Les deux tiers du pays sont très gravement touchés par la sécheresse, qui provoque la crise alimentaire la plus grave depuis la famine de 1965. La production de céréales, selon F. Ahmed, ministre de l'Agriculture, ne dépassera pas 100 millions de tonnes (contre 104 en 1971 et 108 en 1970, année-record). Une fois les stocks épuisés, le gouvernement doit importer 4 millions de tonnes pour éviter la disette (pour 1,8 milliard de F, 36 % des réserves de change).

Le prix des denrées en général augmente de 15 % dans le pays ; celui du lait et du riz double en moins d'un an, comme le prix de l'essence et de l'électricité. L'insuffisance des pluies a une autre conséquence : la baisse de la production d'électricité. La consommation est rationnée. On estime la perte subie par l'industrie à 120 millions de F par mois.

Beaucoup d'usines tournent à moitié de leur régime, alors que le pays enregistre sa plus forte proportion de chômeurs : 50 millions, le quart de la population active. Les raisons ne manquent pas : pénurie d'énergie, défaut d'approvisionnement en matières premières, mauvaise gestion et perte de 15 millions de journées de travail (grèves et fermetures d'usines). Amorcée par la pression des millions de réfugiés, une double inflation s'est développée : par la hausse des prix et par l'insuffisance de la production. La valeur de la roupie diminue de moitié. Toute amélioration du niveau de vie est stoppée.

C'est un bilan plutôt négatif que l'Inde présente lors du 25e anniversaire de son indépendance, le 15 août 1972, malgré quelques sujets de satisfaction. Un Indien sur 3 sait lire aujourd'hui (un sur 10 en 1947). La durée moyenne de la vie a progressé de 32 à 52 ans. Une pratique controversée, les stérilisations (1,6 million en 1971 et 1972), porte ses fruits ; le taux des naissances s'établit à 2,1 % en 1972, au lieu de 2,4 % précédemment.

Soixante-cinq pour cent des céréales importées (1,3 million de t) proviennent des États-Unis. Les deux pays ont repris le dialogue interrompu en décembre 1971 avec l'arrêt de l'aide au développement. Son rétablissement permet à l'Inde de recevoir pour 450 millions de F de produits de première nécessité.

Diplomatie

« Le Tibet fait partie de la Chine », déclare, le 16 novembre 1972, le ministre des Affaires étrangères, S. Singh, qui multiplie les clins d'œil vers Pékin, avec qui Delhi cherche aussi à normaliser ses relations.

L'URSS demeure le meilleur partenaire de l'Inde. Elle importera pour 1,6 milliard de F de produits indiens en 1973. Le nouvel accord signé en novembre à New Delhi prévoit une augmentation des échanges commerciaux (2,6 milliards de F) de 20 %. Comme les Américains, mais à une plus grande échelle, les Soviétiques fourniront ce qui fait le plus défaut aux Indiens : matières premières industrielles, engrais, produits pétroliers.

Organisatrice de la 3e foire asiatique, Asia (début 1973), rétablissant l'ordre au Sikkim, freinant les ardeurs du Bangla Desh et déclarant tendre la main au Pakistan, l'Inde parle désormais, tout en s'en défendant, comme la première puissance de l'Asie du Sud-Ouest.

Séparatismes

Les particularismes, réveillés par l'accession du Bangla Desh à l'indépendance, prennent une nouvelle vigueur à ses frontières (Nagaland et Assam), ainsi qu'au sud-est de la péninsule, en Andhra Pradesh. Les Andhras de la côte protestent contre les privilèges des gens du plateau, le Telengana, et demandent la création de deux États séparés. Les heurts avec les forces de l'ordre font 55 morts. Mme Gandhi s'oppose à la séparation, craignant qu'elle ne fasse boule de neige. Elle concède seulement l'abolition graduelle des privilèges et fait passer l'administration de l'État sous le contrôle de New Delhi.

Le printemps 1973 est chaud. Au Bihar, en Uttar Pradesh, au Maharashtra, la foule affamée pille des magasins ; au Penjab et au Bihar, la police tire sur des étudiants. En Uttar Pradesh, l'État d'où est originaire I. Gandhi, plusieurs milliers de policiers font cause commune avec des étudiants révoltés. L'armée écrase la mutinerie après trois jours d'affrontements ; 40 policiers sont tués, 1 000 limogés. Partout les étudiants dénoncent un système d'éducation inadéquat : l'Inde compte 578 000 diplômés au chômage.