Il n'est pas exclu que les formations de l'opposition aient développé des ramifications au sein de l'armée. Quoi qu'il en soit, une mutinerie éclate le 2 février 1974 au camp militaire de Zarka, à 25 kilomètres au nord-est d'Amman. De jeunes officiers, des sous-officiers et des soldats d'unités d'élite appartenant au 40e régiment de blindés (lequel avait écrasé le soulèvement des fedayin en 1970) occupent le camp et lancent un appel à l'insurrection générale. En guise de protestation contre les disparités des soldes, les privilèges dont bénéficient les officiers supérieurs et la corruption qui règne dans les milieux proches du palais, les mutins exigent : le limogeage du chef de l'état-major, le général Zeid ben Chaker, et de ses adjoints, la dissolution du Parlement, la formation d'un gouvernement militaire et l'augmentation des traitements les plus défavorisés.

Le roi Hussein, qui se trouve à Londres, annule la visite qu'il projetait à Washington et rentre précipitamment à Amman. Il parvient, le 8 février, à rétablir l'ordre en donnant satisfaction à certaines revendications des mutins, notamment en limogeant les deux adjoints du chef de l'état-major et en relevant les soldes. Cependant, le prestige du souverain est rudement atteint : le chef de la rébellion est le colonel Khaled el-Majali, qui appartient à une puissante tribu du Sud, sur laquelle la dynastie hachémite s'est traditionnellement appuyée.

Selon des rumeurs persistantes qui circulent à Beyrouth et dans d'autres capitales arabes, les services américains ne seraient pas étrangers à l'entreprise séditieuse.

Aide

Malgré tout, le roi Hussein reçoit un cordial accueil à Washington, où il est reçu entre le 10 et le 13 mars, successivement par le président R. Nixon, H. Kissinger et J. Schlesinger, respectivement secrétaires d'État aux Affaires étrangères et à la Défense. Le président Nixon promet (sous réserve de l'approbation du Congrès) de tripler en 1975 l'assistance militaire accordée à Amman, dont le montant passerait de 40 à 130 millions de dollars. Le 24 avril, le chef de la Maison-Blanche demande, en effet, au Congrès de voter au bénéfice du royaume Hachémite une aide globale (économique et militaire) de 207 500 000 dollars.

Lors de ses conversations à Washington (comme avec Henry Kissinger, qui se rend à Amman le 5 mai), le roi Hussein aborde le problème de la participation de la Jordanie à la conférence de Genève. Les responsables américains demeurent singulièrement discrets sur le sujet, tandis que les dirigeants arabes ne cachent pas leur volonté de restreindre le champ des compétences des représentants du roi Hussein dans les négociations de paix. En effet, le sommet arabe tenu à Alger en novembre reconnaît (malgré les protestations du souverain hachémite) l'Organisation de la libération de la Palestine comme le seul représentant légitime du peuple palestinien.

Le gouvernement d'Amman avait tenté de diverses manières de se gagner les bonnes grâces de ses citoyens palestiniens sur les deux rives du Jourdain. Le 16 juillet 1973, il menace de la peine capitale, pour trahison, toute personne en territoire occupé qui vendrait sa terre à un juif. Le 18 septembre, une amnistie générale est proclamée au profit des fedayin emprisonnés. L'un des dirigeants du Fath, Abou Daoud, dont la peine de mort avait été commuée en mars 1973, est libéré ainsi que 753 autres commandos.

En décembre, le roi Hussein offre aux Palestiniens des territoires occupés le droit à l'autodétermination. Il préconise l'organisation d'un référendum, sous l'égide d'un organisme international, qui serait tenu après l'évacuation des forces israéliennes.

Cisjordanie

En février, il adopte une attitude encore plus conciliante : le gouvernement jordanien ne prétend pas, déclare-t-il, représenter l'ensemble des Palestiniens, mais seulement ceux vivant en Cisjordanie et à Gaza. L'OLP, ajoute-t-il, pourrait, si elle le souhaitait, se faire représenter à Genève pour défendre d'autres aspects du problème. Le souverain accuse les fedayin d'avoir préparé minutieusement un plan pour le faire assassiner, mais se déclare néanmoins disposé à engager des négociations avec l'OLP en vue d'une entente. Cependant, les fedayin repoussent sa proposition.