Malgré cette année chaude, le parti gouvernemental se tire sans trop de dommage d'un autre scrutin : les élections aux assemblées provinciales dans trois États de l'Est et le territoire de Pondichéry. Le Congrès seul conserve la majorité absolue en Uttar Pradesh, mais devra former avec son allié, le PC prosoviétique, le nouveau gouvernement de l'Orissa. À Pondichéry, on remarque la réconciliation d'Indira Gandhi avec celui qui fut son plus redoutable adversaire depuis la scission du Parti, K. Kamaraj. Au Nagaland, en revanche, l'organisation nationaliste naga, favorable au Congrès, perd la majorité au profit des autonomistes, qui engagent le dialogue avec les rebelles, partisans de l'indépendance de la province.

Le Congrès s'est donc maintenu partout, sauf au Nagaland, en accentuant son caractère conservateur.

Autre facteur de la continuité, l'habileté et le charisme d'Indira Gandhi. Après une grève de douze jours, qui mit en danger l'approvisionnement en vivres du Kerala durant l'été 1973, les cheminots menacent le gouvernement d'une nouvelle action en mai 1974. Elle équivaudrait à une défaite militaire dans les circonstances actuelles, réplique le gouvernement, qui fait arrêter 700 de leurs dirigeants. Mesures énergiques, mais aussi psychologiques. C'est un appel et un coup de sonde dans l'opinion publique auquel fait penser le comportement d'Indira Gandhi lorsqu'elle laisse entendre au magazine Blitz, de tendance moscovite, qu'elle envisage de quitter le pouvoir.

Extérieur

Les difficultés intérieures ne ternissent pas le prestige d'Indira Gandhi hors des frontières. On écoute la fille de Nehru à la Conférence des non-alignés, en août 1973 à Alger, réunion qu'elle prolonge avec succès en recevant chez elle, à New Delhi, le maréchal Tito et Anouar el-Sadate. Les pays arabes, cependant, auxquels son soutien n'a jamais manqué, ne la paient pas de retour. L'Inde, troisième pays musulman du monde, est absente de la conférence islamique de Lahore en février 1974 et ne bénéficie pas des tarifs préférentiels sur les ventes de pétrole.

Indira Gandhi se tourne vers l'Iran. Sa visite à Téhéran, le 28 avril 1974, n'aurait sans doute pas été possible sans l'accord du gouvernement, quelques jours auparavant. Concession ou non, le trait commun aux différents aspects de la politique étrangère indienne de ces douze derniers mois, c'est qu'elle apparaît comme effaçant les aléas intérieurs.

L'Iran décide de fournir à l'Inde 10 à 11 millions de tonnes de pétrole par an et des crédits pour accroître la capacité de raffinage de Madras. Avec la visite prochaine du chah en Inde, on évoque l'instauration d'un Marché commun de l'océan Indien, zone de paix, à l'écart des zones contrôlées par les superpuissances.

Les Grands ne demeurent cependant pas inactifs. Indira Gandhi s'élève contre le projet anglo-américain d'installer une base atomique dans l'île de Diego Garcia. Mais les États-Unis, sous l'impulsion de l'ambassadeur Daniel Moynihan, lui fournissent une aide financière de 11 milliards de francs, qui efface sa dette à leur égard.

L'accord (avril 1974) avec le Pakistan devrait certainement permettre à l'Inde une ouverture en direction de la Chine. Ce n'est pas un hasard si Bombay est devenue escale de la compagnie aérienne éthiopienne Addis-Abeba–Pékin. L'Inde, du moins en ce moment, pourrait-elle aller plus loin dans la diversification de ses alliances ?

Accords

L'allié privilégié reste l'URSS. New Delhi reconnaît le nouveau régime en Afghanistan vingt-quatre heures seulement après les Soviétiques, et offre à Kaboul une aide de 170 000 francs pour son développement industriel. L'Inde passe un accord avec l'Iraq, qui lui prêtera 2,75 milliards de francs, correspondant à une livraison de 2,7 millions de tonnes de pétrole par an que l'Inde remboursera au très faible taux de 2 % à court terme (cinq ans) et en machines.

Une délégation soviétique de 140 membres débarque à New Delhi en novembre 1973. À sa tête, Leonide Brejnev. Il signe avec Indira Gandhi un accord de coopération de quinze ans qui doublera presque les échanges commerciaux entre les deux pays ; 38 % de l'acier et 80 % des machines sont produits en Inde grâce à une participation industrielle soviétique, fait savoir Moscou. Dans le domaine des techniques modernes, c'est aussi grâce aux techniciens soviétiques que circulera en 1979 le premier métro indien (celui de Calcutta) et que sera lancé, en décembre 1974, à l'aide d'une fusée soviétique, le premier satellite.