des cinq membres du comité Nobel, à la création d'un comité indépendant et celui-ci a décidé d'attribuer son premier prix de la paix (un million de couronnes, soit 562 500 F environ) à l'archevêque brésilien.

Les relations entre une partie du clergé et le gouvernement de Rio demeurent très tendues. Le 30 octobre 1973, l'émetteur radio du diocèse de São Paulo, qui fonctionnait depuis dix-huit ans, est réduit au silence par décret du président de la République (ce qui provoque, le 23 décembre, la protestation du cardinal Marty, archevêque de Paris). Quelques mois plus tôt, le 28 août, en recevant les lettres de créance du nouvel ambassadeur du Brésil, le pape Paul VI lui-même avait laissé deviner les inquiétudes du Vatican à l'égard de la situation dans ce pays. « Lorsqu'on parle de développement, avait-il dit à son interlocuteur, le progrès social importe autant que la croissance économique. Le bien commun lui-même ne saurait être atteint que dans la mesure où sont garantis les divers droits et devoirs de la personne humaine. »

Chili

Les dramatiques événements politiques de septembre 1973 et leurs répercussions dominent évidemment la vie de l'Église du Chili. En juin 1973, les évêques de la province de Santiago s'étaient déclarés « inquiets devant l'évolution du pays, devant le tour que prennent les événements ».