Le repli sur les intérêts purement nationaux est encouragé par les déceptions accumulées et les difficultés rencontrées dans les relations avec l'Amérique comme avec l'URSS et aussi dans la Communauté européenne. L'entracte électoral, puis la phase d'attentisme – pour ne pas dire d'immobilisme – qui suit, comme il est classique, une telle consultation, la politique intérieure de fermeté proclamée et une sorte d'hésitation dans l'ambiguïté achèvent de donner une impression temporaire de réserve, d'attente et même d'absence.

Pour les dirigeants politiques, c'est déjà la perspective de la prochaine grande échéance, l'élection présidentielle de 1976, qui accapare l'attention et dicte les évolutions. On l'a bien vu à travers l'évocation des élections législatives. On le voit bien davantage encore lorsqu'il devient évident aux yeux de tous, à la fin de mai, que G. Pompidou connaît de sérieux ennuis de santé. En dépit du secret et du silence qui recouvrent cette délicate question, le visage empâté, la fatigue et la rapide transformation de la silhouette du président de la République alertent, à la télévision, les moins informés. Les candidats éventuels à sa succession s'interrogent, révisent en hâte leur tactique, retiennent leurs partisans. Fondée ou non, l'inquiétude pour la santé du président modifie les données du problème intérieur et domine cette fin d'année politique.

Quant aux Français, c'est bien l'énorme remue-ménage des consciences et des cœurs, la rapide transformation des systèmes de vie, la profonde remise en cause des traditions, des jugements, des hiérarchies qui les occupent et même les accaparent. Loin des jeux du forum, des délices et des poisons du pouvoir ou de l'opposition, l'essentiel sous mille formes, en cette fin d'année 1972-73, c'est ce qu'on a appelé d'une belle formule qui signifie tout : le soulèvement de la vie.