Néanmoins, un accord militaire est signé à la mi-avril entre le Soudan et la Chine. Selon la presse libanaise, Khartoum serait la première capitale arabe à recevoir de la Chine des Mig 17 et des chars.

L'aide de plusieurs puissances occidentales, d'États arabes conservateurs, permet au général Nemeiry de se détacher du camp de l'Est. Le chef de l'État, qui prend nettement ses distances de l'Union des républiques arabes, à laquelle il avait promis d'adhérer, et en particulier de l'Égypte, qu'il considère comme inféodée à l'URSS, se rend à deux reprises en Arabie Saoudite, dans les principautés du golfe Persique, et obtient prêts et dons en espèces.

La Grande-Bretagne accorde un crédit de 10 millions de livres sterling, les États-Unis — dont les relations diplomatiques sont rompues avec Khartoum depuis la guerre des Six-Jours — octroient des facilités pour l'achat de blé, lèvent l'embargo exercé par la banque import-export, dépêchent à Khartoum des émissaires porteurs de messages du président Nixon. Le Fonds monétaire international, la Roumanie, les pays scandinaves contribuent, à des degrés différents, aux projets de développement. La République fédérale allemande, avec laquelle le Soudan rétablit ses relations diplomatiques le 23 décembre, accorde à son tour, le 6 mars, un prêt de 6,6 millions de livres sterling ainsi qu'une assistance technique.

Cessez-le-feu

Le général Nemeiry, décidé à mettre fin coûte que coûte à la guerre contre les sudistes, parvient à établir des relations confiantes avec les États limitrophes du Soudan, qui servent de tremplin ou de refuge aux insurgés.

L'empereur Hailé Sélassié, en particulier, joue un rôle de premier plan dans les contacts secrets qui se nouent dès décembre entre les représentants de Khartoum et ceux du colonel Lagu, l'un des principaux chefs de la rébellion. Le Vatican ainsi que certaines puissances occidentales interviennent discrètement mais fermement pour pousser ce dernier à composition. Le colonel Lagu renonce à son exigence d'indépendance pour les trois provinces sudistes. Les négociations officielles, engagées le 15 février 1972 à Addis-Abeba, aboutissent à un compromis le 23.

Le cessez-le-feu entre en vigueur le 6 mars, et la ratification des accords intervient le 27, à Addis-Abeba, en présence de l'empereur. La visite à Khartoum, le 3 avril, du colonel Lagu consacre la réconciliation des nordistes et des sudistes après une guerre fratricide qui avait duré plus de quinze ans.

Autonomie

Les accords d'Addis-Abeba prévoient notamment l'autonomie du Bahr el-Ghazal, de l'Equatoria et du Haut-Nil, avec Juba comme capitale. Pendant une période transitoire de cinq ans, les forces armées stationnées dans le Sud seront composées à parts égales d'éléments du Nord et du Sud : 12 000 hommes au total, dont les membres sudistes seront recrutés parmi les anciens rebelles.

Avant août 1973, une assemblée régionale devrait être élue ; elle serait investie du droit de légiférer dans les domaines de l'éducation, de la santé et du bien-être social. Elle aurait également la haute main sur l'organisation de la police, l'administration pénitentiaire et le maintien de l'ordre dans la région. Le pouvoir exécutif serait confié à un conseil supérieur dont le président serait nommé par le chef de l'État. Le budget du Soudan du Sud sera financé par la perception des taxes locales et par des fonds spéciaux venant du gouvernement central.

Les accords prévoient, enfin, que l'assemblée régionale pourra, sous réserve du consentement du chef de l'État, s'opposer à l'adoption ou à la mise en application de toute loi votée par l'Assemblée nationale qu'elle estimera contraire aux intérêts du Soudan du Sud.

La politique d'apaisement ainsi appliquée, les nouvelles amitiés que noue Khartoum sur la scène internationale renforcent apparemment les assises du régime. Mais le général Nemeiry, proclamé le 12 octobre président de la République — le premier que se donne le Soudan depuis l'indépendance — à la suite d'un référendum, s'attire de nombreuses inimitiés. Ses anciens camarades du Conseil de la révolution, dont il a éloigné la plupart des affaires de l'État, lui reprochent son attitude autocratique.