Soigner les cardiaques, d'accord. Mais dissuader les bien-portants de le devenir, n'est-ce pas préférable ?

Relance des greffes du cœur

Deux transplantations cardiaques ont été effectuées en France au début de 1973 (professeur Guilmet à Paris, professeur Marion à Lyon). Les tentatives se sont soldées par la mort du malade (quelques jours après dans un cas et trois semaines après dans l'autre).

Ces transplantations ont fait rebondir les polémiques. Dans l'esprit des chirurgiens qui les ont proposées, comme dans celui des patients qui les ont acceptées, cette opération est licite quand chacun connaît les risques encourus.

Une des raisons qui ont déterminé les chirurgiens français est la publication des statistiques du chirurgien américain Norman Shumway (Palo Alto, Californie). Sur 50 greffes cardiaques réalisées par son équipe et lui-même depuis quatre ans, un opéré sur deux a passé le cap de la première année de vie avec l'organe greffé et a pu reprendre une activité normale. Par ailleurs, plusieurs opérés vivent depuis plus de trois ans avec leur nouveau cœur.

À cette statistique, Shumway et son collaborateur Eugène Dong ont ajouté une précision essentielle : en comparant les résultats de la greffe chez leurs malades opérés avec les résultats d'un traitement uniquement médical entrepris sur une série de grands malades cardiaques, justiciables eux aussi d'une greffe, mais chez qui elle n'avait pu être effectuée pour différentes raisons, ils ont constaté que les non-greffés n'ont bénéficié, en moyenne, que d'une survie d'un mois. Un mois ou deux ans ? À gravité égale des cas, la durée joue en faveur de la greffe.

Le professeur Guilmet réalise une nouvelle transplantation sur un homme de 26 ans souffrant de cardiomyopathie (altération progressive du muscle cardiaque). La 4e greffe du professeur Guilmet – la 14e en France – a lieu à l'hôpital Foch, à Suresnes, le 10 juin, sur un homme de 48 ans. L'état de ces deux opérés s'améliorait régulièrement fin juin.

Bilan de la recherche sur le virus du cancer

La présence d'un virus dans certains cancers animaux ne fait aucun doute ; mais où en est-on exactement chez l'homme ? Depuis deux ans, quatre séries de travaux semblent apporter de sérieux arguments en faveur de l'étiologie virale de certains cancers humains. Deux équipes de chercheurs (D. L. Morton et Léon Dmochovski) ont retrouvé des particules virales à ARN de type C dans des cultures de cellules de sarcomes humains.

Des particules de type A ont été décelées dans des cultures semblables par D. L. Morton, Todaro, Zeve et Aaronson, tandis qu'E. Priori découvrait des particules de type C et B dans des cultures de cellules de lymphomes humains, et Todaro des particules de même type dans des cultures de cancer du sein.

Héréditaire

Dan H. Moore (New Jersey), Michael J. Brennan (Detroit) et Satyavati M. Sirat (Bombay) ont établi, de leur côté, qu'un fort pourcentage d'échantillons de lait de femme contenait des particules virales dont la forme est exactement semblable à celles qui sont trouvées dans les tumeurs mammaires de la souris. En outre, ces particules (de type B) étaient observées le plus fréquemment chez des femmes ayant des antécédents de cancer du sein dans leur famille – notamment chez celles dont la mère avait présenté une tumeur maligne du sein. Pour Dan H. Moore, cette découverte appuie l'hypothèse d'une origine virale du cancer mammaire de la femme et de la transmission du virus (de mère à fille) par le lait. Dans ce cas précis, il ne s'agit encore que d'une hypothèse de travail : en mars 1973, aucune preuve formelle établissant une relation de cause à effet entre ces particules virales B et le cancer du sein n'avait pu être obtenue, malgré la multiplication des recherches biologiques et immunologiques à ce sujet.

EFMU

Lors du 58e congrès de l'American College of Surgeons (San Francisco, février 1973), Elwin E. Fraley et Arthur Y. Elliott ont mis en lumière la présence d'un virus à ARN de type C chez 7 hommes opérés de tumeurs cancéreuses de l'appareil urinaire. Coïncidence... ou virus passager ? On peut se poser la question. Fraley et Elliott ont observé que ce virus, baptisé EFMU (Elliott, Fraley and Minnesota Urology), ne présente aucune ressemblance avec les virus déjà identifiés dans certaines tumeurs humaines, et son comportement, en milieu de culture, le rapproche curieusement des virus cancérogènes à ARN couramment utilisés en expérimentation animale.