Reliée déjà au centre ancien par de larges artères, la Villeneuve le sera sans doute plus tard par un transport en commun en site propre, du type Poma 2000, étudié par une société grenobloise de construction de remontées mécaniques, ou Aramis, expérimenté par Matra.

Pour le quartier de l'Arlequin, réel centre d'intérêt de l'entreprise, deux raisons ont conduit l'équipe pluridisciplinaire – composée d'urbanistes, d'architectes et de sociologues – chargée de l'imaginer à retenir une architecture verticale et provocante. En effet, 1 800 logements, sur un total de 2 200, sont rassemblés dans un bâtiment unique dont les proportions ont, dès sa sortie de terre, déclenché de vives réactions.

Les deux premiers quartiers – le Village olympique, sur Grenoble, et les Essarts, sur Échirolles –, de conception plus habituelle il est vrai, avaient vu le jour sans histoire.

L'un des facteurs déterminants dans ce choix a été le désir d'accroître sensiblement la densité de l'habitat pour obtenir une animation spontanée comparable à celle d'un centre-ville. Ce parti pris permettait, en outre, de libérer le maximum de surface au sol pour aménager un parc de loisirs, avec terrains de sports, aires de jeux, pièces d'eau, etc. Mais des contraintes financières liées au prix du mètre carré des HLM ont pesé sur l'esthétique et seraient en grande partie responsables des façades trop plates et du manque d'envolée de la création.

C'est donc en tenant compte de ces éléments (délibérés ou imposés) qu'a été lancé ce qui aspire à être un « vaisseau de civilisation » et non un de ces lugubres grands ensembles de banlieue, justement décriés en 1973.

Dans l'immeuble-ville, d'un développement de 1 300 m, 1 000 HLM, 400 ILN (immeubles à loyer normal) et 400 logements en accession à la propriété se trouvent distribués, sans égard de classes, le long de coursives recouvertes de moquette. Cette imbrication, qui refuse les secteurs privilégiés ou les étages préférentiels, cherche à freiner la ségrégation sociale par l'habitat. Cette intention a été reprise depuis par le ministre de l'Équipement et de l'aménagement du territoire, dans la directive qu'il a publiée au printemps de 1973.

Découlant directement de cette volonté d'amalgamer les catégories d'habitants, des appartements ont été réservés aux personnes âgées, quelques-uns aux handicapés physiques, d'autres aux étudiants ou aux immigrés célibataires. La présence de ces diverses couches sociales doit ainsi, en théorie, reconstituer le véritable tissu humain qui est l'une des caractéristiques essentielles de la ville.

Dans la pratique, les choses ne sont pas allées tout à fait ainsi, et l'éventail n'est pas aussi diversifié qu'il avait été souhaité au départ. Certes, des cadres ont apprécié les spacieux appartements ILN construits en général en triplex, et dont certains sont prolongés par de vastes terrasses. Mais les travailleurs à faibles revenus restent par trop absents des logements sociaux dont le coût – loyer et charges – s'est tellement élevé qu'ils leur sont devenus inaccessibles. Des critiques sont aussi venues de la dimension des chambres ou de la mauvaise insonorisation de certaines HLM.

La concentration et le panachage des habitants ne sont pas les seuls facteurs qui peuvent contribuer à faire du quartier de l'Arlequin une cité heureuse. La rue piétonnière, bordée de commerces, qui serpente au rez-de-chaussée, est là pour faciliter encore le brassage de population. Elle marque aussi la frontière entre les voies de desserte, les parkings, les silos à voitures et le parc de 12 ha.

Pour accentuer son caractère de lieu de rencontre obligatoire, les urbanistes ont tenu à y greffer tous les équipements collectifs – écoles, salles de sports, foyer des personnes âgées, maison médicale, centre social, etc. –, les mettant ainsi à la portée directe des usagers.

C'est précisément dans les structures de ces équipements que réside la véritable originalité de l'Arlequin, fruits d'une recherche de spécialistes à laquelle ont été associés des usagers.