En outre, au niveau national, les initiatives de la CFDT et de la CGT en faveur de rabaissement de l'âge de la retraite ont eu un énorme retentissement et un succès relatif mais réel.

Face à ces luttes sociales, le gouvernement et les employeurs font preuve d'un aussi grand dynamisme. Côté pouvoirs publics, en plus des textes sur la formation professionnelle, le bilan législatif est assurément considérable.

Côté employeurs, malgré la concurrence et le poids des charges sociales, de nouveaux pas sont franchis pour accélérer la mensualisation, réduire la durée du travail, maintenir un taux élevé de progression du pouvoir d'achat (en un an le salaire effectif moyen de la métallurgie parisienne progresse de 11,3 % ; le pouvoir d'achat du salaire horaire ouvrier passe de l'indice 141,6 à 148) et entamer progressivement une négociation d'ensemble sur l'amélioration de la condition des personnes âgées.

Dans la métallurgie, deux importants accords témoignent de cette politique conventionnelle active :
– l'accord du 25 avril 1972, qui concerne 1 650 000 travailleurs, est signé par l'ensemble des syndicats et prévoit le calendrier suivant de réduction des horaires avec une compensation à 125 % :
au plus tard le 1er septembre 1972 : 1 heure pour les horaires de 47 heures et plus, 1/2 heure pour les horaires entre 47 et 44 heures ;
au plus tard le 1er décembre 1972 : 1/2 heure pour les horaires compris entre 43 heures 30 et 44 heures ;
au plus tard le 1er mars 1973 : 1/2 heure pour les horaires compris entre 47 et 44 heures ;
– la convention collective nationale signée le 13 mars 1972 et concernant 138 000 ingénieurs et cadres de la métallurgie est la première convention nationale signée au niveau de la métallurgie, la profession ayant toujours renvoyé la négociation au niveau régional et local. Le texte codifie de façon contractuelle l'ensemble des dispositions relatives au contrat de travail, à son exécution, aux classifications et aux rémunérations.

Perspectives

Le propre des sociétés industrielles est de susciter plus de revendications qu'elles n'en satisfont. Même si le bilan des négociations collectives dans les secteurs public et privé est loin d'être négligeable, l'inventaire des problèmes en suspens demeure considérable.

– Autour du débat sur la qualité de la vie, le problème des OS sera sans doute un problème majeur dans les années à venir. La CGT, le CNPF et les pouvoirs publics l'ont mis à l'étude en 1971-72. Si la CGT met en doute la possibilité de rendre plus attrayant le travail des OS, le CNPF a décidé de mettre ce thème à l'ordre du jour de ses assises de Marseille.

Un premier rapport, s'inspirant des réalisations expérimentées chez Volvo en Suède ou chez Fiat en Italie, incite déjà les chefs d'entreprise à une attitude plus ouverte. Le rapport Delamotte, préparé par un haut fonctionnaire à la demande du ministre du Travail, tout en étudiant certaines expériences de recomposition des tâches et d'autocontrôle dans quelques entreprises françaises et étrangères, renvoie aux partenaires sociaux le soin de réorganiser les structures du travail.

– C'est avec beaucoup de réserves que les syndicats ont accueilli le nouveau rapport Chalendar sur l'aménagement des temps de travail, la CFDT ayant même refusé de participer au Groupe de travail créé par le Premier ministre. Centré sur l'idée du libre choix des horaires de travail autour d'une plage fixe d'horaires, le système est assurément créateur de liberté. Mais les syndicats manifestent des craintes à propos des heures supplémentaires (y aura-t-il report et compensation des horaires d'une semaine à l'autre ?), des accidents de trajet et surtout des conditions d'exercice du droit syndical (possibilités à propos du droit de réunion).

– Les études sur le rôle de la maîtrise et des cadres ne sont pas encore sorties du cercle étroit des spécialistes. Mais déjà le Centre de recherche des chefs d'entreprise (CRC) s'interroge sur leur avenir. Les méthodes de gestion nouvelles, l'institution de réseaux d'interlocuteurs parallèles (syndicats, délégués), la multiplication des fonctionnels dépouillent la maîtrise et les cadres de leur autorité à un moment où la pression de la base se fait plus forte à la fois pour contester et réduire l'éventail des salaires. N'est-ce pas là qu'éclatera la nouvelle crise sociale de demain ?