Journal de l'année Édition 1970 1970Éd. 1970

Conflits

Moyen-Orient

Malgré les combats, une phase diplomatique s'amorce

Le Plan de paix américain, le deuxième en six mois, annoncé le 25 juin 1970 par le secrétaire d'État William Rogers est, tout d'abord, mal accueilli aussi bien du côté israélien que du côté arabe. Il paraît cependant ouvrir une importante partie diplomatique, qui se jouerait dans les coulisses. Il annonce — selon le Premier ministre israélien Golda Meir — une aggravation des divergences qui séparent Jérusalem de Washington.

Les nouvelles propositions américaines, dont la teneur exacte n'est pas révélée, visent essentiellement à rétablir le cessez-le-feu pour une période de trois mois, relancer la mission de médiation de G. Jarring et donner un coup d'arrêt au pourrissement politique et militaire qui a marqué la situation au Proche-Orient au cours des douze mois précédents.

Dans le domaine militaire, les incidents se sont multipliés sur toutes les lignes du cessez-le-feu, prenant de plus en plus souvent la forme de batailles majeures sur terre et dans les airs.

Le front jordanien

Les organisations de commandos se montrent plus actives que l'armée du roi Hussein, qui porte l'essentiel de ses efforts à défendre le territoire contre les incursions et les raids de représailles des forces israéliennes.

Le front syrien

Ce secteur s'anime progressivement et dès l'automne 1969 les accrochages se succèdent à un rythme accéléré. Les autorités de Damas paraissent s'engager, après celles du Caire, dans une guerre d'usure dont l'objectif est d'empêcher Israël de s'installer définitivement dans les territoires occupés. Le 2 octobre, le représentant syrien à l'ONU, dans une lettre à U Thant, accuse le gouvernement de Jérusalem de vouloir évincer 115 000 habitants arabes du Golan, en détruisant systématiquement tous les villages de la région.

Toujours selon Damas, l'armée israélienne aurait incendié ou détruit 17 villages arabes entre le 8 septembre 1968 et le 13 juillet 1969. La Syrie proteste quand, le 21 octobre, Israël installe à Kuneitra le premier tribunal autorisé à appliquer sa propre juridiction sur le Golan. De violentes batailles de blindés et d'artillerie, appuyés par l'aviation, se produisent en février, avril et juin 1970. Tel-Aviv rapporte, à l'occasion de ces derniers engagements, que 900 chars syriens environ sont passés sur la ligne du cessez-le-feu.

Le front libanais

La ligne de cessez-le-feu israélo-libanaise est le théâtre d'affrontements beaucoup plus nombreux et meurtriers. Le gouvernement de Beyrouth, qui n'a pas participé à la guerre des Six-Jours, paraît sincèrement soucieux de maintenir le calme sur sa frontière. Mais l'implantation massive sur son territoire de fedayin, qui imposent ce qu'ils considèrent être leur droit à la liberté de mouvement, suscite des incidents. L'État hébreu réagit vivement en lançant des raids de représailles de grande envergure. Après le bombardement des bases de commandos sur le mont Hermon, le 11 août, U Thant offre d'envoyer des observateurs des deux côtés de la frontière. Beyrouth répond favorablement ; Jérusalem se montre peu empressé d'accueillir des représentants de l'ONU. Malgré la condamnation d'Israël par le Conseil de sécurité le 26 août, l'armée israélienne lance de nouveaux raids de représailles les 3, 4 et 5 septembre. Le 27 décembre, le général Dayan avertit le Liban que ses villages seront détruits si les fedayin poursuivent leurs attaques meurtrières. Celles-ci s'intensifient pendant les premiers mois de 1970.

Le 7 mai, le chef de l'état-major israélien, le général Bar Lev, déclare que la situation est devenue insupportable et qu'il faut dès lors envisager la création d'une ceinture de sécurité au-delà de la frontière israélienne. Le 12 mai, une unité de blindés israéliens pénètre dans la région d'Arkoub pour détruire les bases des guérilleros palestiniens. Le 22, un car scolaire israélien tombe dans une embuscade ; 12 personnes tuées, dont 8 enfants. Aussitôt, l'artillerie de l'État hébreu pilonne des villages libanais frontaliers, faisant une trentaine de morts, dont 21 enfants.

Le front égyptien

Ce secteur tient la vedette dans le conflit. Le 23 juillet 1969, le président Nasser proclame caducs les accords de cessez-le-feu, d'ailleurs violés de part et d'autre dès les premiers jours qui ont suivi la guerre de juin 1967. Le chef de l'État informe son peuple qu'une « longue guerre d'usure » est désormais indispensable pour chasser les occupants. Son objectif est de harceler l'adversaire, de le contraindre à immobiliser une partie importante de ses ressources humaines, économiques et financières, de détruire ses défenses en même temps que son espoir de « transformer les lignes du cessez-le-feu en frontières permanentes ».