Le boycottage systématique organisé par les groupes gauchistes, mais surtout l'indifférence de la masse des étudiants expliquent cette fuite devant les urnes. Les étudiants, qui présentent des revendications au jour le jour, ne se passionnent pas pour le fonctionnement d'ensemble ou l'avenir d'une institution qui les héberge pour un temps limité.

Les pouvoirs disciplinaires, jadis confiés aux recteurs, sont passés officiellement aux mains des conseils d'université. Ce sont désormais ces instances, élues, qui ont à connaître des fautes commises par les étudiants. Toutefois, pour les enseignants, les instances disciplinaires siègent en formation restreinte (étudiants et professeurs d'un rang inférieur à ceux dont le cas est examiné sont exclus). Le maintien de l'ordre dans les locaux universitaires est passé sous la responsabilité des présidents d'université.

La mise en place des universités « autonomes et pluridisciplinaires » créées par la loi d'orientation est achevée. Mais la lenteur avec laquelle s'est effectué ce processus, les limitations (financières notamment) de cette autonomie ont fortement contribué à établir pratiquement partout un climat de désenchantement parmi les étudiants et les enseignants.

En juin 1971, le Parlement adopte, à la demande du gouvernement, certaines modifications de la loi d'orientation de l'enseignement supérieur.

Aménagements

La participation demeure la doctrine officielle. Mais le texte présenté par O. Guichard, modifié après plusieurs navettes entre les Assemblées, amoindrit sensiblement le libéralisme de la loi d'Edgar Faure.

Contrôle des connaissances : la loi votée le 30 juin met fin à la controverse née d'interprétations contradictoires de la loi d'orientation. Les études seront sanctionnées à la fois par le contrôle continu et par un examen ; il appartient au ministre de l'Éducation nationale d'en fixer les modalités, pour chaque catégorie d'établissements et d'étudiants. Le projet initial prévoyait pour chaque université le libre choix entre les trois formules : contrôle continu, examen seul ou combinaison des deux ; cette possibilité de choix devient l'exception ; elle pourra être accordée par dérogation décidée par le ministre.

Des stages d'orientation seront organisés durant l'été, pour éviter une perte de temps aux étudiants qui échouent à la fin de leur première année d'études.

Les établissements privés d'enseignement supérieur pourront désormais décerner titres et grades après avoir passé des conventions avec les universités. La sélection en médecine devient obligatoire.

Une procédure spéciale est mise en place en cas de naissance de nouvelles universités : les établissements expérimentaux qui seront créés seront autorisés à déroger à la loi d'orientation durant un certain temps.

Le syndicalisme étudiant en crise

Le syndicalisme étudiant connaît une nouvelle crise grave : divisions et scissions chez les extrémistes, perte d'audience chez les modérés.

L'UNEF (Union nationale des étudiants de France), dirigée depuis 1967 par des étudiants du PSU, éclate. En décembre 1970, ses dirigeants démissionnent en bloc devant la montée de deux oppositions internes. Celles-ci restent face à face, et on assiste à deux congrès de l'UNEF. L'un, à Dijon, porte à la direction de la première UNEF des militants trotskistes de l'AJS (Alliance des jeunes pour le socialisme) ; l'autre, à la Sorbonne, confirme l'importance de l'UNEF-renouveau, animée, entre autres, par les étudiants communistes.

Malgré leurs divisions, les deux tendances ont en commun une certaine volonté de resyndicalisation du milieu étudiant. Leurs dirigeants souhaitent revenir partiellement aux thèmes revendicatifs traditionnels, quelque peu oubliés depuis 1968 : conditions de vie et d'études, examens, bourses, etc. Cette forme de syndicalisme adaptée aux périodes de calme correspond à une tendance générale de retour au concret. Pour beaucoup, c'est la fin des illusions.

Du côté des modérés, la crise est moins apparente, mais aussi grave. La FNEF (Fédération nationale des étudiants de France), d'abord favorable à la participation, la rejette dans un second temps. Actuellement, elle semble s'orienter vers un retour à sa première prise de position. La diminution de son audience explique en partie cette évolution.