La 7e partie (mardi 25) est sans histoires. Des escarmouches assez vives autour de la variante du pion empoisonné (la Sicilienne, gambit de Göteborg) mènent à une position complexe à l'avantage du challenger. Mais celui-ci rate le gain au 31e coup et doit se contenter d'un résultat nul, d'une fort belle façon arraché par Spassky. Score 4-3 en faveur de Fischer.

Dans la 8e partie (jeudi 27), c'est le contraire : à l'excellent jeu positionnel de Fischer, Spassky oppose une résistance médiocre, commet quelques bévues et abandonne au 37e coup. Fischer 5-Spassky 3.

Le champion du monde, légèrement souffrant, obtient un repos de deux jours.

Entre-temps l'Américain avait formulé plus de 15 réclamations nouvelles. Il fit remplacer, entre autres, l'échiquier en marbre par un simple jeu en bois, repoussa toutes les offres de film et télévision, changea plusieurs fois d'hôtel, de voiture, et refusa formellement à la Chester Fox de retransmettre les parties. Cela priva les organisateurs d'une recette de 100 000 dollars.

La 9e partie (mardi 1er août) est rapidement nulle. Score : Fisher 5,5-Spassky 3,5.

En revanche, la 10e (jeudi 3) illustre une splendide attaque de Fischer et se termine par l'abandon de Spassky au 56e coup. Score : F 6,5-S 3,5.

Surprise

Les jeux sont faits, pense-t-on en Islande et dans le monde occidental.

La 11e partie (dimanche 6) devait pourtant fournir une surprise de taille. Renouvelant la variante du pion empoisonné, les deux antagonistes engagent dès le début un combat à couteaux tirés. Fischer, trop confiant, laisse enfermer sa dame par une curieuse manœuvre de Spassky au 14e coup, réfléchit plus longuement que de coutume, se débat comme un diable mais ne peut éviter la défaite. Score : F 6,5-S 4,5.

L'espoir renaît dans le camp soviétique et cette partie éclair redonne à Spassky le moral nécessaire.

La 12e partie (mardi 8) semble confirmer cette opinion. Longue et dure, bien jouée de part et d'autre, elle se termine au 56e coup par un résultat nul.

La pathétique

Le score est donc à la mi-temps de 7-5 en faveur de Fischer. Celui-ci se promet désormais de jouer serré, et la seconde phase de la confrontation – où le facteur psychologique joue autant que la technique pure – évolue inexorablement dans le sens prévu par l'Américain.

La fameuse 13e partie (jeudi 10) – la pathétique – un combat long et pénible, riche en situations paradoxales, est le sommet du drame.

Épuisé par un effort surhumain, dominé sans relâche par son implacable rival, Spassky rate juste avant la fin, après neuf heures de jeu, l'unique voie de sauvetage. Score : F 8-S 5.

Cette nouvelle victoire de Fischer est décisive. Tous les assauts de Spassky – lequel, débarrassé d'un complexe pesant, commence à jouer avec beaucoup d'élan, comme s'il était lui-même le challenger – sont brisés par la résistance précise et active de l'Américain.

Les sept parties suivantes sont toutes nulles bien qu'âprement disputées.

À l'issue de la 13e partie, Spassky, souffrant, obtient, selon le règlement, un nouveau repos. Sa femme, Clarissa, est arrivée de Moscou.

Dans la 14e partie (mardi 15), Spassky, encore éprouvé par le résultat de la précédente, commet dans une bonne position une erreur inexplicable au 27e coup et doit se contenter d'un résultat nul. Score : F 8,5-S 5,5.

La 15e partie (jeudi 17) est une vive empoignade qui finit par un armistice inévitable. Score : F 9-S 6.

La 16e partie (dimanche 20) fut théoriquement intéressante, les noirs (Spassky) montrant la meilleure méthode à employer contre la variante d'échange de la Lopez chère à Fischer. Nulle après sept heures de jeu. Score : F 9,5-S 6,5.

Hypnotisme

À la veille de la 17e partie, une nouvelle sensationnelle se répand dans le public. L'imposante délégation soviétique, intriguée par le comportement pour le moins inhabituel de leur représentant, croit à une influence hypnotique de Fischer et accuse son fauteuil de receler un laser. En même temps, dans la lettre signée par Geller, il est fait mention de substances chimiques éventuellement cachées dans l'énorme lustre éclairant l'estrade.