RÉSOLUTION ALBANAISE qui exigeait en même temps l'expulsion de la Chine nationaliste et l'admission de la Chine populaire : approuvée par 76 voix contre 35, 17 abstentions et 3 absents.

76 ont voté pour : Afghanistan, Albanie, Algérie, Autriche, Belgique, Bhoutan, Biélorussie, Birmanie, Botswana, Bulgarie, Burundi, Cameroun, Canada, Ceylan, Chili, Congo-Brazzaville, Cuba, Danemark, Égypte, Équateur, Éthiopie, Finlande, France, Ghana, Grande-Bretagne, Guinée, Guinée équatoriale, Guyane, Hongrie, Inde, Irak, Iran, Irlande, Islande, Israël, Italie, Kenya, Koweit, Laos, Libye, Malaisie, Mali, Maroc, Mauritanie, Mexique, Mongolie, Népal, Nigeria, Norvège, Ouganda, Pakistan, Pays-Bas, Pérou, Pologne, Portugal, Roumanie, Ruanda, Sénégal, Sierra Leone, Singapour, Somalie, Soudan, Suède, Syrie, Tanzanie, Tchécoslovaquie, Togo, Trinidad et Tobago, Tunisie, Turquie, Ukraine, URSS, Yémen, Yémen du Sud, Yougoslavie, Zambie.

35 ont voté contre : Afrique du Sud, Arabie Saoudite, Australie, Bolivie, Brésil, Cambodge, Costa Rica, Côte-d'Ivoire, Dahomey, États-Unis, Gabon, Gambie, Guatemala, Haïti, Haute-Volta, Honduras, Japon, Lesotho, Liberia, Madagascar, Malawi, Malte, Nicaragua, Niger, Nouvelle-Zélande, Paraguay, Philippines, République centrafricaine, république Dominicaine, Salvador, Swaziland, Tchad, Uruguay, Venezuela, Zaïre.

17 se sont abstenus : Argentine, Bahreïn, Barbade, Chypre, Colombie, Espagne, Fiji, Grèce, Indonésie, Jamaïque, Jordanie, Liban, Luxembourg, Maurice, Panama, Qatar, Thaïlande.

3 absents : Oman, les îles Maldives et la Chine nationaliste dont la délégation avait quitté la salle avant le scrutin.

Bombe diplomatique

Après la diplomatie du Ping-Pong, qui avait ouvert la voie, la plus énorme surprise de l'année éclate le 15 juillet 1971 : l'annonce, faite à Pékin par un communiqué et à Washington par Richard Nixon lui-même sur les écrans de la télévision, d'une prochaine visite en Chine du président américain. Avant mai 1972.

Cette annonce s'accompagne d'une révélation aussi surprenante : le séjour clandestin à Pékin, entre le 9 et le 11 juillet, du conseiller de la Maison-Blanche, Henry Kissinger, qui apparaît de plus en plus comme le no 1 de la diplomatie américaine, les tâches ingrates revenant au secrétaire d'État William Rogers chargé d'annoncer, dès le début du mois d'août, que, pour la première fois, les États-Unis voteront pour l'admission à l'ONU de la Chine populaire, mais s'opposeront à l'expulsion de la Chine nationaliste.

Vote historique

Rejetée par l'une et l'autre, cette politique dite des deux Chines court d'avance à un échec spectaculaire qui va marquer le déclin de l'influence américaine sur l'ONU.

Le 25 octobre, la 26e assemblée générale repousse, par 59 voix contre 55 et 15 abstentions, la résolution américaine qui réclame une majorité des deux tiers pour l'éventuelle expulsion de la Chine nationaliste. Sans attendre la suite, facile à prévoir, la délégation de Formose dénonce la trahison de la Charte et quitte la salle silencieuse qui, aussitôt, attaque le second scrutin sur la résolution albanaise.

Soutenue par une vingtaine de pays, elle réclame « le rétablissement de la République populaire de Chine dans tous ses droits » et « l'expulsion immédiate des représentants de Tchang Kaï-chek du siège qu'ils occupent illégalement ». Malgré sa vigueur, le texte est adopté par 76 voix contre 35 et 17 abstentions.

Double défaite plus cuisante encore pour William Rogers, effondré, qui parle de trahison. Malgré les pressions et les promesses (dont certaines chiffrées, dit-on), la masse des lâcheurs a grossi d'un vote à l'autre. Le vent de l'Histoire pousse même l'assemblée générale, qui vient de rejeter l'obligation de la majorité des deux tiers, à s'offrir le luxe de dépasser cette majorité pour accueillir Pékin et expulser Formose. Alors, dans la salle des séances, éclate une joie sans précédent : bravos, embrassades et même ballets improvisés par quelques délégués du tiers monde.

Explosion à la mesure d'une longue attente : depuis 1951, chaque année, tout scrutin sur l'admission de la Chine populaire s'est régulièrement soldé par un échec. Il a fallu vingt années de persévérance pour déboucher sur ce succès qui va déclencher une nouvelle vague de reconnaissance de la Chine populaire par de nombreux pays jusque-là hésitants.

Le jeu Kissinger

La déception de W. Rogers n'a d'égale que la jubilation de H. Kissinger. Il apprend la nouvelle juste avant de quitter Pékin où il est revenu discrètement, mais officiellement cette fois, préparer le voyage de Nixon.