Les Apollo restant à lancer ne pouvaient donc que répéter, à quelques variantes près, les expériences déjà accomplies lors des deux premières missions lunaires.

Le directeur de la NASA rendait publique, le 4 septembre 1970, la décision de ramener à 4 le nombre des missions Apollo au lieu des 7 prévues (3 lanceurs Saturn 5 supplémentaires seront ainsi disponibles pour le programme des futures stations orbitales Skylab, dont le prototype est essayé au sol depuis janvier 1971).

Enfin, le 9 mai 1971, un lanceur Atlas-Centaur défaillant a englouti dans les eaux de l'Atlantique la sonde Mariner 8 (coût, lancement compris : 76,8 millions de dollars) qui devait être satellisée autour de la planète Mars. Cet échec a été partiellement compensé, le 30 mai, par le lancement réussi de Mariner 9. Mais les deux sondes ayant été prévues comme complémentaires, une partie des expériences au programme se trouve abandonnée.

« Apollo 14 »

Premier de la série 1971, Apollo 14 bénéficie d'améliorations par rapport à ses prédécesseurs ; elles se traduisent par un poids supplémentaire de 290 kg et une dépense de 15 millions de dollars.

Un troisième réservoir d'oxygène, un autre d'eau potable (18 litres), un accumulateur électrique et des connexions de secours permettent, en cas de besoin, de consommer dans la cabine l'énergie électrique stockée dans les accumulateurs du module lunaire. Enfin, le nouveau scaphandre lunaire comporte une prise qui permettrait à l'un des astronautes privé accidentellement d'oxygène de se brancher sur les réserves de l'autre. Cependant, la NASA prend d'autres risques : aucun des trois hommes de l'équipage n'a jamais été satellisé.

Le vaisseau Apollo 14, baptisé Kitty Hawk, est piloté par Stuart Roosa (37 ans) ; le module lunaire Antarès par Edgar Mitchell (40 ans) ; la mission est commandée par Alan Shepard (47 ans), le premier Américain lancé dans l'espace le 7 janvier 1961 (mais non satellisé, n'ayant fait qu'un bond de 30 km) ; deux quadragénaires sur la Lune.

Le lancement a lieu le 31 janvier 1971 à 22 h 3 mn 3 s et d'emblée la mission semble compromise. N'ayant jamais effectué des manœuvres d'accostage dans l'espace, Roosa doit s'y prendre à six reprises pour réussir la restructuration du vaisseau (Kitty Hawk doit se séparer du dernier étage de la fusée, faire demi-tour, puis venir s'emboîter par son sommet conique sur le raccord d'accostage du module lunaire). Manifestement Roosa, dont le rythme cardiaque a doublé (il atteint 144 pulsations) manquait d'expérience.

Le 5 février, Antarès se pose dans une région accidentée, à 25 km du cratère Fra Mauro, proche de l'équateur lunaire. Lors de leur première sortie, Shepard et Mitchell installent près du module lunaire les instruments habituels : réflecteur laser, séismomètre, trois détecteurs de particules solaires. On y ajoute cette fois un petit lance-roquettes : des charges explosant à différentes distances provoqueront des vibrations qui seront enregistrées par trois géophones et qui renseigneront sur la nature du sol lunaire.

Brouette sur la Lune

Le lendemain les deux hommes font une longue randonnée. Un magnétomètre portatif leur révèle l'existence d'un fort champ magnétique local (dû probablement à la présence d'une énorme masse ferromagnétique dans le sous-sol). Sur leur parcours, les astronautes recueillent un choix très varié de spécimens du sol, comprenant des carottes ayant jusqu'à 45 cm ; ils photographient les roches les plus intéressantes. Ils disposent d'une brouette pour traîner leur outillage et ramener les échantillons.

En fait, gravir les pentes est vite devenu si épuisant que les astronautes ont dû renoncer au but le plus important de leur mission : l'exploration du cratère du Cône, à 1 100 m du module lunaire. Après trois quarts d'heure d'efforts, et bien qu'ayant cessé de traîner leur brouette, ils ont dû rebrousser chemin ; ils se trouvaient alors à 50 m de la crête du cirque. La température à l'intérieur du scaphandre de Shepard était alors de 35 °C ; son cœur battait 120 fois par minute.

Mission réussie

Lors du retour, quatre expériences scientifiques, visant d'éventuelles applications de l'absence de pesanteur, ont lieu dans la cabine : séparation, par électrophorèse, des constituants d'un composé chimique ; transmission de la chaleur dans différents milieux (eau, eau sucrée, huile) ; transfert de liquides d'un récipient à un autre ; fusion de métaux dans un minuscule four électrique.