Ce n'est pas, tant s'en faut, le seul. La région a bien du mal a trouver son unité : l'Yonne est attirée par Paris, qui n'est plus qu'à deux heures par l'autoroute, et à qui elle sert de réserve de week-end ; la Saône-et-Loire, elle, regarde vers Lyon, tandis que la Nièvre se rapproche du Val de Loire. Sens ou Nevers sont bien éloignés de la capitale régionale, Dijon, à laquelle nulle liaison routière privilégiée ne les relie. Malgré ses succès industriels, la Bourgogne constitue toujours une région en miettes.

Bretagne

« La Bretagne doit-elle attendre l'échec, dès maintenant prévisible, de l'urbanisation des régions industrialisées pour se lancer dans une forme d'urbanisation nouvelle, exploitant la proximité de la mer et de la campagne ? » Cette question donne son ton au livre blanc publié, en mars 1971, par le CELIB, sous le titre : Bretagne, une ambition nouvelle.

Il s'agit, à l'opposé du gigantisme parisien, de sauver le cadre de vie là où il existe encore et d'appuyer le développement économique sur tout un réseau de villes moyennes et petites, dynamiques, mais à l'échelle de l'homme. Il s'agit, aussi, de ne pas copier le triste exemple de ce qui se fait ailleurs, avec le cortège d'embouteillages, d'exodes hebdomadaires et d'angoisse humaine, et de retrouver ce qui fait l'originalité de la Bretagne.

Face aux trois grands centres de Nantes, Rennes et Brest, devraient se développer des agglomérations regroupant de 50 000 à 300 000 habitants. Huit sites sont retenus par le livre blanc : Dinan - Dinard - Saint-Malo, Saint-Brieuc - Lamballe, Lannion - Guingamp, Morlaix, Quimper, Lorient, Vannes - Auray, Redon et la basse Vilaine.

Ces agglomérations engloberaient des petits centres ruraux, voués au double rôle de satellite de la ville principale et d'animateur des campagnes menacées d'isolement total. Ainsi se réaliserait un continuel échange entre la ville et la campagne, favorisé par la réhabilitation du pays, premier échelon permettant le dialogue avec la future autorité régionale et qui déciderait de la plupart des investissements locaux. Dans cette optique, la région apparaîtrait sous la forme d'une fédération de pays, comme le Trégor, le Poher, etc.

À plus long terme, le département aurait vécu... Mais il n'est pas sûr que le feu vert donné par deux ministres, René Pleven et Raymond Marcellin, à la publication du livre blanc du CELIB suffise à faire entrer dans la vie des idées aussi audacieuses.

Centre

De Gien à Chinon, en passant par Orléans, Blois et Tours, c'est la Loire moyenne, une étroite bande de terre de 250 km de long, desservie par la Loire, la vole de chemin de fer et, dans quelques années, l'autoroute A 10 Paris – Poitiers. Pour les experts parisiens, c'est une zone d'appui dans le cadre du Bassin parisien ; pour les responsables de la CODER (Commission de développement économique régional), la Loire moyenne doit aussi constituer « l'épine dorsale de la région Centre, assurant le développement des six départements ».

Dans ce dessein, les techniciens de l'OREALM (Organisation d'études et d'aménagement de la Loire moyenne) ont élaboré, en 1971, un livre blanc visant à éviter l'urbanisation désordonnée et continue de la rue sans joie qui, par exemple, relierait sur 60 km Blois à Orléans. Le schéma proposé par l'OREALM vise à favoriser un développement urbain discontinu par le maintien de zones non construites et de vastes espaces verts. Il s'agit de réaliser, de Gien à Chinon, la métropole jardin, constituée d'un ensemble de villes nettement différenciées ; séparées par des espaces non urbanisés, mais rattachées les unes aux autres par des liaisons faciles et fréquentes, par route et par fer, elles se partageraient un certain nombre de services pouvant desservir la totalité de cet ensemble. Un objectif qui, tout en préservant le charme des bords de la Loire, permettrait la réalisation d'un marché de l'emploi dans une zone qui intéresse un marché de plus de 700 000 personnes.

Champagne

Ford n'est pas venu dans les Ardennes en cet été 1970 où on l'attendait impatiemment. L'usine de construction de boites de vitesses automatiques ne sera pas créée dans l'agglomération de Charleville-Mézières, mais à Bordeaux. Décision du deuxième constructeur mondial d'automobiles qui provoqua une immense déception dans un département où le problème de l'emploi se pose en termes cuisants.