La plupart des revendications formulées par les responsables portent cependant sur les crédits. Devenues, le 1er janvier 1972, propriétaires de leurs bâtiments et de leurs locaux, les universités se heurtent à des problèmes nouveaux. Plusieurs grèves, manifestations, réunions d'information sont organisées, notamment à Orléans, Tours, Nancy, Aix, Vincennes, Paris-VII, pour dénoncer l'insuffisance des postes, des locaux et surtout des subventions. À Rennes, le début des cours est différé de plusieurs semaines. Après le refus de plusieurs conseils d'université de voter leur budget pour la rentrée 1971, le Conseil national de renseignement supérieur et de la recherche s'abstient, au mois de novembre, en signe de protestation, de répartir les crédits de fonctionnement et les postes d'enseignants pour la rentrée 1972. En décembre, plusieurs conseils, au moment d'examiner leurs prévisions budgétaires, manifestent leur inquiétude.

À l'université de Vincennes, d'autre part, une grève des vacataires de l'administration, commencée le 1er juin 1971, prend fin le 9 décembre : les protestataires obtiennent que les dix-neuf travailleurs préposés au nettoyage des locaux soient engagés sur le budget propre de l'université et non par le biais d'un contrat avec une société extérieure. L'incident est l'occasion d'un affrontement entre gauchistes, partisans des grévistes, et communistes ou sympathisants, dirigeants de l'université.

D'autres mouvements surviendront dans plusieurs établissements au cours de l'année 1972. En mars, une grève est déclenchée à l'École des beaux-arts. Les étudiants entendent protester contre l'arrestation d'un enseignant. La fermeture de l'établissement, le 10 mars, par le ministre des Affaires culturelles, après dix jours de grève, provoque de nombreuses protestations. En avril, des incidents entraînent, à deux reprises, la fermeture du Centre Censier. Des manifestations pour sa réouverture conduisent à de violents affrontements entre les étudiants et les forces de l'ordre.

En médecine, les étudiants de deuxième, troisième et quatrième année du deuxième cycle manifestent à plusieurs reprises contre l'insuffisance du nombre des postes hospitaliers (substitués depuis 1968 à l'ancien externat). Le ministère reconnaît que près de 2 000 postes de fonctions hospitalières manquent en 1971-72.

Second objectif d'Olivier Guichard : la mise en œuvre de la politique des enseignements supérieurs. Le gouvernement se propose de favoriser l'adaptation de l'Université aux besoins de l'économie, afin d'offrir aux étudiants l'assurance de débouchés professionnels.

À cette fin, le ministère entend à la fois diversifier, dans les différents secteurs de l'enseignement supérieur, les filières de formation et limiter l'accès à certaines d'entre elles. Cependant, O. Guichard semble plus pressé d'appliquer les décisions correspondant à cette seconde orientation : ses adversaires lui reprochent de mettre en place des mesures de sélection avant de développer d'éventuelles structures d'accueil.

La sélection en médecine

C'est le cas en médecine : l'application de la loi votée le 30 juin par l'Assemblée nationale (Journal de l'année 1970-71), qui établit une sélection à la fin de la première année du premier cycle, entraîne, au cours du premier trimestre, de nombreuses actions de protestation.

Déclenché le 24 novembre par des étudiants du CHU de la Pitié-Salpêtrière, un mouvement de grève gagne bientôt les autres CHU de la région parisienne, avant de s'étendre aux centres de province. Plusieurs manifestations réunissent à Paris quelques milliers d'étudiants les 3 et 6 décembre. Plusieurs actions ont lieu en province dans le courant du mois de décembre.

Les protestataires demandent que « la limitation du nombre d'étudiants ne soit pas fondée sur la pénurie des postes hospitaliers, mais sur la valeur des étudiants et les besoins réels de médecins en France ».

O. Guichard soutient que « les accusations de malthusianisme sont dénuées de fondement » et que les générations déjà en cours d'études vont apporter « une très forte contribution à l'amélioration de la densité médicale ». Les mesures de limitation, ajoute-t-il, doivent « permettre à tous les étudiants de se former par l'exercice effectif d'une activité hospitalière ».